Comment les syndicats travaillent sur… le travail (à propos de l’épuisement professionnel)

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Une série de tables rondes ont lieu à l’Assemblée nationale sur le syndrôme d’épuisement professionnel, avec audition des organisations syndicales. Ci-dessous la contribution de la CGT. Elle rend compte de l’approche de la confédération sur : « comment soigner le travail« . De son côté, la CFDT lance une vaste enquête. 

  • Table ronde du 15 septembre 2016 sur l’épuisement professionnel (Contribution de la CGT)

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Nous sommes, historiquement, confronté à des organisations du travail qui nient la
réalité du travail. Et quand ce n’est pas le cas, ça n’est qu’en façade, puisque
c’est pour, dans les faits, mieux le renormaliser – je pense là au Lean Management
qui est présent partout, dans toutes les entreprises (public et privé), toutes les
organisations.
Ça veut dire qu’avec ce type d’organisation on enferme les salariés dans une
prescription dans laquelle ils ont de moins en moins de place, de moins en moins
de marche de manoeuvre. Et ça, ça génère des souffrances terribles pour le salarié,
ce qui pose le problème de la création dans le travail… amputée, avec comme
conséquence possible les fameuses RPS.
Et bien souvent les plaintes qu’on peut entendre ici ou là, viennent de cette
problématique… cette amputation du pouvoir d’agir, de créer.
On a dans ce pays un outil de proximité pour comprendre ce qui se joue afin de
faire émerger cette réalité du travail pouvant aller jusqu’à la transformer : ce sont
les CHSCT, les « Comités D’Hygiènes, de Sécurité et des Conditions de Travail ». Et
ce n’est pas un hasard si c’est particulièrement cette Instance-là qui a été remise
en cause par la loi Rebsamen.
Historiquement, les politiques de santé se sont construites sur un modèle de la
compensation/réparation.
Et non, ce n’est pas normal de mourir au boulot, ni même d’en souffrir… quelle
que soit la compensation, la réparation ; même si elles sont bien souvent justes.
Mais nous y reviendrons plus loin.
La « crise » que nous connaissons qui est souvent qualifiée d’économique, sociale,
environnementale, culturelle est rarement interrogée à partir du travail. Et pour la
CGT cette crise, à sa naissance, est d’abord celle du travail.
Et à force de sacrifier le travail sur l’autel de la lutte pour l’emploi en imposant la
précarité, en segmentant les parcours professionnels, au mépris de toute logique
d’apprentissage ; à force de négliger le débat sur la qualité du travail bien fait et
l’efficacité du travail utile, le mal-travail et son cortège de pathologies, de
souffrance,… tout ça « explose » les dépenses, ravage l’économie, plombe le
social, disloque le vivre ensemble et la démocratie ; pour finir par compromettre
gravement l’efficacité et la qualité des productions et des services, en minant la
vraie compétitivité, celle de la coopération et de la compétence.
Cette privation du travail bien fait et de toute possibilité de le discuter, conduit
l’individu soit dans un désengagement qui ne satisfait personne, soit dans une
spirale inquiétante d’un travail jamais abouti, qui n’a plus de sens…et qui peut
connaitre une issue encore plus dramatique que l’épuisement professionnel. Nous
ne pouvons pas déconnecter nos propos de la situation symptomatique qu’on
rencontre aujourd’hui avec les personnels des établissements de soins.

