Le 1er Mai, la CES a salué les luttes en France

Share on FacebookTweet about this on TwitterShare on Google+Share on LinkedInEmail this to someonePrint this page

Ci-dessous la déclaration de Esther Lynch, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), venue à Paris le 1er Mai pour soutenir l’intersyndicale et les luttes en France. Cette tribune est parue dans l’Humanité le 27 avril 2023.

logoetuc

Esther Lynch, confédération européenne des syndicats :

«  Le printemps syndical peut se transformer en changement durable »

 

https://www.humanite.fr/social-eco/confederation-europeenne-des-syndicats/esther-lynch-confederation-europeenne-des-syndicats-le-printemps-syndical-peut-se-transformer-en-changement-durable-792997

 

 

Esther-Lynch-European-Trade-Union-Confederation-ETUC

Esther Lynch, Secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats

(photo congrès CES)

Ce 1 er Mai, nous célébrons les victoires du mouvement syndical telles que notre campagne réussie en faveur de la journée de huit heures qui a donné naissance à la Journée internationale des travailleurs.

Cette année en particulier, le mouvement européen du travail a toutes les raisons d’être mobilisé. Nous traversons une crise du coût de la vie provoquée par des entreprises qui cyniquement gonflent leurs prix et leurs profits sous prétexte de problèmes d’approvisionnement dus à la pandémie et à la guerre en Ukraine. En même temps, les travailleurs doivent se battre pour payer nourriture et loyer en raison de la plus importante réduction du salaire réel depuis le début de ce siècle.

Malgré cela, seuls quelques pays européens ont imposé des taxes sur les profits excédentaires pour réagir à la spirale profit-prix alimentant l’inflation. Ou, comme je préfère l’appeler, la « cupidité inflationniste ». Pourtant, de nombreux responsables politiques semblent une nouvelle fois déterminés à faire payer les gens ordinaires pour une autre crise dont ils ne sont en rien responsables.

L’austérité 2.0 est en route. Qu’il s’agisse des diverses exigences de décideurs politiques relatives à la modération salariale, de la hausse dévastatrice des taux d’intérêt frappant durement les travailleurs, de la réforme antidémocratique des retraites du président Macron en France ou encore de la suppression d’un jour de congé décrétée par le gouvernement danois.

Mais, comme nous le verrons encore ce 1 er Mai dans la rue à Paris, où je vais participer à la manifestation syndicale pour le retrait de la réforme des retraites, la riposte est là. En témoignent une douzaine de jours d’arrêt de travail partout en France, la plus importante vague de grèves en Grande-Bretagne depuis les années 1980 et la « méga-grève » en Allemagne.

Les infirmières en Lettonie, les travailleurs d’une usine de pneus en République tchèque et ceux des transports aux Pays-Bas sont parmi les nombreux groupes de salariés sortis vainqueurs de conflits salariaux au cours des derniers mois. Les syndicats luttent avec succès pour s’opposer aux tactiques antisyndicales mais aussi pour s’organiser sur de nouveaux lieux de travail comme chez Amazon en Allemagne et en Grande-Bretagne où les travailleurs ont pour la première fois entamé une action de grève. Partout en Europe, les travailleurs s’organisent. Notre mouvement a vraiment de quoi être fier en ce 1 er Mai.

Aujourd’hui, le défi est de transformer ce printemps syndical en un changement durable. C’est la raison pour laquelle le renouveau syndical sera la priorité du congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES) à Berlin, plus tard dans le mois, durant lequel 1 000 délégués et participants représentant plus de 45 millions de travailleurs débattront et s’accorderont sur un programme d’action syndicale pour ces quatre cruciales prochaines années.

En effet, comme c’est toujours le cas, trop peu de travailleurs profitent des avantages de l’adhésion à un syndicat et de conventions collectives de travail. Cela doit changer. Dans la moitié des États membres de l’Union européenne (UE), 50 % des travailleurs, voire moins, sont couverts par une négociation collective. Les conséquences sont évidentes : les États membres présentant les plus bas niveaux de négociation collective sont également ceux qui pratiquent les salaires les plus bas.

Partout en Europe, les travailleurs s’organisent. Notre mouvement a vraiment de quoi être fier en ce 1 er Mai. »

La CES et ses affiliés ont déjà obtenu une nouvelle directive européenne relative à des salaires minimaux adéquats qui inclut l’obligation pour les États membres de travailler avec les syndicats et d’adopter des engagements juridiques pour étendre la couverture de la négociation collective.

Aujourd’hui, tous les États membres sont tenus de promouvoir la négociation collective et de combattre l’antisyndicalisme. Ceux dont la couverture de la négociation collective est inférieure à 80 % doivent en outre développer un plan d’action pour y remédier. Au niveau national, les syndicats doivent œuvrer pour assurer que cet important changement d’orientation pour l’UE – qui, il y a une décennie, soutenait encore que la négociation collective était incompatible avec la croissance économique – soit maintenant transposé dans le droit national. Ce n’est toutefois qu’un début. En matière de politique de travail, l’UE est déjà distancée par les États-Unis où, dans le cadre de sa loi sur la réduction de l’inflation, l’administration Biden réserve son financement de 4 milliards de dollars aux entreprises qui paient les salaires syndicaux, soutiennent une transition juste et limitent leurs dépenses excessives.

C’est une bonne chose que le Green Deal de l’UE soit à la hauteur du mécanisme de subventions américaines à l’industrie. Il doit maintenant l’être aussi en matière de droits des travailleurs et de conditions sociales liés à cette manne financière.

Aujourd’hui, tous les États membres sont tenus de promouvoir la négociation collective et de combattre l’antisyndicalisme. »

Nous ne pouvons plus tolérer que d’énormes sommes d’argent public soient allouées à des entreprises qui agissent à l’encontre de l’intérêt public en pratiquant des salaires de misère tout en laissant nos systèmes sociaux déjà sous-financés en payer la note. Des entreprises comme Amazon, qui a remporté des marchés publics pour plus de 1 milliard d’euros en à peine trois ans. C’est pourquoi l’une des principales exigences contenues dans le manifeste de Berlin de la CES est l’interdiction totale de confier de l’argent public à des patrons adeptes de l’antisyndicalisme qui, en outre, recourent à l’évasion fiscale et détruisent l’environnement.

Ne pas mettre un frein aux inégalités rampantes et à la voracité de certaines entreprises ayant déclenché la crise actuelle serait faire un cadeau à l’extrême droite. L’Europe a besoin d’un nouveau modèle économique et social qui place l’humain et la planète avant le profit à tout prix. C’est l’avenir pour lequel les membres des syndicats européens manifesteront ce 1 er Mai. Et ce sera également l’objet des discussions et des décisions lors du congrès de la CES à la fin du mois.

L’histoire du 1 er Mai nous montre qu’un réel changement est possible lorsque les travailleurs s’unissent pour réclamer un avenir meilleur.

Print Friendly

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *