La grève générale (article N°2) : une analyse des grèves en Europe depuis la crise de 2008

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L’article ci-dessous est tiré de Syndicalisme en luttes, numéro 27 de la revue Savoir/agir (mars 2014), avec un dossier coordonné par Nathalie Ethuin  et Karel Yon.  L’auteur de l’article, Gregor Gall (Université de Bradford), y décrit les caractères très « politiques » des conflits apparus dans plusieurs pays européens (Grèce, Portugal, Espagne, France en 2009…) depuis la crise de 2008. Il compare également la conflictualité entre le Sud et le Nord de l’Europe.

 

 

  Savoir/Agir
 


La revue de l’association Raisons d’Agir est publiée par les Éditions du Croquant, qui édite déjà la collection des ouvrages du même nom. Directeur de la publication : Frédéric Lebaron; secrétaire de rédaction : Louis Weber.

Raisons d'Agir a pour objet de promouvoir une intervention publique des chercheurs en sciences sociales qui s’appuie sur leurs compétences spécifiques, sur les acquis de leurs travaux. Il s’agit d’établir ou de renforcer les liens entre chercheurs et militants politiques, syndicaux, associatifs, sans exclusive et en toute autonomie.

Pour le projet spécifique de la revue, on lira l’éditorial de son numéro 1, septembre 2007.

 

Article complet avec les notes : SA27-GregorGall

 

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Les formes contemporaines de l’activité gréviste en Europe occidentale

