Laurent Berger : « franchir une nouvelle étape »

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« Il n’y a pas de compromis possible » (sur le refus des 64 ans) affirme Laurent Berger dans cette interview publiée par la Newsletter CFDT. S’il n’appelle pas à la grève reconductible après le 7 mars, il souhaite ce jour-là  « mettre la France à l’arrêt« . Il commente aussi le climat de « confiance » dans l’unité intersyndicale. 

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“Nous allons franchir une nouvelle étape”

iconeExtrait de l’hebdo n°3861

Par Jérôme Citron et Téo Mollet— Publié le 14/02/2023

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© Stéphane Lagoutte/Challenges-RÉA

Déjà quatre mobilisations. Nous sommes à l’avant-veille de la cinquième, prévue le 16 février. Que peut-on encore dire aux salariés ?

Les premières mobilisations ont été exceptionnelles. On ne pensait pas forcément, au début du mouvement, avoir la capacité de mettre autant de salariés dans les rues avec les problèmes de pouvoir d’achat que nous connaissons, avec la fatigue perceptible de la société. Le 16 février, et surtout le 7 mars, nous allons franchir une nouvelle étape. Les militants CFDT doivent poursuivre ce travail de conviction auprès de leurs collègues. C’est leur investissement qui explique que nous avons, pour l’instant, gagné la bataille de la rue comme celle de l’opinion.

Les gens ont le sentiment que les choses se passent sans eux, qu’ils ne sont pas écoutés. Ce sont les oubliés du travail. Les pouvoirs publics ne captent plus les réalités de travail pour ensuite construire les politiques sociales. La dévalorisation des travailleurs, la baisse constante du coût du travail, la recherche de productivité à tout prix revient en boomerang. Il n’y a pas qu’une question de reconnaissance monétaire. Je qualifie ce conflit de « post-pandémique » car je suis persuadé que les choses ont bougé dans le rapport des Français au travail. À l’opposé, le gouvernement propose une réforme comptable qui sent les années 1990-2000. Cela n’a pas de sens. Le gouvernement doit répondre aux inquiétudes. Cette réforme n’est soutenue ni par l’opinion ni par le monde du travail. Il faut que l’exécutif en tire les conséquences.

L’objectif de la mobilisation sera-t-il atteint si le gouvernement revient sur l’âge de départ légal à la retraite ?

L’intersyndicale a déclaré qu’il fallait mettre la France à l’arrêt le 7 mars. L’expression fait beaucoup parler. Est-ce à dire que nous entrons dans un nouveau temps de la mobilisation ?

Cela dit, le gouvernement a encore le temps de répondre d’ici au 7 mars. Alors, oui, nous sommes bien décidés à mettre la France à l’arrêt s’il continue de faire la sourde oreille. Je revendique cette expression, qui ne signifie pas forcément blocages et ennuis pour la population. C’est une journée où il y aura des manifestations, mais aussi une journée où l’on va se poser, où les commerçants vont pouvoir tirer leur rideau quelques heures en signe de solidarité, où les salariés pourront imaginer des choses sur leurs lieux de travail…

Le 7 mars peut être quelque chose de très festif et joyeux. Nous avons encore plusieurs semaines pour nous y préparer. On va passer un cap.

Mais quand on passe un cap, on prend un risque…

Quid du 8 mars, journée internationale des droits des femmes ?

Le succès de cette mobilisation tient beaucoup à l’unité de l’intersyndicale. Là aussi, nous sommes en train de passer un cap ?

Très certainement. En 2010, j’étais déjà dans le cœur du réacteur, il y avait encore de la défiance entre les organisations. Aujourd’hui, il y a une grande confiance, notamment avec les deux autres grandes centrales avec lesquelles nous sommes souvent en désaccord : la CGT et FO. Cette unité est fondée à la fois sur un mot d’ordre commun – le refus de l’âge de départ à la retraite à 64 ans – et sur le fait d’accepter que nous ne sommes pas d’accord sur tout. Mais quand on décide quelque chose en commun, on s’y tient.

Ce mouvement est aussi le premier dans lequel la CFDT tient son rôle de première organisation syndicale. Et on le montre dans la rue. Les cortèges CFDT sont immenses. Ils étonnent même les autres organisations syndicales, qui ne pensaient pas que nous puissions nous mobiliser avec une telle ampleur. Nous sommes dans un moment où le compromis n’est pas possible et où il faut jouer le rapport de force. Nous l’assumons totalement. Cela fait partie des valeurs de la CFDT, quoi qu’en disent ceux qui crient à la fin du réformisme. Nous ne serons jamais une organisation purement contestataire, là n’est pas la question. Nos militants savent très bien allier mobilisation et dialogue. Ils le font tous les jours dans les branches professionnelles, les entreprises et les administrations.

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