La FSU analyse la loi « pour la liberté de choisir son avenir »

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La FSU publie une analyse détaillée de la loi pompeusement appelée : « Pour la liberté de choisir son avenir professionel« , traitant de la formation professionnelle, de l’assurance-chômage et de l’apprentissage.

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« Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » Note FSU – Mai 2018

 

La formation professionnelle est un enjeu essentiel pour l’ensemble des salarié-es et des demandeur- ses d’emploi. Elle est un outil incontournable pour permettre des évolutions de carrière réussies mais aussi pour le développement des connaissances, des qualifications et compétences pour faire face aux évolutions des métiers, de la société et aux nouveaux défis (démographiques, écologiques, technologiques…). Il s’agit aussi de conforter l’emploi dans le secteur public comme dans le  secteur privé.

Dans ce cadre, une formation initiale ambitieuse et de qualité est incontournable pour permettre à toutes et tous d’activer l’ensemble des dispositifs d’une formation professionnelle continue. C’est pourquoi la FSU milite pour que le système éducatif permette à tous les jeunes d’accéder à un diplôme ou à une qualification professionnelle validée par un diplôme. Nous le savons, aujourd’hui encore, les diplômes restent protecteurs face au chômage. C’est pourquoi, il est aussi nécessaire que toutes les formations professionnelles dispensées débouchent sur des qualifications, des titres ou des diplômes.

Enfin, toutes évolutions, toutes réformes de la formation professionnelle doivent avoir pour objectif de donner davantage de droits, de sécurité et de liberté aux salarié-es et aux demandeur-ses. d’emploi.

 

Une définition de la formation professionnelle

La formation professionnelle ne doit pas se décliner uniquement pour les projets professionnels mais préserver aussi la possibilité de formations pour développer des projets personnels.

Or dans le projet de loi, l’article 4 ne définit plus la formation professionnelle comme « continue » et les actions de formation y sont moins détaillées (elles seront déterminées par voie réglementaire). L’apprentissage y est dorénavant introduit dans le champ des actions de formation et non plus définie comme une formation initiale. Cela ouvre la voie à une nouvelle définition possible de la formation initiale qui aurait les mêmes objectifs que la formation professionnelle continue. Or, il y a une différence essentielle entre les responsabilités des employeurs vis-à-vis des salarié.es et celle du système de formation initiale vis-à-vis des jeunes.

Les objectifs de la formation professionnelle sont redéfinis et axés essentiellement sur le développement des compétences : l’objectif étant uniquement l’employabilité ou la ré-employabilité immédiate. Par ailleurs, la référence aux titres et aux diplômes pour le terme générique de certification professionnelle enregistrée à la Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP – exemple modification de l’article VAE L. 6313-11) est supprimée au profit d’une logique plus adéquationniste aux besoins du marché du travail.

A noter aussi à titre d’illustration de cette évolution, la suppression de l’article L6313-7 qui autorisait des actions de formation « d’acquisition, d’entretien ou de perfectionnement des connaissances ». Ces formations permettaient aux salarié-es d’accéder à la culture, de maintenir ou de parfaire leur qualification et leur niveau culturel et  d’assumer des responsabilités accrues dans   la vie associative. L’article L 6313-9 qui agréait des actions de formation relatives à l’économie de l’entreprise a été supprimé également. Ces actions avaient pour objectif une meilleure compréhension par les salarié-es du fonctionnement et des enjeux de l’entreprise.

Pour la FSU, la suppression de ces articles est assez emblématique de la philosophie du texte qui révèle une vision restrictive des futures formations professionnelles accessibles au plus grand nombre.

 

La monétisation du CPF

Suite à la loi de mars 2014, le Compte personnel de formation (CPF) est alimenté en heures à la fin de chaque année. Il ne peut excéder 150 heures de formation sur 8 ans (24 heures par an pendant les 5 premières années puis 12 heures par an pendant les 3 années suivantes) pour un travail à temps complet. Il n’y a pas de tarif socle ou plafond horaire de financement fixé. Selon les données existantes, le coût moyen d’une heure de formation est estimé en 2016 à 34 euros.

