Vous avez dit Pacte de responsabilité?

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Ci-dessous un document utile pour celles et ceux qui ne l’auraient pas à disposition, et qualifié « d’objet juridique non identifié » par FO et la CGT : le relevé de conclusion entre le MEDEF, la CGPME, l’UPA et les syndicats CFDT, CFTC, CGC, à propos de la mise en oeuvre du Pacte de responsabilité, et des fameuses compensations éventuelles. 

Nous y ajoutons des commentaires de presse: un article paru dans Liaisons sociales, un autre dans l’Humanité, et une interview parue dans les Echos de Laurent Beger (CFDT).

Texte intégral : Pacte-de-responsabilite-Releve-de-conclusions-5-mars-2014

Liaisons sociales

Les partenaires sociaux ont abouti le 5 mars 2014 à un relevé de conclusions sur la mise en œuvre du pacte de responsabilité. La CFDT, la CFE-CGC et la CFTC devraient le parapher. Le texte ouvre la voie aux discussions ou négociations dans les branches sur les contreparties en termes d’emplois.

Mandatés par le Premier ministre pour arrêter les contreparties demandées aux entreprises en échange de la baisse globale du coût du travail annoncée dans le cadre du pacte de responsabilité, patronat et syndicats de salariés se sont mis d’accord, le 5 mars au soir, sur un relevé de conclusions. Comme prévu, la CGT et FO ne signeront pas ce texte, tandis que la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC devraient le parapher dans les jours qui viennent. Le relevé de conclusions sera ensuite transmis au gouvernement. Pour autant, les signataires l’avertissent que « toutes les actions envisagées, qu’elles relèvent de l’entreprise, de la branche ou de l’interprofession, sont indissociables des mesures engagées (baisse de la fiscalité et du coût du travail, simplification) ».

Des négociations de branches pour définir les contreparties

En terme d’emplois, le relevé de conclusions indique que « dans le cadre du pacte de responsabilité, les parties signataires demandent aux branches professionnelles d’ouvrir, dès lors que la trajectoire de baisse des prélèvements sociaux et fiscaux sera précisément définie par les pouvoirs publics, des discussions en vue d’aboutir à un relevé de conclusions signé, ou des négociations en vue d’aboutir à un accord, précisant des objectifs quantitatifs et qualitatifs en termes d’emploi ».

Ainsi, le point d’achoppement de la discussion entamée le 28 février 2014 entre patronat et syndicats – celui d’objectifs chiffrés en terme d’emplois – a été en partie levé : les branches pourront utiliser deux voies pour définir les contreparties : des « discussions » (avec un relevé de conclusions signé) ou des « négociations » (aboutissant à un accord). Les objectifs en termes d’emploi devront être traités dans ce cadre :

– au « niveau général », où seront abordés le niveau de recrutement, la création ou le maintien dans l’emploi (etc.) ; – au « niveau des jeunes », en traitant notamment de l’emploi en l’alternance ; – et au « niveau des seniors », par la signature d’accords sur les contrats de génération, par exemple.

Le calendrier est serré : les branches professionnelles détermineront prochainement leurs objectifs, quantitatifs et qualificatifs, en termes d’emploi. Un premier bilan « pourra » être réalisé avant l’été 2014, puis avant 2015 chaque branche devra définir les critères, les modalités de suivi et d’évaluation des objectifs fixés.

Sur la qualité des emplois (le développement des compétences et des qualifications), il est demandé aux « branches professionnelles de travailler sur l’accompagnement des entreprises dans le développement des compétences et des qualifications de leurs salariés, avant tout dans les TPE/PME ». Et pour aider les branches dans leur tâche, « une délibération sera engagée au niveau interprofessionnel, avant la fin du 1er semestre 2014 » pour leur fournir les outils nécessaires à une politique de développement des compétences et des qualifications. Au final, les branches devront « prendre en compte la montée en compétences des salariés dans le cadre de leur négociation sur les classifications ».

La relance du dialogue social

Concernant, le dialogue social, comme « élément de méthode essentiel pour réussir le pacte de responsabilité », il sera décliné au niveau interprofessionnel, des entreprises et des territoires. Au premier niveau, un nouvel ANI sur la modernisation du dialogue social est annoncé pour l’automne 2014 pour notamment simplifier et améliorer le fonctionnement des instances représentatives du personnel et prendre en compte l’exercice de responsabilités syndicales dans le parcours professionnel des salariés.