La domination de la grève politique de masse

Introduction
Aussi longtemps qu’existera le capitalisme, il y aura une masse de travailleurs salariés, exploités et opprimés appelée prolétariat. Aussi longtemps qu’existeront des travailleurs, il y aura des associations de travailleurs (en premier lieu des syndicats) pour corriger les torts que leurs membres, en tant que travailleurs, subissent sous le capitalisme. Aussi longtemps qu’existeront des syndicats, il y aura des grèves, entendues comme le moyen par lequel les travailleurs coalisés font pression sur les employeurs et l’État pour corriger les torts dont ils sont victimes.
Cette formule historique et théorique simple nous dit à la fois beaucoup et presque rien de l’état de l’activité gréviste en Europe occidentale dans les dernières décennies. Elle suggère qu’il y aura des grèves, mais elle ne fournit pas d’indication sur leurs dimensions qualitatives et quantitatives – telles que leur forme, leur nature ou leur fréquence. Pas plus qu’elle ne donne d’indication sur leurs causes spécifiques ou leurs effets particuliers, par exemple en termes de résultats sur le terrain de la négociation collective ou de répercussions politiques. Ce n’est qu’en portant attention aux spécificités de la période politique étudiée qu’il devient possible de faire un usage heuristique de cette formule générique. Cela signifie qu’il est essentiel de tenir compte des dynamiques et contraintes politiques et économiques propres à chaque période du capitalisme pour comprendre comment, où, quand et pourquoi les organisations syndicales répondent par la grève aux situations où elles et leurs membres se trouvent.
Inspiré d’un article intitulé « Toujours la quiétude ? L’activité gréviste récente dans neuf économies occidentales », ce texte examine l’état des grèves au cours de la période 1986-2008 en Belgique, en Grande-Bretagne, en France, en Allemagne, en Grèce, en Italie, aux Pays-Bas, au Portugal et en Espagne. Revenant sur le débat relatif au déclin de la conflictualité salariale depuis les années 1980 (ce qu’on appelle la « quiétude »), il défend l’idée que l’activité gréviste au cours des deux dernières décennies est marquée par le triomphe et l’enracinement du néolibéralisme, le déclin corrélatif des vestiges de social-démocratie et la capacité maintenue des syndicats à mobiliser leurs membres dans des grèves de masse, en dépit de l’atrophie de leur implantation sur les lieux de travail et de l’affaiblissement de leur influence politique. Deux éléments essentiels caractérisent le néolibéralisme.
Premièrement, la croyance dans la supériorité des mécanismes du marché sur tous les autres modes d’activité économique (en particulier l’intervention étatique). Par conséquent, tous
les obstacles au libre fonctionnementdes marchés doivent être levés. Deuxièmement, le néolibéralisme est l’instrument grâce auquel les élites sociales font avancer leurs propres intérêts matériels,
politiques et idéologiques au détriment des salariés. Ceci implique que les organisations de travailleurs, tels les syndicats, voient leur pouvoir et leur influence diminuer. À l’inverse, la social-démocratie est définie par l’intervention de l’État sur le marché dans le but de réduire les inégalités et l’injustice sociale. L’un des aspects les plus importants de la social-démocratie est le corporatisme (aussi appelé tripartisme), par le biais duquel le gouvernement et les organisations représentant les employeurs et les salariés se réunissent pour poser des limites au jeu du marché grâce à un processus négocié d’échange politique.(Note 2. La notion d’échange politique a été forgée par le sociologue italien Alessandro Pizzorno. Dans un texte célèbre, il explique que la fonction des syndicats n’est pas seulement d’échanger avec les employeurs la garantie de continuité de la production contre de meilleurs salaires et conditions de travail (l’échange économique), mais aussi de contribuer au consensus social en échange d’une reconnaissance institutionnelle par l’État (l’échange politique). Cf. A. Pizzorno, « Political Exchange and Collective Identity inIndustrial Conflict », in Pizzorno, A., Crouch C.(dir.), The Resurgence of class conflict in Western Europe since 1968, 2 vol., New York, Holmes & Meier Publishers, 1978. (Note du traducteur)
La grève de masse est la manifestation la plus évidente du conflit entre le néolibéralisme et les syndicats qui cherchent à défendre les intérêts de leurs membres et à restaurer ou préserver ce qui reste des institutions de la social-démocratie. Qu’il s’agisse de grèves générales touchant l’économie tout entière ou le secteur public, ce dernier s’est affirmé comme le coeur du mouvement syndical dans cette bataille. C’est aussi la centralité du secteur public qui donne à ces grèves le caractère de grèves politiques de masse. Les grèves politiques se définissent par la concentration
de l’action collective protestataire dans l’arène politique plutôt qu’économique.
Le but est de développer une pression politique sur le gouvernement plutôt que d’infliger des coûts économiques aux employeurs directs des travailleurs, par contraste avec la grève « économique »dont l’objectif est d’entraver l’extraction du profit. En outre, depuis le tournant de 2007-2008 où la crise du néolibéralisme a débouché sur une ère d’austérité, les grèves politiques de masse sont devenues encore plus déterminantes tant au plan qualitatif que quantitatif.
Une importante distinction d’ordre géographique est cependant nécessaire quant à la présence des trois caractéristiques de la période et particulièrement quant à la présence de la grève politique
de masse. Fondamentalement, il existe une coupure nord-sud : tandis que les situations du Portugal, de l’Espagne, de la France, de l’Italie et de la Grèce sont conformes à l’analyse proposée, celles de la Grande-Bretagne, de la Belgique, des Pays-Bas et de l’Allemagne ne le sont pas. Néanmoins, l’examen des trois composantes du néolibéralisme, de la social-démocratie et du syndicalisme
dans ces pays d’Europe du Nord n’est pas moins utile pour comprendre les interdépendances entre ces trois composantes.
Par exemple, en Allemagne existe toujours un cadre d’intervention social-démocrate à travers le système de co-détermination (comités d’entreprise et représentants salariés dans les conseilsd’administration) et de négociation collective de branche qui est garanti par la loi. En Grande-Bretagne, les liens politiques entre les syndicats et le Parti travailliste restent étroits en comparaison avec la plupart des autres pays étudiés, ce qui maintient l’institutionnalisation de la pratique syndicale (par comparaison avec les traditions de manifestations de rue
qu’on trouve ailleurs en France, en Grèce, en Italie, en Espagne et au Portugal).
A été rajouté dans cet article un survol de la période 2009-2013, ce qui permet à l’analyse de couvrir la totalité des deux décennies. Cela a été fait en utilisant les mêmes méthodes de recherche, à savoir l’utilisation de données statistiques produites par les organismes publics nationaux et le recueil de données qualitatives par voie de presse. L’article commence par quelques remarques sur la fiabilité des données de grèves avant d’examiner les tendances globales de l’activité gréviste. La suite de l’article se concentre sur le phénomène de la grève politique de masse.
L’enjeu des données statistiques : les exclusions, les révisions et leurs conséquences
Les mesures habituelles de l’activité gréviste incluent, sur une base annuelle, le nombre de grèves, le nombre de grévistes, le nombre de jours non travaillés (ou « perdus ») et le nombre de jours
non travaillés pour 1000 travailleurs. Ce dernier indicateur est crucial pour mesurer l’activité gréviste car sa dimension relative autorise une comparaison standardisée entre les pays. Dans la grande majorité des neuf pays étudiés, cet indicateur est calculé sur un périmètre qui est celui de la main-d’oeuvre totale, soit tous les adultes en âge de travailler et disponibles pour cela. L’absence de données internationales standardisées doit cependant toujours être prise en considération quand on analyse l’activité gréviste. Dans plusieurs pays – la Belgique, la Grèce, le
Portugal, la France et l’Allemagne – où les grèves politiques de masse ont augmenté en termes absolus et relatifs, la non prise en compte des grèves générales politiques du secteur public a vraisemblablement des conséquences importantes en termes de sous-estimation du nombre de grévistes et de jours non travaillés. Surtout, le cas de la Grèce pose un problème particulier en raison de l’interruption de la collecte des données par l’État à partir de 1998. D’importantes révisions à la baisse ont également affecté les données portant sur la France, la Grèce et l’Espagne.
Et pour ce qui est de l’Allemagne, les chiffres officiels de l’Organisation internationale du travail (OIT) sont très inférieurs à ceux que publie l’institut de recherche économique et sociale de la
Fondation Hans Böckler. Conséquence de cette fragilité de ces données, il est probable que l’activité gréviste soit considérablement sous-estimée. Il est cependant impossible de mesurer l’étendue de cette sous-estimation.
L’activité gréviste récente
L’activité gréviste dans les neuf pays étudiés a quatre caractéristiques principales.
Premièrement, alors qu’on observe un déclin général de l’activité gréviste en données agrégées, cette tendance a souvent été ponctuée de nettes poussées, c’est-à-dire qu’on constate une variation
importante d’une année à l’autre. Ceci s’explique principalement par la survenue de grèves politiques de masse. Néanmoins, depuis la fin des années 1990, on constate un maintien des niveaux les plus bas qui s’étaient établis auparavant et même une certaine croissance à l’intérieur de ces paramètres. Deuxièmement, les différences substantielles entre les pays se maintiennent, comme l’illustre bien la comparaison entre la Belgique, l’Allemagne et les Pays-Bas, d’une part, et la France, l’Italie et l’Espagne, d’autre part.