 

L’article 1 porte sur la modification de ce Compte personnel formation. Celui-ci sera crédité non plus en heure mais en euro. Désormais, les salarié-es ne bénéficieront plus d’heures de formation mais d’un capital financier de 500 euros par an plafonné à 5000 euros. Les personnes peu ou pas qualifiées bénéficieraient de 800 euros par an avec un seuil maximum. Ces deux points devront être précisés par arrêté.

Ce principe ne répond pas à la nécessité d’amélioration du CPF mais renforce l’individualisation des droits. La FSU estime que cette disposition risque d’augmenter les inégalités et d’avoir des effets négatifs sur la qualité de l’offre de formation professionnelle. Cela peut profiler aussi une possible marchandisation de la formation professionnelle dans notre pays. Cette réforme se faisant à moyens constants, le financement des formations risque d’être insuffisant voire de mettre à contribution les salarié-es ou les demandeur-ses d’emploi.

 

Les règles régissant le fonctionnement du Compte personnel de formation (CPF) seraient simplifiées : fin des différentes listes de formations éligibles à la formation, gestion externalisée avec l’intervention de la Caisse des dépôts et consignations.

Une application numérique permettant de connaître en temps réel les droits individuels acquis au titre du CPF, de choisir une formation en cohérence avec son projet professionnel, avec les évolutions de l’emploi sur un territoire, sera créée pour tous les actifs. Ce dispositif numérique implique une réflexion essentiellement individuelle quant aux choix possibles de formation professionnelle. Il occulte, de fait, l’importance des collectifs de travail, de personnels formés à l’orientation des salarié-es et des jeunes. Cela menace les services publics qui aujourd’hui remplissent cette mission. Ce rôle qui pouvait, jusque-là, être joué efficacement par certains Organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) reposera maintenant sur le seul Conseil en évolution professionnelle.

 

Gouvernance et rôle des partenaires sociaux

L’article 16 prévoit de créer un nouvel établissement public, France compétences, chargé de la régulation de la formation professionnelle continue et de l’apprentissage. Il fonctionnera de manière quadripartite. Il assurera des missions de péréquation financière entre les branches et les opérateurs de compétences auxquelles elles adhérent. Seront pris en compte : leurs capacités contributrices au titre de leur masse salariale et du nombre de contrats d’alternance réalisés ; le versement des montants financiers aux Régions au titre de l’apprentissage ; le versement des fonds aux opérateurs du conseil en évolution professionnelle choisis par appels d’offres ; la péréquation entre opérateurs de compétences au profit du développement des compétences des entreprises de moins de 50 salariés. France compétences contribuera au suivi et à l’évaluation de la qualité des actions de formation dispensées, à l’observation des coûts et des niveaux de prise en charge des formations s’agissant des fonds publics ou mutualisés. France compétences pourra émettre des recommandations auprès des pouvoirs publics et des représentants des branches professionnelles et aussi les rendre publiques.

Ainsi, le CNEFOP (Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle), le FPSPP (Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnels), le COPANEF (Comité Paritaire interprofessionnel National pour l’Emploi et la Formation) et le CNCP (Commission nationale de la certification professionnelle) seraient remplacés par cet EPA sous tutelle du Ministre chargé de la formation professionnelle.

 

Une partie des compétences consultatives de l’ancien CNEFOP est dévolue à la Commission nationale de la négociation collective (avis sur les projets de loi, d’ordonnances ou de décrets portant sur la politique de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelle initiale et continue), qui s’adjoint alors une représentation des Régions. Cela peut être le signe que l’État reprend la main sur les orientations et les textes relatifs à ces matières. Une évolution qui, si elle se confirmait, pourrait être appréciée positivement. Néanmoins, la FSU ne peut pas accepter que la voix des organisations syndicales ne faisant pas partie des 5 organisations syndicales nationales représentatives soit exclue de la CNNC (Commission nationale de la négociation collective), comme la FSU.

Par contre, les CREFOP seraient maintenus. La FSU sera vigilante quant à leur composition.

 

L’article 19 crée les opérateurs de compétences, à gestion paritaire, agréés par l’État. Leurs missions visent l’appui technique aux branches professionnelles. Ils devront mettre en œuvre leurs politiques conventionnelles, dont la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et la détermination des niveaux de prises en charge adéquates des contrats d’apprentissage et de professionnalisation, en fonction par exemple du niveau de qualification et du type de certification professionnelle. Des conventions d’objectifs et de performance préciseront avec l’État l’aspect opérationnel de leurs missions.

Partant des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), les opérateurs de compétences verront leur périmètre revu. Une logique de regroupement autour d’opérateurs de compétences professionnels est prévue, par négociation, d’ici le 1er juin 2019 afin de procéder à de nouveaux agréments en septembre 2019. Les OPCA deviendront des « opérateurs de compétences ». Ils ne seront plus collecteurs. Leur nombre sera sûrement revu à la baisse suivant en cela, le regroupement des branches professionnelles qui est à l’ordre du jour.

 

L’article 20 habilite le gouvernement à organiser, par voie d’ordonnance, le transfert de la collecte de la contribution relative à la formation professionnelle et à l’apprentissage et de la contribution relative, au financement du compte personnel de formation, aux réseaux des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) et des caisses de mutualité sociale agricole (CMSA).

 

Mission de la Caisse des dépôts et consignations

La Caisse des dépôts et consignations est habilitée à recevoir les ressources notamment la part dédiée au compte personnel de formation. Elle assure la gestion de ces ressources en vue de financer les droits acquis au titre du compte personnel de formation. Elle est habilitée à conduire les procédures d’attribution, à conclure et à exécuter pour le compte de l’État, les marchés publics répondant aux besoins de ce dernier pour la mise en  œuvre du compte  personnel de formation.  Elle peut conclure avec toute personne morale des conventions, notamment financières, dont l’objet est de promouvoir le développement de la formation professionnelle continue pour l’ensemble ou une partie des titulaires du compte personnel de formation.

Elle conclut avec l’État une convention triennale d’objectifs et de performance qui définit notamment la part des ressources destinée à financer les frais de mise en œuvre de ses missions, dont le financement des traitements à caractère automatisé. Elle rend compte trimestriellement à France compétences de l’utilisation de ses ressources et de ses engagements financiers dans des conditions prévues par décret. Elle élabore un rapport annuel de gestion du compte personnel de formation remis à France compétences. Ce rapport est transmis au ministre en charge de la formation professionnelle et au ministre chargé du budget.

 

L’article 10 sur l’orientation

Il prévoit l’abandon par l’État de sa compétence sur l’information des élèves et des étudiant.e.s et la réécriture du précédent accord cadre national fixant le niveau d’engagement des CIO dans le service public régional d’orientation.

La loi du 5 mars 2014 avait organisé un service public d’orientation à deux branches. L’une dédiée aux actifs et sous la responsabilité des régions, l’autre restant sous l’autorité de l’Etat et destinée aux élèves et aux étudiant.e.s (Article 22). Cette configuration équilibrée permettait de tenir compte de la spécificité des publics et d’organiser le travail de différentes structures en complémentarité.

 

Le transfert de la compétence d’information, supprimé de l’article 22 de la loi du 5 mars 2014, a des conséquences dommageables pour les élèves et les étudiant.e.s. Pour ces publics cela signifierait que l’information pourrait leur être dispensée par des prestataires désignés par les régions dans la mesure où ces mêmes régions n’ont pas les personnels compétents pour effectuer ces interventions. On peut craindre que le périmètre de cette intervention ne soit rapidement étendu au conseil. Ceci pose plusieurs questions :

 

  • sur la qualité de l’information dispensée (sa validité scientifique, son niveau de généralité, son objectivité),
  • sur la qualification des personnes qui feront ces interventions et le contrôle des organismes mandatés par les régions, sur la déontologie et l’indépendance des intervenant.e.s par rapports à divers groupes de

 

La loi prévoit de conserver l’ONISEP en tant qu’établissement public au niveau national, mais de transférer les DRONISEP aux régions. Cette mesure signerait à très court terme la disparition du rôle de l’ONISEP en tant qu’opérateur public principal pour l’information des élèves sur « les enseignements et les professions » : d’une part parce que cette mission n’incomberait plus à l’Etat, d’autre part parce que, privée de son réseau de Délégations régionales, l’office serait dans l’impossibilité de continuer sa mission. Les DRONISEP ne se contentent pas, comme le présente le MEN, de diffuser de l’information, mais en produisent sur des thèmes différents et adaptés aux besoins des élèves, et les font remonter au niveau national. Dans quelle mesure les brochures d’information systématiques et gratuites continueront-elles à être dispensées en fin de 3ème, de seconde et de terminale ? Comment aller plus loin dans la régionalisation de l’information alors que des partenariats déjà étroits existent entre les DRONISEP et les régions ? Quelles assurances que les informations dispensées par les régions ne seront pas limitées aux orientations de la politique régionale en matière de formation professionnelle et d’emploi à court terme ? Cette approche régionale de l’information pourrait même devenir un frein à la mobilité des élèves.

Pour les personnels, les dispositions du projet de loi correspondraient au transfert de 270 emplois aux régions avec droit d’option pour les personnels titulaires et menace sur l’emploi des contractuel.le.s. Elles aboutiraient à la déstructuration totale des équipes et des ressources existantes.

La partie VI de l’article 10 prévoit que « l’État et les régions peuvent, à titre expérimental, et pour une durée de trois ans, conclure une convention fixant les modalités de participation des services et établissements de l’État au service public régional de l’orientation. Un décret définit les modalités de l’expérimentation et de son évaluation ». Ceci correspond à la réécriture de l’accord cadre national du 28 novembre 2014 qui fixait déjà le niveau d’engagement des CIO dans le SPRO. Selon le MEN il s’agit d’aller beaucoup plus loin pour renforcer le SPRO.

 

Les Psy-ÉN, dans le cadre de l’activité des CIO, sont déjà chargés aujourd’hui, du suivi des décrocheurs, des dispositions du retour en formation initiale, du 1er accueil et de la 1ère information pour toute personne en recherche de solutions pour son orientation. Les CIO, dans ce cadre, travaillent en complémentarité avec les missions locales et pôle emploi notamment au sein des PSAD. Toutes ces actions s’inscrivent déjà dans leur contribution au SPRO.

Vouloir aller plus loin en décidant de fermer les CIO, comme le Ministère de l’Education nationale l’a annoncé en complément du projet de loi, reviendrait à priver le public scolaire du seul réseau public de proximité, clairement identifié par les familles, dédié aux conseils sur la scolarité et l’orientation, La contrepartie serait des tâches supplémentaires à effectuer pour le SPRO, ceci reviendrait à faire glisser les missions des Psy-ÉN vers la prise en charge des publics adultes pour un accueil dans des guichets uniques, des demandes de reconversions professionnelles ou de conseils pour le CEP. Ces tâches ne font pas partie des missions statutaires des Psy-ÉN et réduiraient encore leur temps de présence auprès des élèves. Elles mettraient de fait les Psy-ÉN sous une double tutelle État / Région, De plus la déclinaison régionale de ces conventions démantèlerait totalement le service public d’orientation de l’Éducation nationale.

