COVID19: le « virus » des réactions dans le monde

Share on FacebookTweet about this on TwitterShare on Google+Share on LinkedInEmail this to someonePrint this page

Le secteur international de la CGT diffuse des informations sur plusieurs pays et sur les luttes qui s’y déroulent face au COVID-19. Ici des informations venant d’Asie et du Pacifique.

siteon0-dc90f

bandeau

 

 

  • Le texte : Série Virus des luttes

État des luttes et positions syndicales liées à la pandémie de Covid 19 en Asie et zone pacifique

 

Chine

 

La Chine, premier pays touché par le coronavirus semble être le premier pays qui commence à sortir de la crise et de la paralysie.

Les conséquences sur l’économie et la situation sociale en Chine, frappée de plein fouet par cette nouvelle maladie, peuvent, même si un placage direct n’est pas à faire, donner une petite idée des désordres que va subir notre planète en sortie de crise.

Le chômage en Chine a augmenté à un rythme plus rapide au cours des deux premiers mois de 2020 en raison de l’épidémie de coronavirus qu’au cours des dix- huit mois précédents lorsque l’économie chinoise avait été plombée par la guerre commerciale avec les États-Unis.

La croissance de la Chine va ainsi ralentir abruptement cette année et pourrait même tomber à seulement + 0,1 % en 2020 contre + 6,1 % en 2019, selon un scénario du pire dévoilé lundi 23 mars par la Banque mondiale. Les économistes évoquent un retour de la croissance équivalente à 2019 (6,6 % en 2018, 6,1 % en 2019) pour 2023 au plus tôt.

En décembre, le Premier ministre chinois Li Keqiang avait déclaré « qu’il n’y aura pas de familles dont tous les membres seraient au chômage ».

Le taux de chômage officiel, basé sur une enquête auprès des employeurs, ne révèle pas la réalité de la situation du marché du travail en Chine, car il n’inclut pas la plupart des travailleurs migrants, dont beaucoup travaillent dans des usines fermées dans le but de contenir la propagation du virus.

Les 320 millions de travailleurs migrants en Chine1 sont considérés comme les plus vulnérables dans la mesure où beaucoup n’ont pas pu travailler depuis plusieurs semaines, voire mois.

Environ 230 millions d’entre eux travaillent de façon informelle, dans des restaurants de rues, TPE et surtout « Magasins de famille » que l’on trouve à tous les coins de rues en chine Ces structures sont particulièrement vulnérables aux chocs économiques, car elles ne disposent ni de capitaux, ni d’existence « officielle » et sont donc moins en mesure d’emprunter2.

Bien que la Chine ait déjà décidé de réductions d’impôts et d’un fond d’urgence visant à aider ces petites entreprises durement touchées et qui emploient la majorité de la main-d’œuvre, l’inquiétude plane. En effet, une enquête auprès de 7129 travailleurs réalisée le 23 mars (source Zhaopin), a indiqué que :

  • seuls 40,2 % ont déclaré que leur entreprise avait entièrement repris la production,
  • 25,1% ont déclaré avoir perdu leur emploi à cause de l’épidémie
  • 17 % ont déclaré que leur salaire n’avait pas été payé, tandis que
  • 20 % ont déclaré que le versement avait été reporté.

Une autre enquête de Zhaopin auprès des responsables des ressources humaines a brossé un tableau tout aussi sombre : un tiers des entreprises interrogées ont déclaré qu’elles prévoyaient de supprimer des emplois, tandis que 28,2 % ont déclaré qu’elles ne combleraient pas les postes vacants.

Après une paralysie du pays du 15 Janvier au 10 mars, une reprise des luttes est visible mais demeure limitée. En effet seuls 93 mouvements de grève se sont organisés3. Ce chiffre est très minime compte tenu du nombre de travailleur·euse·s, mais progresse de façon exponentielle.

De nombreuses manifestations ont eu lieu dans les secteurs des services et des transports qui connaissaient déjà des difficultés économiques avant l’épidémie de Covid-19.

Ainsi le 10 mars, plus d’un millier de chauffeurs de taxi de Liuzhou, ville du sud-ouest, ont organisé une manifestation réclamant la suspension des frais de location des véhicules et le droit de revendre leur véhicule à la compagnie de taxis sans pénalité. Ils protestaient également contre les taxis « sauvage » et contre la société Didi Chuxing équivalente chinoise d’UBER4.

La plupart des manifestations étaient liées à des arriérés de salaires et à des licenciements. Par exemple, plusieurs travailleur·euse·s d’une société de restauration rapide à Pékin ont organisé une manifestation le 10 mars après que l’entreprise ait refusé de payer trois mois de salaires en retard, s’élevant à près de 50 000 euros, alors même, chose exceptionnelle, qu’un tribunal d’arbitrage lui avait ordonné de les verser.

Les travailleur·euse·s de la construction, y compris certains qui avaient été recrutés pour construire des hôpitaux d’urgence pour les patients du Covid-19 à Wuhan, ont également été contraints de protester contre les salaires impayés.

 

Australie

 La crise du coronavirus s’aggrave en Australie. Les entreprises non essentielles sont fermées et les personnes sont confinées à la maison. Il est à noter toutefois que les écoles, collèges et universités sont restés ouverts.

De nombreux travailleur·euse·s ont perdu leur emploi. Les secteurs du tourisme, des transports, de l’hôtellerie et des arts ont été touchés en premier lieu. Aujourd’hui, de nombreux travailleur·euse·s des commerces de détail perdent leur emploi.

La réponse du gouvernement australien a été mitigée dans la mesure où, entre autres, les mesures de relance financière sont principalement destinées aux entreprises.