Troisièmement, l’activité gréviste dans les neuf pays se concentre toujours fortement dans le secteur public, les transports et les communications. La métallurgie est beaucoup moins représentée. Ainsi, l’activité gréviste, et particulièrement les pics de mobilisation, se caractérise de manière croissante par l’intervention dans l’arène politique plutôt qu’économique. Par conséquent, le recours à la grève sert de plus en plus à exercer une pression politique sur les gouvernements plutôt qu’une pression économique sur les employeurs du secteur privé. Ces grèves politiques de masse sont suscitées par des enjeux tels que les réformes du marché du travail, de l’État-providence ou du statut des travailleurs du secteur public. Quatrièmement, les statistiques officielles (publiques) des
grèves sont probablement de moins en moins fiables dans la mesure où les données qu’elles excluent (les grèves dans beaucoup de champs du secteur public) sont toujours plus importantes. Ce qui dessine la perspective non pas tant d’une fin de la quiétude que d’une surestimation de l’étendue du déclin.
Entre 1986 et 1996, on dénombre 51 grèves politiques de masse, tandis qu’un taux légèrement supérieur de 70 marque les douze années allant de 1997 à 2008. Comme on l’a indiqué avant, ce nombre a considérablement augmenté en termes absolus et relatifs depuis 2009 (bien que la contribution singulière de la Grèce déforme significativement les chiffres). La persistance et la relative croissance de ces grèves manifestantes, qui sont utilisées comme une arme dans des négociations ouvertes portant sur les politiques publiques, et où l’État est considéré comme l’employeur en dernier ressort, témoigne du fait que les syndicats sont toujours privés, dans beaucoup de pays, des moyens d’exercer une influence au sein des canaux formels et institutionnalisés d’échange politique.
L’affaiblissement de la négociation collective de branche dans le secteur privé (particulièrement dans l’industrie) est une des raisons ayant conduit à ce que les grèves dans ce secteur se fragmentent et perdent en visibilité (dans la mesure où elles s’organisent au niveau d’établissements ou d’employeurs particuliers). À l’inverse, les grèves de masse du secteur public résultent encore souvent de négociations de branche. Et quand les grèves générales couvrent toute l’économie, la cible du gouvernement offre une perspective unifiante.
En ce qui concerne la distribution différenciée des grèves politiques de masse entre le nord et le sud, les traditions de protestation et d’exclusion ont une portée importante. Ainsi, l’exclusion de secteurs majeurs du mouvement syndical n’est pas historiquement nouvelle dans beaucoup de pays, en raison des liens de ces syndicats avec les partis communistes et de l’existence de dictatures jusqu’au milieu des années 1970 (on pense à la France, à la Grèce, à l’Italie, au Portugal et à l’Espagne). Par conséquent, les formes d’expression des intérêts s’appuyant sur la protestation de masse
et les manifestations de rue sont partie intégrante du répertoire d’action collective. Et pour des raisons qui tiennent plus de la path dependence (Note 3. Concept qui cherche à expliquer les décisions du moment par des décisions passées (NDLR). que de la détermination mécanique, elles ont été d’autant plus facilement intégrées à la pratique des grèves politiques de masse. Dans le contexte d’affaiblissement général du mouvement ouvrier organisé et de déclin global de l’activité gréviste, l’existence de ces grèves peut être vue à la fois comme une force et une faiblesse. La force vient de ce qu’elles témoignent d’une capacité organisationnelle à mettre en scène un mécontentement collectif contre les politiques néolibérales. Mais la faiblesse s’exprime dans le fait même d’avoir à les organiser – ce qui indique un déclin de l’influence politique des syndicats –, et d’avoir à en organiser autant – ce qui montre que ces grèves politiques de masse ne sont pas un remède magique et qu’elles pourraient même perdre en efficacité à mesure qu’elles se multiplient, comme le cas grec semble l’illustrer. En outre, la capacité de mobilisation pour les grèves politiques de masse ne doit pas conduire à penser que l’implantation syndicale sur les lieux de travail est, dans le secteur public, en meilleur état.
Dans le nord de l’Europe, peut-être parce que la crise a été moins profonde et l’austérité un peu moins sévère que dans le sud de l’Europe, le développement de formes plus actives de protestation
de masse (comme la grève politique de masse) qui viendraient déborder les pratiques anciennes telles que le lobbying aux objectifs politiques réduits (associé au corporatisme) n’a pas (encore) eu lieu.