Autre grand sujet de dialogue social, celui de l’amélioration du marché du travail. Un premier bilan de l’ANI du 11 janvier 2013 sera conduit dans les prochains mois, puis sur cette base, les signataires s’engagent à ouvrir des « discussions » au second semestre 2014 en vue de « franchir une nouvelle étape » « pour développer l’emploi, la sécurisation des parcours professionnels et la qualité de l’emploi ». Toujours au cours de 2014, il est aussi prévu au niveau interprofessionnel :

– d’engager mi-mars la concertation paritaire sur le financement de la protection sociale ; – d’ouvrir une délibération avec les pouvoirs publics sur le développement de la participation et de l’intéressement ; notamment par une fiscalité incitative ; – d’engager une concertation sur la question du logement pour favoriser la mobilité professionnelle ; – de poursuivre la délibération sur la compétitivité de la France.

Au niveau cette fois des entreprises, le texte prévoit, dans le cadre du nouveau cas de consultation du comité d’entreprise sur les orientations stratégiques de l’entreprise, que le pacte de responsabilité sera pris en compte. De plus, des négociations sur la qualité de vie au travail seront ouvertes.

Les engagements du pace devront également se décliner au niveau des territoires. Ainsi, les parties signataires « s’engageront au niveau régional à dynamiser et développer par le dialogue économique et social, les pactes territoriaux pour l’emploi permettant de dresser un état des lieux et de définir une méthode et des objectifs accompagnant le pacte de responsabilité ».

Enfin, sur le thème de la politique familiale et alors que le président de la République a annoncé la suppression de la cotisation d’allocations familiales au 1er janvier 2017, les partenaires sociaux « font part de leur profond attachement à la gestion ­paritaire » de la branche famille et « à la préservation d’un haut niveau de soutien aux familles qui nécessite de déterminer les moyens appropriés ».

OBSERVATOIRE DES CONTREPARTIES

L’observatoire des contreparties, annoncé par le président de la République, sera « tripartite ». Il suivra le déploiement des dispositifs du pacte de responsabilité : baisse des prélèvements, simplification réglementaire et administrative, engagements des partenaires sociaux, évolution quantitative et qualitative de l’emploi, évolution des marges des entreprises, investissement, rémunération du travail et du capital.

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L’Humanité

Jeudi, au lendemain de la signature par trois syndicats du pacte de responsabilité, Thierry Lepaon, secrétaire général de la confédération, dénonce un pacte de régression sociale.

Dans une charge virulente contre le pacte de responsabilité, le secrétaire général de la CGT a dénoncé hier « un accord de nature quasi personnelle avec le président du Medef passé par François Hollande dans la précipitation ». « La France n’est pas une entreprise », a lancé Thierry Lepaon, taxant la décision du président de la République d’« irresponsable sur la méthode comme sur le fond ».

Non-signataire de la version finale, tout comme FO, la CGT pointe un pacte « qui engage les politiques publiques et les équilibres sociaux de notre pacte républicain sans discussion préalable, ni avec le gouvernement, ni avec la représentation nationale, ni avec les partenaires sociaux  ». Voilà pour la méthode. Dans le fond, le pacte de responsabilité a permis au patronat de faire croire que la restauration des marges augmenterait mathématiquement les investissements. Une « fausse évidence » répond Thierry Lepaon, qui rappelle que « depuis dix ans, le montant des dividendes versés aux actionnaires est supérieur au montant des investissements  ».

En outre, le texte finalisé mercredi, qui n’avance aucun objectif chiffré en matière de création d’emploi, n’impose pas de négociation, y compris dans les branches. Tout juste des « discussions » qui devront accoucher d’un « relevé de conclusions » signé par les parties. Un « machin juridique », dénonce Marie-Laurence Bertrand, qui a mené les discussions sur le pacte de responsabilité au nom de la CGT.

Alors que le gouvernement accorde 30 milliards d’euros supplémentaires d’exonérations de cotisations au patronat, la CGT réaffirme la nécessité d’un véritable contrôle de l’efficacité des aides publiques. « Les privés d’emploi doivent sans cesse faire preuve de leur bonne foi. Personne ne demande rien aux entreprises quand elles encaissent l’argent public  », a rappelé le secrétaire général de la CGT, qui demande, une nouvelle fois, que soit généralisée « la conditionnalité des aides aux entreprises  ».

Par ailleurs, « les salariés et leurs représentants doivent être informés des aides publiques et disposer d’un droit de veto sur leur utilisation  », a ajouté Thierry Lepaon. Au bout du compte, ce pacte ajoute 30 milliards d’euros aux 200 milliards annuels d’exonérations sociales et fiscales en faveur des entreprises. « C’est 10 fois le déficit annuel des régimes de retraites, c’est 30 fois celui de la Caisse nationale d’assurance maladie », rappelle la confédération. ■

par Marion D’allard

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Les Echos

LAURENT BERGER : « NOUS N’AVONS PAS LA MÊME VISION DU SYNDICALISME »

Question : Le texte que vous avez négocié avec le patronat ne comporte pas d’engagement chiffré pour les contreparties aux baisses de charges sociales. Le regrettez-vous ?

Les pin’s qui annoncent 1 million d’emplois, ce n’est que de l’affichage et ce n’est pas mon truc [porté par Pierre Gattaz, NDLR]. Ceux qui attendaient des chiffres avant-hier ne peuvent bien sûr qu’être déçus.

ais nous n’en faisons pas partie pour une raison simple : l’emploi ne se décrète pas. Le relevé de conclusions sur les contreparties énonce une méthode qui favorise l’emploi là où il se crée, dans les branches, les entreprises, les territoires, celle du dialogue social renforcé.

Il annonce un vaste mouvement de négociations de branche sur des engagements chiffrés quant à l’emploi, mais aussi les classifications, les compétences, l’investissement… C’était important pour nous comme était aussi important qu’il y ait une cohérence entre la trajectoire de baisse des prélèvements et le respect des engagements qui seront pris par les branches et les entreprises.

Question : Le patronat conditionne ses engagements à une baisse effective des cotisations. Que pensezvous de cette lecture ?

Les allégements de cotisations comme les mesures fiscales qui seraient programmés en 2015, 2016 et 2017 devront être en miroir des engagements pris mercredi et des résultats en termes d’emploi et d’investissement demain.

Il faut que ces allégements soient progressifs et il est hors de question qu’ils servent au versement de dividendes, contrairement à ce que dit Pierre Gattaz. La logique, c’est que si les engagements sont tenus, la trajectoire de baisse des cotisations se poursuivra. Sinon, il faudra la remettre en cause.

Question : Le gouvernement doit-il faire une loi de votre relevé de conclusions ?

Non. L’Etat nous a demandé de nous mettre en situation de faire des propositions. Nous l’avons fait. C’est une des briques du pacte, il faut qu’il en tienne compte. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’une loi particulière soit nécessaire. Et puis il y a un sujet sur lequel le gouvernement a totalement la main, c’est celui de la courbe de la baisse des prélèvements sur les entreprises.

Il faut qu’il dévoile au plus vite ses intentions là-dessus. Il sera de sa responsabilité de regarder dans chaque loi de Finances, dans chaque loi de financement de la Sécurité sociale, s’il poursuit ou pas les allégements au regard des résultats obtenus sur l’emploi.

Question : Formellement, votre accord est un « relevé de conclusions signé ». Quelle est sa nature juridique précise ?

Dans tous les cas, c’est un contrat. Il n’a échappé à personne que ce relevé de conclusions signé – ce mot est essentiel – est le fruit d’une rude bataille. Il y a aussi la possibilité d’une négociation dans les branches. Les discussions ont montré qu’une partie du patronat reste à convaincre de l’intérêt du dialogue social pour développer la compétitivité et l’emploi.

Au-delà des mots, la réalité, c’est qu’il y aura un dialogue social dans les branches alors qu’une partie du patronat ne voulait absolument pas entendre parler de la moindre contrepartie. Nous estimons que le relevé de conclusions que nous avons obtenu mercredi est le commencement de tout.

Je ne promets pas le Grand Soir, mais je promets que nos équipes feront respecter les décisions prises dans les branches et dans les entreprises. Nous faisons le pari du dialogue social. D’ailleurs, nous mobiliserons toutes nos équipes en mai, quand le Cice va être versé, pour qu’elles interpellent les directions d’entreprise sur son utilisation.

Question : Vous avez signé tous les accords interprofessionnels sans exception depuis de très nombreuses années. Ne craignez-vous pas que votre image en pâtisse auprès des salariés  ?

Là n’est pas la question. La seule qui vaille c’est : est-ce que la CFDT a pesé en faveur des salariés et obtenu des résultats concrets ? Et je peux vous dire qu’à chaque fois, la CFDT a pesé de tout son poids. Cette fois-ci comme les précédentes. Je constate que notre contre-proposition a été reprise à 95 % mercredi soir dans le relevé de conclusions.

Question : Que pensez-vous des formules utilisées par Jean-Claude Mailly, pour qui le texte signé est un « parchemin », ou par la CGT, qui dénonce un « simulacre de négociation  » ?

Ce sont des formules creuses. Si certaines organisations préfèrent rester au bord du chemin pour faire des commentaires, c’est leur choix. Nous n’avons pas la même vision du syndicalisme.

Celui de la CFDT est de regarder la réalité en face sans faire de cadeau au patronat et en n’oubliant jamais que les entreprises, ce sont aussi les salariés. Je rappelle que nous avons signé une déclaration avec la CGT, la FSU et l’Unsa, qui appelait à renégocier les classifications dans les branches. C’est ce que prévoit le relevé de conclusions d’avanthier.

Moi, je suis cohérent avec les engagements que la CFDT a pris. ■

par Leïla De Comarmond

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