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La CGT l’affirme : il nous faut d’abord soigner le travail.
Et ça ne peut pas se faire sans donner la parole aux véritables experts du travail,
aux créateurs de richesses : les travailleuses et travailleurs eux-mêmes. En effet,
lorsqu’il travaille, l’individu retravaille toujours ce qui lui est prescrit, il n’est
jamais simple exécutant soumis.
On n’est jamais totalement victime de la parcellisation des tâches, des modes
d’organisation du travail… jamais totalement assujetti à la gestion, au marketing,
à la communication… Car on recentre toujours le cadre prescrit de son activité
professionnelle autour de ses propres normes de vie.
Ça veut dire qu’au travers du moindre de ses actes, dans son activité réelle, il se
construit, tisse des liens avec les autres, produit du lien social, de la solidarité, de
la société… Et de la subversion ! Nous touchons là le coeur d’une désobéissance qui
nous donner la perspective des renversements à venir. C’est un formidable
potentiel pour le syndicalisme et l’ensemble des forces sociales progressistes qui
souhaitent une véritable liberté et démocratie au travail… Et au-delà !
S’occuper du travail, c’est croire en l’Etre Humain, pour construire « la cité», où
chaque travailleur devient citoyen. Cette ambition impose le droit à la parole, à
l’écoute, au respect, à la vérité et exige la participation de toutes et tous à partir
des réalités de leur travail. C’est dans le travail, par la possibilité de s’exprimer
directement sur son travail, qu’il faut restituer à l’être humain son pouvoir et sa
capacité d’agir : il y trouvera des outils individuels et collectifs pour « construire
en santé » une dimension essentielle de sa personnalité.
Un autre point nous paraît essentiel, c’est de mettre en lumière les métiers ;
Parce qu’ils sont l’aboutissement des collectifs construits par les travailleurs pour
bien faire leur travail. Même si ces collectifs ont été mis à mal, les métiers ignorés,
bafoués, ils sont toujours là, les travailleurs ne cessent de les construire et
reconstruire dans l’invisibilité.
Grâce à cela, des trains roulent encore, l’électricité arrive dans nos maisons, les
services publics résistent malgré toutes les coupes sombres. Les travailleurs font
des miracles chaque jour.
Même en voie d’affaiblissement, ce potentiel considérable ne sera jamais mort, il
est le reflet de cette recherche d’émancipation des travailleurs. Mais il doit être
maintenant mis en visibilité et reconnu.
Permettre aux travailleurs d’exprimer leur savoir-faire devenus des métiers, les
valoriser, les transmettre aux plus jeunes, c’est se donner les moyens d’un
nouveau développement du pays que ce soit dans l’industrie ou les services.
Et enfin, il nous faut affirmer les liens entre les enjeux du travail, ceux de la
santé et de l’organisation des solidarités dans la cité.
Cette volonté nous amène logiquement à penser la sécurité sociale d’aujourd’hui
et de demain, celle qui garantira une sécurité sociale « santé », et une sécurité
sociale « professionnelle ». Cette exigence d’un nouveau plan complet de mise en
sécurité sociale s’inscrit dans une dynamique de prévention de la précarité et de la
désinsertion professionnelles, une dynamique de lutte contre les inégalités, contre
tous les processus d’exclusion ; un nouveau plan de sécurité sociale afin de se
dégager d’une culture réparatrice, « compensatrice » du méfait accompli, c’est-àdire
d’une forme abusive de déni de la responsabilité par la redistribution, pour
s’engager dans des démarches de prévention, d’éducation et de promotion du
travail et de la santé.
La recherche de solution à la crise du vivre ensemble ne passe pas par la casse du
code du travail, des IRP, et par la remise en cause des prérogatives des différents
acteurs du travail et de la santé.
Au contraire, nous devons conquérir de nouveaux droits. La citoyenneté, la liberté
dans, par et avec le travail doivent s’installer dans toutes les entreprises et
services de ce pays. Pour cela, le droit à la représentation collective pour tous les
travailleurs, quelle que soit la taille de leur entreprise est incontournable. Il s’agit
d’ouvrir une nouvelle ère de la démocratie et des droits de l’homme au travail, de
réinterpréter le sens et le rôle de l’entreprise, en l’affranchissant de la tutelle des
employeurs et des actionnaires, en accomplissant une nouvelle étape de
l’émancipation du travail et donc du salariat.
Vous l’aurez compris, la CGT est pour l’éradication du mal être au travail, du maltravail
et de l’épuisement professionnel. Mais nous ne pouvons plus laisser les
victimes actuelles sur le bord de la route. Nous devons prendre en compte
l’extrême fragilité des salariés atteints, et cela nécessite de développer une
bienveillance de toutes et tous, en particulier des pouvoirs publics et de la sécurité
sociale.

 

Pour cela, le bien fondé d’avancer dans la constitution d’un tableau sur les
RPS dont l’épuisement professionnel doit continuer à être discuté. Mais dans tous
les cas, cela ne suffira pas. Il faut mettre en place un réel dispositif
d’accompagnement et de soutien de ces salariés; et ça implique de donner les
moyens et compétences, financiers et humains, aux CRRMP qui connaissent déjà actuellement des difficultés de fonctionnement.

 

Montreuil, le 15 septembre 2016

  • La CFDT lance la plus grande enquête jamais réalisée sur le travail

le 20/09/2016  par Claire Nillus

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Il occupe un tiers de nos vies mais qui sait ce qu’il signifie pour chacun de nous et comment nous le vivons ?
Pour le savoir, la CFDT lance la plus grande enquête interactive sur le travail jamais réalisée en France. L’objectif : collecter des milliers de réponses afin de redonner de la voix aux travailleurs dans le débat public.

L’enquête accessible sur parlonstravail.fr, c’est un questionnaire en ligne ouvert à tous ceux qui ont un avis sur le travail : salariés du privé ou de la fonction publique, intérimaires, autoentrepreneurs, étudiants, stagiaires, demandeurs d’emploi, retraités… Pour participer, il suffit de se connecter au site grâce à un ordinateur, une tablette ou un smartphone, et de répondre au questionnaire ludique et accessible. Le dispositif a pour objectif de collecter jusqu’en janvier 2017 des millions de réponses sur le thème du travail. Comment est-il ressenti, voulu, investi ? A-t-il du sens et si oui, lequel ? Que met-il en jeu individuellement et collectivement ? Quel est son impact sur la santé des personnes ? Leur vie privée ?

La CFDT à l’écoute des travailleurs

« En tant qu’expérience subjective, physique, intellectuelle, le travail n’est pas discuté politiquement. Les débats sur le travail se focalisent sur d’autres aspects comme sa règlementation, son coût, sa compétitivité. C’est pourquoi, en marge des indicateurs économiques et du code du travail, la CFDT souhaite mesurer l’appréhension que les Français en ont, avec leurs désirs et leurs réticences », souligne Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. « Les frontières ont bougé, les statuts ont changé… On ne peut plus confondre emploi et travail. Et plus on essaie de définir le travail, plus l’on s’aperçoit que c’est complexe », précise-t-il.

Pour explorer notre rapport au travail, l’enquête veut toucher et intéresser le plus de monde possible. Pour cela elle interroge 25 grands thèmes (collègues, temps passé au travail, relations avec la hiérarchie, dangers, fatigue, rêves, ambitions…) à l’aide d’un dispositif inédit.

Un dispositif d’enquête inédit

Dans le monde des statistiques, cet outil est complètement nouveau : aucune enquête, aucun sondage, aucune étude n’a jamais permis de faire s’exprimer autant de personnes : les concepteurs espèrent jusqu’à 15 millions de réponses…

De plus, contrairement aux enquêtes traditionnelles qui se font à partir d’un échantillon représentatif de population, on ne sait rien des personnes qui vont se connecter. L’enquête emploie un ton différent des autres études sur le travail (Dares, Insee…) avec des questions plus audacieuses et plus complices, dont l’objectif est de recueillir la parole la plus spontanée possible. Autre originalité : le site contient plusieurs heures de vidéos de salariés de toutes catégories socioprofessionnelles (infirmière, cadre dans l’informatique, ouvrier dans l’automobile, chauffeur VTC, auxiliaire de vie…) filmés en train de répondre à l’enquête et fournissant autant de témoignages touchants, sincères, bruts, à vif… Ces petits films offrent un miroir aux internautes qui peuvent alors s’identifier, s’en amuser, réagir, en débattre…

Enfin, les résultats s’affichent en temps réel avec les réponses des autres internautes. Là encore, les participants peuvent se situer, se comparer et découvrir qu’ils font partie d’un collectif. Pour certains, c’est peut-être une première expérience du syndicalisme et un premier contact vers la CFDT. Car le site propose de réfléchir sur son travail mais pas seulement. Il donne aussi la possibilité d’agir et de prendre les choses en main : un onglet « L’action collective au sein d’un syndicat » donne la possibilité d’être contacté par la CFDT et d’accéder à des guides, des articles juridiques et des outils pour découvrir la CFDT.