Hier, à la suite d’une campagne syndicale, le gouvernement a annoncé une indemnisation salariale pour les travailleur·euse·s qui s’appliquera à toutes les entreprises et à la plupart des travailleur·euse·s. L’argent sera versé aux employeurs pour qu’ils le transmettent aux travailleur·euse·s et sera rétroactive au 1er Mars pour prendre en compte les travailleur·euse·s qui ont perdu leur emploi pendant cette période.

Toutefois cette décision présente quelques lacunes selon le syndicat :

  • L’indemnisation de 1 500 $ (840 €) par quinzaine n’est pas suffisante, estimant qu’il est nécessaire d’augmenter cette indemnisation jusqu’au salaire médian de 1 375 $ (770 €) par
  • Cette somme ne couvre pas les travailleurs migrants détenteurs d’un visa temporaire (environ 1,4 million de travailleurs détenteurs d’un visa temporaire en Australie), ni les travailleur·euse·s intérimaires qui travaillent dans une même entreprise depuis moins de 12

La campagne se poursuit pour remédier à ces deux lacunes, ainsi que pour que tous les travailleur·euse·s précaires qui ont perdu leur emploi en raison de la pandémie soient couverts par cette indemnité.

Enfin notons qu’au cours des dernières semaines, l’ACTU a négocié avec les organisations patronales à travers le pays pour réclamer que les travailleur·euse·s perçoivent au moins 80% de leurs salaires et que l’État garantisse les revenus.

Japon

 

Aucune mesure d’indemnisation n’est prise pour compenser les pertes de salaire, d’emploi ou de la fermeture des TPE. Aucune mesure exceptionnelle liée au coronavirus n’est financée de manière plus générale par le Gouvernement. Les syndicats RENGO et ZENROREN ont demandé conjointement au cabinet ministériel la tenue d’une réunion tripartite. Mais ZENROREN n’a pas été invité tandis que RENGO et Japan Business Fédération5 n’ont pu participer qu’à la séance inaugurale. Depuis, plus aucune réunion tripartite n’a été organisée et aucune nouvelle réunion n’a été planifiée.

Zenroren a annulé toutes les réunions ou rassemblements. La période de mars à avril est traditionnellement le moment des campagnes d’adhésions, et le syndicat craint donc une baisse du nombre de syndiqué·e·s.

 

Sri Lanka

 

FTZ Union est conjointement avec l’Etat chargé du suivi médical et social des travailleur·euse·s. A la suite d’une plainte écrite par le syndicat FTZ union le 26 mars, 20 000 travailleur·euse·s bloqué.e.s dans les zones franches ont été autorisé-e-s à retourner dans leurs villages.

Dans la mesure où tous les donneurs d’ordres sont fermés et qu’ils ne passeront pas de commandes, certaines entreprises de confection ont d’ores et déjà informs qu’elles ne pourraient pas payer les salaires du mois prochain. Le syndicat FTZ Union a envoyé une lettre au ministre en charge du travail, lui demandant d’imposer aux employeurs concernés de payer les salaires du mois de mars sans plus tarder.

Ainsi par exemple, les travailleur·euse·s de Star Garments (grosse entreprise de fabrication textile multimarque) ont reçu des lettres de la direction indiquant qu’elle a versé les salaires pour le mois de mars, mais qu’elle a suspendu le paiement de la prime annuelle qui devait être versée en avril. FTZ Union a contacté la direction de Star Garments pour résoudre ce problème et si cela s’avère nécessaire, le syndicat a indiqué qu’il sollicitera le soutien de la CGT.

 

Népal

 

Depuis l’accroissement du nombre de malades au Népal, GEFONT a présenté au gouvernement népalais un certain nombre de revendications liées à la situation créée par le COVID-19. Le 29 mars le gouvernement a présenté un plan d’aide pour les travailleur·euse·s touchés par la pandémie de coronavirus. Ce plan reprend toutes les demandes formulées par GEFONT :

  • Le gouvernement versera 31 % du salaire de base, correspondant à la prise en charge des cotisations sociales (part salariale et patronale), l’employeur versera le reste du salaire et des primes éventuelles aux travailleur·euse·s
  • Le salaire ne peut subir aucune baisse pendant la période de confinement consécutive à la pandémie
  • Les autorités locales doivent gérer et fournir de la nourriture à tous les travailleurs journaliers et de l’économie informelle pendant le confinement
  • Les chômeurs, les migrants de retour au Népal et les immigré·e·s qui ne peuvent pas prendre l’avion pour leur pays d’origine en raison de la pandémie peuvent participer au programme d’emploi stratégique et recevoir une indemnité suffisante pour leurs moyens de subsistance
  • Les frais de scolarité des écoles privées pour les mois de mars et d’avril ne doivent pas être payés par les travailleur·euse·s
  • Garantie d’État de 2,5 millions de NRS6 pour les frais et revenus des personnes ayant un rôle stratégique7 dans la lutte contre la pandémie
  • Subventions pour les travailleur·euse·s ne pouvant payer pour la fourniture d’électricité pendant la pandémie
  • Les équipements de protection individuelle sont fournis gratuitement au travailleur·euse·s
  • Le traitement médical et social des personnes infectées par la COVID-19 est gratuit

 

 

1 Bien que difficiles à établir, les statistiques de 2017 fixent le nombre de travailleurs migrants en Chine entre 289 millions et 355 millions de personnes.

2 D’après un article du Financial Times du 14 mars 2020.

3 Dont 40 rien que sur le mois de mars.

4 UBER n’a jamais réussi à concurrencer Didi en Chine et à préférer abandonner le marché chinois.

5 JBF, organisation patronale

6 19 millions d’Euros.

7 Ambulanciers, médecins, éboueurs et les autres travailleur·euse·s.

 

Virus des luttes en Asie / Pacifique – 1er avril 2020

Print Friendly

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *