Scission à l’UNEF

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L’UNEF connait une scission avant son prochain congrès prévu à l’automne 2019. Nous publions ci-dessous des extraits de la lettre (que nous avons reçue) de la Tendance unité et action syndicale (TUAS) de l’UNEF qui a pris la décision de « quittter l’organisation« . Et nous donnons accès à la totalité du document. Nous publierons les réactions de la direction de l’UNEF face à cette situation.

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  • Télécharger le document complet :Scission UNEF
  • Extraits de la lettre :

 

«  Lettre aux camarades de l’UNEF

 

Issu-e-s principalement de la TUAS, ainsi que de la Majorité nationale de l’UNEF, nous faisons le choix aujourd’hui de quitter l’organisation. Ainsi, nous comptons bien expliquer une dernière fois notre démarche et retranscrire ici nos points d’analyse sur ce qu’est l’Enseignement supérieur et la recherche (ESR) aujourd’hui, ce qu’est le mouvement étudiant, et enfin ce qu’est et n’est pas l’UNEF, les impasses dans lesquelles elle ne cesse de sombrer, et pourquoi il nous semble aujourd’hui nécessaire d’en finir.

Ce texte se veut un outil permettant d’amorcer ou d’approfondir les réflexions de l’ensemble des camarades du syndicat : quels sont les impératifs qui nous sont posés par l’évolution de l’ESR ? Comment doit s’adapter et répondre le syndicalisme étudiant ? Quel est notre rôle et notre devoir de syndicalistes aujourd’hui ? Depuis plusieurs années, ce sont l’ensemble des organisations syndicales, et globalement des organisations du mouvement social qui sont en déclin. Cela se constate aussi bien pour le monde étudiant que pour le syndicalisme professionnel, ou encore dans le monde politique.

Cette année universitaire est marquée par un contexte social inédit : le mouvement des Gilets jaunes. Bien que ses organisations traditionnelles soient affaiblies et n’aient pas été à l’initiative de ce mouvement, ce sont bien les classes populaires qui en sont actrices. Cette forme de lutte prolongée est inédite tant par sa durée que par ses formes d’organisation. Ainsi, elle a ses atouts et ses faiblesses : massive et régulière, assumant un rapport de force en rupture avec la traditionnelle méthode du “dialogue social”, mais n’arrivant pas à mettre la question de la grève et d’un impact économique de masse véritable. Cette situation est révélatrice d’une nécessité de remise en question, d’autocritique profonde, et d’adaptation des structures syndicales.

[…]

 

Le mouvement étudiant d’aujourd’hui :

 

L’affaiblissement général du mouvement étudiant lors des 30 dernières années s’est également accompagné d’une perte d’hégémonie de l’UNEF dans ce dernier. On s’attarde beaucoup sur le fait que l’UNEF n’ai plus le leadership de la représentation étudiante dans les différents conseils de l’ESR, mais beaucoup moins de la réduction de son rôle lors des mobilisations et de sa pertinence en tant qu’outil de lutte.

 

Ainsi, l’UNEF a de moins en moins de place dans le mouvement étudiant, aussi bien d’un point de vue institutionnel que sur les campus universitaire, tant dans l’animation de la vie étudiante et la solidarité, que dans les mobilisations. Le milieu étudiant, à l’image de notre société, connaît un virage à droite et une grande dépolitisation. Le syndicalisme est aujourd’hui représenté par trois type de structures : l’UNEF, dont nous posons aujourd’hui une analyse extrêmement critique ; Solidaires étudiant-e-s qui, bien qu’ayant une démarche syndicale s’inscrivant dans les luttes étudiantes est freiné par son fonctionnement autogestionnaire ; et enfin les syndicats locaux, présent-e-s dans les mobilisations et dans la vie étudiante mais dont la vision de l’ESR ne peut être que partielle ce qui implique mécaniquement des manquements dans les pratiques.

 

En plus de ce paysage syndical de plus en plus restreint, le mouvement étudiant laisse du terrain au corporatisme et à la dépolitisation : jamais la FAGE n’a été aussi forte, cette dernière continue de grandir et d’étendre son réseau, est reconnue comme première interlocutrice du gouvernement, et bien souvent couvée par les différentes administrations.

[…]

 

   Et maintenant ?

 

L’UNEF a développé sa structure sans remise en question depuis des années, et se trouve dans un état de paralysie et de verrouillage bureaucratique important qui empêche une possible réforme de l’intérieur. Elle s’est trouvée embourbée dans ses contradictions sans jamais tenter d’y remédier et qui lui pose une difficulté de rétropédalage, cette dernière joint à une capacité de la direction à s’y complaire. Le décalage avec la réalité est si fort et a passé un tel cap de non retour, que dans l’état actuel des choses le travail de réforme serait herculéen.