Même si les liens politiques et institutionnels unissant les partis représentant (officiellement) les travailleurs et leurs mouvements syndicaux respectifs se sont considérablement relâchés dans les neuf économies, en Grande-Bretagne, en Allemagne et aux Pays-Bas ces liens restent assez étroits, témoignant de la persistance (à défaut de l’efficacité) du dialogue social dans ces pays. Dans ces pays d’Europe du Nord, les manifestations de masse épisodiques organisées dans les capitales ont permis aux syndiqués de se défouler et à la colère de s’exprimer (sans grand effet cependant), mais elles n’ont jusqu’à maintenant pas été associées à une stratégie visant à perturber le fonctionnement de ces villes, voire celui de l’économie tout entière dans le cadre d’une journée de grève générale.
La différence des traditions de protestation n’explique cependant pas à elle seule pourquoi les grèves politiques de masse sont si communes dans le sud de l’Europe. Étant donné que les partis (et
les gouvernements) sociaux-démocrates n’ont plus de réalité significative à la suite de leur colonisation par le néolibéralisme (donnant naissance au « social-libéralisme »), il est également crucial de noter que les nouveaux partis de la gauche radicale qui ont émergé suite à des stratégies de réalignement, comme Refondation communiste en Italie, le Bloc de gauche au Portugal, Syriza en Grèce ou le Parti de gauche en Allemagne, n’ont pas encore comblé le vide de représentation en devenant des partis de gouvernement crédibles. Seul le cas de la Grèce, depuis 2013, est en train de changer. C’est pourquoi on peut supposer que la prédominance des grèves politiques de masse en Europe du sud résulte de la combinaison entre l’exclusion politique, tant en termes de processus que de résultats, des syndicats dans une économie et une société reconfigurées par le néolibéralisme et la persistance de certaines traditions de protestation politique et d’action. Par conséquent, ces grèves ne visent pas à influencer le processus politique de l’intérieur – comme avec les corporatismes et les gouvernements sociaux-démocrates – mais plutôt de l’extérieur face à l’absence de corporatisme ou de social-démocratie. Considérées d’un autre point de vue, les grèves politiques ne se déploient pas parce que les partis sociaux-démocrates seraient exclus du pouvoir, le temps d’un mandat, ici ou là, comme cela pouvait être le cas dans la période antérieure à l’essor du néolibéralisme. C’est plutôt le changement de paradigme induit par le tournant néolibéral qui a mis fin à la crédibilité politique de la social-démocratie, même si sa base électorale reste composée de certains groupes spécifiques tels que les travailleurs syndiqués.
Conclusion
Depuis le début de l’année 2009, la prédominance de la grève politique de masse dans l’activité gréviste globale s’est maintenue dans les neuf économies et peut-être même renforcée. La Grèce a
par exemple connu douze grèves générales en 2012 et dix-sept dans les deux années précédentes. L’Espagne a connu des grèves générales en 2010, 2012 et 2013 tandis que le Portugal voisin a connu deux grèves générales au cours des deux années 2012 et 2013, et une par an dans les deux années précédentes. Une grève générale a été organisée à l’échelle européenne le 14 novembre 2012. Ces grèves politiques de masse émergent en réaction aux réponses gouvernementales à la crise du néolibéralisme. Plus précisément, les réponses gouvernementales n’ont pas seulement signifié l’imposition d’une « ère d’austérité » en termes de coupes dans les dépenses sociales, mais aussi la réforme des marchés du travail dans le but – c’est l’argument avancé – de stimuler la croissance économique et la création d’emplois, mais avec l’imposition de changements sociaux qui étaient auparavant négociés (dans une certaine mesure) avec les syndicats. En parallèle, les grèves (économiques) du secteur privé ont continué de décliner en termes relatifs, représentant une faible part des données portant sur le niveau global de l’activité gréviste. À cela s’ajoute l’effet des données manquantes évoqué plus haut. Et la division nord-sud persiste. Ainsi la Grande-Bretagne n’a-t-elle expérimenté qu’une seule grève politique de masse – celle du secteur public contre la réforme des retraites, le 30 novembre 2011.
Il apparaît donc que le terme de quiétude est sans doute moins pertinent pour qualifier l’activité gréviste dans le sud de l’Europe occidentale qu’en Europe du nord. Cela ne signifie pas pour autant
qu’il soit raisonnable d’aller jusqu’à parler d’un renouveau ou d’un retour du militantisme dans les pays du sud. En effet, non seulement les batailles qui y sont menées sont défensives et souvent perdues, mais le niveau des grèves enregistré dans la période antérieure aux années 1980-90 n’a toujours pas été atteint. Pour revenir à la formule à la fois historique et théorique avancée au début de l’article, annoncer qu’il continuera d’y avoir des grèves est une évidence. Mais identifier et expliquer la nature particulière des grèves et ce à quoi elles répondent ne peut être efficacement mené qu’en reliant celles-ci à une compréhension des spécificités de la période de la société capitaliste étudiée.

 

croquant

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