Une visibilité nouvelle pour la CFDT

En partenariat avec Viadéo, le réseau social professionnel et le quotidien Libération, cette grande enquête interactive offrira une visibilité nouvelle à la CFDT. Attractive, amusante et décalée, la campagne Parlons travail donnera une image innovante du syndicalisme en France.

Au terme de l’enquête, les centaines de milliers de données collectées seront analysées puis restituées, en mars 2017. Les résultats permettront de mesurer les angoisses, les attentes, les peurs, les envies, les espoirs et les désirs des Français au travail. Ils aideront à trouver de nouveaux consensus, dégager des vérités, imaginer le monde du travail de demain en confrontant le tout aux besoins et aux nécessités du pays. Surtout, l’enquête doit servir de boussole pour enrichir les propositions de la CFDT sur le travail dans le débat politique à la veille de l’élection présidentielle.

 

La CFDT lance un vaste audit sur le travail

La CFDT a de l’ambition. Elle entend lancer « la plus grande enquête jamais réalisée sur le travail ». En présentant cette enquête à la presse, mardi 20 septembre, Laurent Berger a souligné que « l’objectif est de remettre le travail au coeur du débat public avec en ligne de mire l’élection présidentielle ». Pour le secrétaire général de la CFDT, ces résultats permettront d’appuyer les revendications de sa centrale et « d’en construire de nouvelles afin d’interpeller les candidats et de répondre toujours plus aux besoins et aux réalités des travailleurs ».

Intitulée « parlons travail », cette grande enquête interactive est ouverte depuis le 20 septembre sur un site dédié (parlonstravail.fr). Elle sera clôturée le 31 décembre et les résultats seront restitués en février-mars 2017. Réalisée avec les sociétés Upian et Yami 2 – pour un coût de 240 000 euros -, et en partenariat avec Libération et Viadeo, cette enquête n’est pas, à la différence de celle de 2011, réservées aux adhérents de la CFDT mais ouverte « à toute personne ayant un avis sur le travail« , qu’elle soit salarié, fonctionnaire, travailleur indépendant, chômeur, retraité ou étudiant. Elle comporte 172 questions sur 25 thèmes -la santé au travail, la carrière, le rapport à la hiérarchie, les discriminations, le sens du travail, le sexisme, le temps de travail, la grève, les syndicats, la place des machines etc…-, chaque participant ayant la possibilité de confronter en temps réal ses réponses, à travers des videos, avec celles des autres participants.

A travers ce vaste audit sur le travail, Laurent Berger espère toucher  « plusieurs dizaines de milliers de salariés, voire 100 00″. La CFDT entend ainsi « relayer la parole des salariés, le vécu quotidien au travail,  les ras-le-bol, les fiertés, les attentes ». Si elle ne portera pas des revendications qui seraient contraire à ses orientations, par exemple sur le temps de travail, « cela peut faire sortir les uns et les autres de leurs certitudes« , a commenté Laurent Berger. « On n’est pas une éponge », a-t-il ajouté. Cette enquête peut aussi « participer à donner envie de contacter le syndicalisme et la CFDT tout particulièrement ». « Si ça permet d’attirer l’intérêt des travailleurs envers la CFDT, a observé le dirigeant cédétiste, évidemment qu’on ne va pas s’en priver« . L’enquête est lancée deux mois avant les élections de représentativité dans les très petites entreprises (TPE) qui se dérouleront du 28 novembre au 12 décembre. Ce n’est pas un hasard du calendrier.

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