 

Apprentissage

L’article 7 modifie les finalités de l’apprentissage avec l’ajout de l’insertion professionnelle. La notion de gratuité de l’apprentissage est ajoutée à cet article « La formation est gratuite pour l’apprenti et pour son représentant légal». La relance de classe de préparation à l’apprentissage est de nouveau dans le projet de loi comme celle permettant aux CFA de garder les jeunes après une rupture de contrat. Ces deux mesures vont accentuer le nombre de jeunes qui quittent prématurément l’école et alimenteront le nombre déjà très élevé de jeunes sans qualification et sans emploi. Ces mesures risquent de multiplier les effets d’aubaine pour les entreprises qui préféreront

« embaucher » des apprenti.es plutôt que des jeunes déjà formé-es et en recherche d’emploi. Les modifications envisagées par ce projet de loi vont exacerber la concurrence entre les systèmes de formation professionnelle au détriment de leur qualité et de l’accueil des jeunes.

Le gouvernement décide ainsi de fragiliser les droits des apprenti-es en détériorant leur condition de travail, leur condition de formation et en banalisant les ruptures de contrat.

 

L’article 14 du projet de loi modifie en profondeur l’élaboration et la régulation des diplômes et titres professionnels.

Pour la FSU, la formation professionnelle doit permettre à tous les jeunes sans qualification non pas d’acquérir quelques compétences prétendument monnayables mais d’accéder à un diplôme ou un titre afin d’entrer durablement dans le marché du travail avec une qualification.

Pour la FSU, les diplômes doivent rester de la compétence des ministères concernés. Les CPC (Commissions professionnelles consultatives) ministérielles ne doivent donc pas être mises sous tutelle de France compétences.

Or, ce projet de loi fait une place plus importante aux branches professionnelles et organisations patronales dans la construction des certifications réalisées par l’État, hors enseignement supérieur. L’Éducation nationale devient un organisme certificateur comme un autre. La composition et le fonctionnement des CPC sont modifiés au détriment de l’Éducation nationale et des organisations syndicales de l’éducation.

L’adaptation des niveaux de qualification sur le modèle Européen est actée dans la loi. Les certifications professionnelles enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) sont dorénavant constituées de blocs de compétences définis comme des ensembles homogènes et cohérents de compétences contribuant à l’exercice autonome d’une activité professionnelle et pouvant être évaluées et validées. Ceci risque de conduire à une perte de cohérence des diplômes professionnels notamment entre formation générale et formation professionnelle et à une perte de sens pour les élèves si les différents savoirs ne sont pas mis en relation.

 

L’article 8 modifie les conditions d’exécution du contrat d’apprentissage en ce qui concerne les conditions d’âge : un jeune peut dorénavant être apprenti de (16 ans à 29 ans révolus. Ce recul de l’âge de l’apprentissage a pour objectif de développer les contrats pour les personnes en réorientations plus tardives vers le marché du travail et ceux de l’enseignement supérieur. La durée du contrat d’apprentissage est elle aussi modifiée : elle est ramenée à six mois minimum (au lieu d’un an minimum). Elle peut aussi être fixée par accord entre le CFA (Centre de formation des apprentis), l’employeur et l’apprenti pour tenir compte de son niveau initial ou des compétences acquises lors d’une mobilité à l’étranger. Cette durée est alors fixée en fonction de l’évaluation des compétences par une convention tripartite signée par le centre de formation, l’employeur et l’apprenti ou son représentant légal, et annexée au contrat d’apprentissage. La durée légale hebdomadaire de référence passe de 35 à 40 heures maximum. Encore une marque de la banalisation de l’apprentissage comme contrat de travail, sans souci de l’âge et du statut de

« formé » de l’apprenti.

Pour la FSU, ces deux mesures rapprochent le contrat d’apprentissage du contrat de professionnalisation sans pour autant rapprocher la rémunération de l’apprenti de celle du titulaire du contrat de professionnalisation.

La FSU est aussi inquiète des nouvelles orientations relatives au contrôle de la qualité de la formation dispensée dans les CFA. Pour la FSU, Le contrôle de la formation professionnelle initiale doit être assuré par le service public d’éducation car il est seul garant d’une évaluation indépendante.

