Code du travail : une contre-écriture collective

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Un groupe d’universitaires propose d’inclure le droit du chômage dans le Code du travail.  Nous reviendrons sur le projet du Groupe de recherche Pour un autre code du travail (GR-PACT). Ici Robert Crémieux, de la revue Partage et ancien animateur du Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), nous propose de partager un article sur un des passages de ce projet, à propos des « droits du chômage« .

 

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Des juristes proposent d’inclure le droit du chômage dans le Code du travail

C’est une proposition historique pour les chômeurs : un groupe d’universitaires propose d’inclure le droit du chômage dans le Code du travail. S’inscrivant dans le débat ouvert sur le Code du travail notamment par Robert Badinter, une vingtaine d’entre eux a relevé le défi dans le cadre du Groupe de recherche pour un autre Code du travail (GR-PACT).
Ils proposent un Code cohérent, épuré et soulignant les acquis pour les salariés au lieu de restreindre leurs droits. La qualité de leur travail a même convaincu l’éditeur Dalloz, célèbre pour ses Codes, de publier un vrai-faux Code du travail dont la couverture est simplement barrée de la mention « Proposition de… »
Cet ouvrage fera sans doute débat tant il est novateur, tout particulièrement dans le domaine du chômage puisqu’il prévoit d’inscrire dans la loi une partie essentielle des normes qui sont habituellement élaborées dans le cadre d’ Accords nationaux interprofessionnels (ANI) appliquées par l’Unédic et Pôle emploi.

Faire du droit du chômage une partie intégrante du Code du travail.

Vendredi 31 mars 2017, les membres du GR-PACT ont présenté leur « Proposition de Code du travail » dans le cadre d’une conférence-débat à l’Université de Paris Ouest – Nanterre. Dans son introduction, Emmanuel Dockès (coordonateur des travaux) a souligné combien il était faux d’imputer le chômage à un Code du travail qui serait responsable de tous les maux. Les participants ont démontré de leur côté que l’exercice de réécriture, même à droits constants, pouvait être porteur de progrès social. Tout en appelant au débat car il ne s’agit toutefois pas d’un objet juridique donné clé en main.

Tout au long de la journée se sont succédées des tables rondes sur les thèmes allant de « Protection et développement du temps libre » à « Représentativité syndicale et négociation collective », ou encore « Unifier le contrat de travail ». Et bien, sûr, pour la partie qui nous intéresse le plus intitulé « Droits des chômeurs », ce qui est déjà tout un programme.

Sans entrer dans le détail, ce qui sera nécessaire dans la suite des débats, la proposition concrétise par de nombreuses sections et articles la transposition de l’essentiel des normes de l’Unédic (résultant d’accords entre les partenaires sociaux) dans le cadre de la loi. Un progrès pour les chômeuses, chômeurs et précaires qui obtiendraient enfin un vrai statut juridique, fixé par la loi. A vrai dire, il s’agit là dans ce domaine d’un travail qui va bien au-delà des droits acquis et constitue une révolution juridique.

C’est la première fois à ma connaissance qu’un projet va aussi loin dans ce sens sur la base d’une rédaction juridique détaillée. Une innovation qui sera un point d’appui précieux pour les associations de chômeurs qui se retrouveront dans de nombreuses formulations reprenant leurs revendications.

Ainsi par exemple de tout ce qui concerne aujourd’hui les litiges nombreux entre les chômeurs et le Service public de l’emploi sur les questions de la réalisation de leurs droits à indemnisation. Les usagers (ainsi dénommés dans la proposition de Code) ne savent en général pas à quel recours et quelle juridiction se vouer, tant les règles de l’Unédic sont baroques, constituées de règles souvent arbitraires imposées par le patronat dans le cadre des négociations rituelles sur l’Assurance chômage.

L’insécurité juridique des chômeuses, des chômeurs et plus encore des précaires est ainsi totale car les règles changent tous les deux ans, sont souvent mal appliquées par un personnel débordé et insuffisamment formé, soumis à des impératifs de rentabilité. Le film de Ken Loach « Moi, Daniel Blake » a donné récemment une représentation saisissante de l’univers auquel les privés d’emploi sont confrontés.

Les représentants des usagers de Pôle emploi sont désignés par les organisations syndicales et les associations ayant spécifiquement pour objet la défense des intérêts des personnes en recherche d’emploi,.. (extrait de l’article L. 74-18)

La proposition de Code donne enfin une reconnaissance explicite du droit à la représentation. Depuis trente ans les associations de chômeurs (dans la diversité de l’approche de cette question) – et en particulier le Mouvement National des Chômeurs et Précaires (MNCP) – réclame cette reconnaissance. Aujourd’hui encore ils se heurtent à une fin de non-recevoir quand il s’agit d’avoir un véritable droit de regard sur des décisions qui impactent leur vie quotidienne.

Un part importante de la violence sociale ressentie par les chômeurs vient de ce sentiment de n’être pas traité comme des citoyennes et citoyens comme les autres, personnes sans statut juridique, sans véritable garantie de la loi protectrice, sans droit à la parole et sans visibilité sociale.

Une intervenante, Anne Eydoux, économiste, a ainsi fait remarquer que, par exemple, l’indemnisation découle d’un droit constitutionnel ( et de cotisations dans le cadre d’un régime assurantiel obligatoire ) et qu’il ne s’agit pas d’une récompense accordée pour recherche active d’emploi. C’est tout l’enjeu d’un droit des chômeurs ou d’un droit du chômage qui ferait du demandeur d’emploi un sujet de droit à part entière.

Le groupe de travail a mis ainsi à disposition un outil qui permettra le débat et l’action sur des propositions concrètes, avec, comme fil conducteur

une certaine idée de la loi, générale, accessible et protectrice.

Robert Crémieux

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