 

Avant même de s’étendre sur chaque université à la manière de l’UNEF, notre organisation se donne comme objectif de renforcer et reconstruire les sections locales existantes, et échapper dans un premier temps au schéma de construction/destruction lié aux fonctionnement en cycle de l’UNEF.

 

Se poser la question de la pertinence et légitimité de chaque action est prioritaire dans la mesure où il est primordial d’assurer la stabilité des sections locales. Pour répondre à des objectifs de long terme établis et décrits plus bas, nous comptons prendre le temps de nous reconstruire, aller plus loin en terme de structuration et renouer avec l’action syndicale comme elle a pu l’être par le passé. L’important est de ne pas se précipiter, et de consolider nos sections locales. En se dégageant des décisions court termistes liées aux intérêts de structure nationale et qui poussent à faire des choix précipités, nous nous engageons à adapter notre méthode de structuration en réponse aux intérêts étudiants et en adéquation avec la théorisation originelle du syndicalisme étudiant.

 

En quittant aujourd’hui l’UNEF, nous comptons participer à la construction d’une nouvelle organisation nationale, un syndicat qui soit un véritable outil de solidarité et de lutte pour les étudiant-e-s, permettant de réellement construire un rapport de force national pour gagner des droits. Issu-e-s de plusieurs tendances de l’UNEF, nous défendons ici une vision de l’organisation syndicale réellement efficace, démocratique et transparente, décentralisée, où les étudiant-e-s puissent se saisir des enjeux syndicaux de leur campus et de leur établissement de manière régulière.

 

Cette vision décentralisée doit permettre de répondre aux besoins syndicaux dans des enjeux locaux concrets permettant de convaincre le plus grand nombre de la nécessité d’organisation pour obtenir des changements concrets. Cette vision doit pouvoir se conjuguer avec une cohérence nationale faisant le lien entre les différents types d’établissements et les enjeux propres à chaque formation, ainsi qu’une solidarité entre différents secteurs, nos intérêts concernant la formation et du monde du travail étant étroitement liés.

 

Nous faisons aujourd’hui ce choix historique, assumant de porter un coup très dur à l’organisation centenaire des étudiant-e-s. Nous assumons ce choix, l’UNEF s’enfonçant de jours en jours dans ses contradictions et continuant sans cesse sa descente aux enfers. Nous refusons de voir mourir le syndicalisme étudiant avec cette organisation et faisons ce

 

choix consciemment, dans l’intérêt des étudiant-e-s. Nous faisons le choix aujourd’hui de partager ces réflexions à un grand nombre de camarades de l’UNEF, toutes tendances confondues, afin de favoriser ces réflexions et de lancer l’alerte sur la gravité de la situation et le refus permanente de la direction de l’UNEF de reconnaître son rôle dans cette situation désastreuse.

 

Pour conclure,

 

Le choix de quitter le syndicat n’ai aucunement basé sur le fait de privilégier les intérêts d’une tendance aux dépens des autres. Il ne découle pas d’un ego-trip dans une conjoncture qui nous est favorable, mais bien d’une analyse de l’état actuel du syndicalisme étudiant en France et des besoins auxquels l’UNEF ne répond pas du fait des éléments internes et externes décrits plus haut.

 

C’est avant tout des militant-e-s de l’UNEF qui ont débattu et réfléchi à la pertinence de l’outil que représente l’UNEF en tant que syndicat et sur la possibilité d’en créer un nouveau, plus efficace. Chaque membre y ayant prit part est prêt-e à répondre de ce choix et est ouvert-e à la discussion avec quiconque aura des questionnements quant aux tenants et aboutissants de ce départ. En effet, il est naturel que des questionnements et des positions non tranchées ressortent de cette lecture et nous invitons chaque militant-e, à chaque strats du syndicat, à s’en saisir.

 

Il est important de comprendre que ce choix n’est animé par aucune animosité envers l’UNEF, puisqu’il n’est pas possible d’en vouloir à une structure. Au contraire, il est de notre devoir de reconnaître lorsqu’un outil ne remplit pas ses fonctionnalités et de se poser les questions adéquates : Peut-on l’améliorer ? Est-il obsolète ? Faut-il en changer ? Notre constat nous a poussé à répondre favorablement à la dernière question. Nous comprenons que des camarades portent l’espoir d’une réforme profonde et soient convaincu-e-s que l’UNEF soit améliorable. De part notre longue expérience au sein de l’organisation, nous pensons l’inverse, et cela ne se rapproche en rien de la résignation mais bien d’une  réponse aux défauts du syndicalisme étudiant sur nos facs, c’est en ce sens que nous vous tendons la main et souhaitons ouvrir le débat. Il est de notre responsabilité d’assumer ce débat, il est de la responsabilité de chaque syndicaliste étudiant sincère de s’y investir.« 

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