 

L’article 11 donne une nouvelle définition des CFA. Il établit de nouvelles règles pour faciliter le développement de l’offre de formation tout en préservant la spécificité de l’apprentissage, voie de formation initiale qui concourt à l’effort éducatif de la nation. La régulation administrative des centres de formation des apprentis, des sections d’apprentissage et de leurs capacités d’accueil par les régions est supprimée. A compter du 1er janvier 2020, tout nouveau CFA devra être déclaré organisme de formation et obtenir une certification qualité pour ouvrir des formations pour les apprentis. Les missions et obligations des CFA sont revues, notamment pour développer le contrôle continu en cours de formation et encourager la mobilité internationale des apprenti-es.

 

Conseil en évolution professionnelle (CEP)

Introduit par la loi de mars 2014, le Conseil en évolution professionnelle est maintenu et son accessibilité pourrait être renforcée par la modification des missions des actuels OPCA. Ce conseil est gratuit et son contenu sera revu, dans le cadre d’un cahier des charges fixé par arrêté. Pour les jeunes sans emploi et les chômeur-ses, les Missions Locales, l’APEC et Pôle-emploi bénéficient de subventions et de dotations ad hoc pour continuer à délivrer le CEP à ces publics. Pour tous les autres bénéficiaires, et à côté des organismes du service public de l’emploi, un financement sera attribué aux régions, pour déterminer, à l’issue d’un appel d’offres, de nouveaux opérateurs pour les salarié.es.

Le CEP va bénéficier d’un financement dédié comme prévu initialement dans la loi de mars 2014. L’avant-projet de loi prévoit que la part de la contribution des entreprises qui sera consacrée à ce dispositif d’accompagnement ne servira qu’au financement du « CEP [des] actifs occupés du secteur privé ». Le CEP des demandeur-ses d’emploi, qui sera réalisé par Pôle emploi, les missions locales et l’Apec, bénéficiera pour sa part d’une subvention dédiée de l’État à travers les dotations aux opérateurs du ministère du Travail. Mais la FSU constate que les dotations sont en baisse sensible en ce qui concerne l’exercice budgétaire 2018 et la trajectoire budgétaire fixée au ministère du travail est en voie de réduction massive (4,5 milliards d’ici 2022).

 

Le système de financement de la formation professionnelle et de l’alternance va être remis à plat

Ce projet de loi prévoit la mise en place, dès le 1er janvier 2019, de la contribution unique au développement de la formation professionnelle et de l’apprentissage (fusion de la contribution des employeurs au titre de la formation et de la taxe d’apprentissage). La collecte de cette contribution formation serait transférée aux URSSAF.

 

Par ailleurs, l’article L.5422-1-1 exclut les missions locales et Pôle emploi du champ des opérateurs CEP retenus pour élaborer et valider le projet professionnel des futurs démissionnaires susceptibles d’être indemnisés. Paradoxalement Pôle emploi sera tenu de vérifier l’état de mise en œuvre de ce projet 6 mois après la démission et de sanctionner s’il y a lieu. La FSU identifie deux risques : un renforcement de l’adéquationnisme, « adaptation à l’emploi », par la présence des organisations patronales au sein des commissions paritaires chargées de valider les projets professionnels, et l’impossibilité de « remettre en cause » la pertinence d’un projet qui s’avérerait non viable et qui du fait de son abandon de mise en œuvre entraînerait des sanctions à l’encontre du demandeur d’emploi.

Si le gouvernement décide de mettre en place une contribution unique pour le financement du développement de la formation professionnelle et de l’apprentissage, le nouveau système ne gagne pas pour autant en lisibilité. Par ailleurs, concernant la formation des demandeur-ses d’emploi, il est précisé que la part de la contribution des entreprises qui y sera dédiée, sera directement reversée à l’État par les URSSAF.

Enfin, si le gouvernement veut investir massivement dans la formation professionnelle, il doit répondre par ce projet de loi aux besoins de financement et à l’avenir actuellement menacé de l’opérateur public de la formation des adultes (AFPA). Pour la FSU, l’AFPA doit pouvoir être sauvegardée et renforcée pour répondre aux besoins de formation des citoyen-nes et plus particulièrement ceux des demandeur-ses d’emploi.

 

Fin des exonérations de la taxe d’apprentissage

L’avant-projet de loi met donc fin aux exonérations de la taxe d’apprentissage dont bénéficient certains secteurs d’activité qui emploient par ailleurs des apprenti.es. Les trois principaux sont le secteur associatif, le secteur agricole et le secteur des banques mutualistes. Le texte prévoit une fin progressive de ces exonérations d’ici 2024.

 

La réforme de l’assurance-chômage

Le projet de loi prévoit un élargissement de l’indemnisation aux demandeurs d’emploi ayant démissionné de leur emploi précédent, mais limite cette possibilité aux conditions fixées par les partenaires sociaux dans l’accord interprofessionnel de ce début d’année, soit 5 ans minimum de cotisations et la poursuite d’un projet de reconversion nécessitant une formation ou une création/reprise d’entreprise, ainsi qu’un accompagnement préalablement et postérieurement à la démission pour attester du caractère réel et sérieux du projet. De telles conditions sont en effet nécessaires, bien qu’insuffisantes, afin d’une part, d’éviter les pressions à la démission subies par des salarié.es de la part de leur employeur et les projets-pièges du style auto-entrepreneur travaillant sur plate-forme numérique et les effets d’aubaine qui pourraient bénéficier à des salarié.es bien pourvu.es en termes de compétences et surfant d’une occasion à une autre.

Il prévoit aussi la refonte du contrôle des chômeur.ses et des sanctions. Ainsi, le contrôle est intégralement transféré de l’État, sous contrôle du préfet via le Direccte, à Pôle Emploi. Ainsi, l’opérateur public se voit seul compétent pour réduire, suspendre l’allocation et même en exclure un bénéficiaire, sans passer par une commission paritaire. Le directeur d’agence aura tous les pouvoirs et toutes les compétences.

 

Cela est d’autant plus problématique que les sanctions sont aggravées, (par exemple, l’absence à une action de formation ou à une convocation, sans motif légitime, peut valoir une radiation). Il est également significatif de noter que l’augmentation du nombre d’agent.es dédié.es au contrôle se fera à effectifs constants, au détriment du conseil et de l’aide à la recherche d’emploi.

 

Article 34

Désormais, selon l’article L. 5422-20-1 et préalablement aux négociations des conventions nationales d’assurance chômage fixant les publics éligibles, les montants et les durées d’indemnisation au titre de l’assurance chômage, à l’article L.5422-20, le Premier ministre transmettra aux organisations représentatives d’employeurs et de salariés un document de cadrage. Ce document précisera les objectifs de la négociation en ce qui concerne la trajectoire financière, le délai dans lequel cette négociation doit aboutir, et le cas échéant, les objectifs d’évolution des règles du régime d’assurance chômage. Pour la FSU, il s’agit de la fin du paritarisme tel qu’il existe à travers l’UNEDIC depuis 1958. Les parties à la négociation interprofessionnelle, ne pouvant plus fixer les règles triennales et les gérer en toute autonomie, risquent de devenir des exécutant.es de l’orientation donnée par le gouvernement. Concernant le cumul entre emplois à temps partiel et assurance chômage, ce texte assèche les prérogatives des partenaires sociaux.

Articles 35 : contrôle des chômeur.ses

La loi transfère l’autorité de l’État et donc des préfets en matière de suspension des revenus des chômeur.ses, au Directeur Général de Pôle emploi et à ses délégataires. Pôle emploi est reconnu comme compétent pour contrôler les personnes sans emploi et inscrite sur la liste des inscrit-es. Les dispositions opérationnelles seront publiées par décret.

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