Les travailleurs livreurs à vélo se coordonnent en Europe

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Initiée par le REACT (réseau pour l’action collective transnationale) et par le réseau Altersommet (qui associe syndicalistes, associatifs et  et chercheurs), une coordination de plusieurs dizaines de travailleurs-euses coursiers à vélo a eu lieu à l’automne dernier à Bruxelles. Ci-dessous l’annonce de l’initiative par l’Altersommet et une interview de Marielle Benchehboune (REACT) dans l’Humanité du 7 janvier.

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Assemblée Transnationale des Coursiers #riders4rights

Avec le soutien du réseau Alter Summit, la première assemblée européenne des coursiers s’est tenue les 25 et 26 octobre à Bruxelles. Réunissant plus de 60 coursiers de 12 pays européens (Belgique, France, Allemagne, Royaume-Uni, Irlande, Italie, Espagne, Suisse, Autriche, Pays-Bas, Norvège, Finlande) accompagnés de quelques syndicalistes et chercheurs, cette assemblée a permis l’élaboration d’une stratégie commune de lutte contre les abus des plateformes de livraison de repas.

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Paris, août 2017. Les coursiers à vélo de Deliveroo protestaient contre la modification unilatérale des contrats qui instaure le paiement à la course. Xavier Popy/Réa

Paris, août 2017. Les coursiers à vélo de Deliveroo protestaient contre la modification unilatérale des contrats qui instaure le paiement à la course. Xavier Popy/Réa

Marielle Benchehboune « Des mobilisations adaptées aux multinationales »

Lundi, 7 Janvier, 2019

Ubérisation. Face à la globalisation, ReAct organise à l’échelle internationale les syndicats de travailleurs qui font face aux mêmes réalités. Depuis un an, l’association fédère les collectifs de livreurs à vélo. Entretien avec Marielle Benchehboune, sa coordinatrice.

Qu’est-ce que le ReAct ?

Marielle Benchehboune L’idée est de mettre en réseau des acteurs syndicaux et de faciliter leur coordination à l’international pour négocier à l’échelle des multinationales. On a par exemple mis en contact les syndicalistes des centres d’appels français et leurs homologues du Maghreb pour homogénéiser les conditions de travail et le pouvoir d’achat. Cela a permis également de déconstruire le chantage à la délocalisation qui existait des deux côtés de la Méditerranée. On travaille de la même manière avec les salariés de McDonald’s ou encore les ­riverains des plantations de palmiers à huile du groupe Bolloré, du Liberia au Cambodge.

Comment vous êtes-vous retrouvés à travailler avec les livreurs à vélo ?

Marielle Benchehboune Le ReAct fait partie du Global Labour Institute, qui réfléchit à de nouvelles formes de syndicalisme et de mobilisations adaptées aux différentes multinationales. C’est à une de ses réunions, fin 2017, où on avait invité le Collectif des livreurs autonomes de Paris, qu’est venue l’idée de développer la Fédération transnationale des coursiers. Pendant plusieurs mois, nous avons contacté un maximum de collectifs et de syndicats de coursiers européens pour les inviter à une rencontre à Bruxelles, qui a eu lieu les 25 et 26 octobre 2018. On a rassemblé une vingtaine d’organisations venues de douze pays.

Et ils ont pu s’accorder sur des revendications communes ?

Marielle Benchehboune Oui, mais en amont, il faut bien comprendre que les situations sont très différentes. En Autriche, 60 % des livreurs sont salariés des plateformes, alors qu’ils sont tous travailleurs indépendants en France. Dans les pays nordiques, ils intègrent des syndicats traditionnels, alors qu’ailleurs, ils leur préfèrent des collectifs autonomes. Malgré tout, ils ont dégagé des revendications communes avec, en premier lieu, la liberté de s’organiser. De nouvelles pratiques antisyndicales émergent, les plateformes scrutent les réseaux sociaux à la recherche des meneurs pour les déconnecter, une forme de rupture de contrat. Ils demandent un salaire horaire minimum garanti et une transparence des algorithmes et des données. En revanche, il n’y a pas de consensus sur le statut. Certains souhaitent être de vrais indépendants, sans être soumis à cette subordination ; d’autres préfèrent que celle-ci soit reconnue sous forme de salariat.

Comment expliquez-vous cette défiance, en France, envers les syndicats ?

Marielle Benchehboune Dès le début, les livreurs ont essayé de se rapprocher de la CGT, mais les fédérations des transports, des services et de la restauration se sont renvoyé la balle. Le fait que ces travailleurs soient indépendants n’a pas facilité les choses. Depuis, les confédérations semblent réticentes à laisser de la place et une certaine autonomie à des collectifs déjà constitués. Beaucoup de livreurs voient les syndicats comme des dinosaures, incapables de les défendre.

Quelles suites pour 2019 ?

Marielle Benchehboune On a mis en place des outils numériques pour favoriser leur communication, on a mené un travail de comparaison des situations selon les pays pour aller vers une homogénéisation par le haut. Cela devrait permettre des mobilisations transnationales, par exemple des grèves sous la forme de déconnexions massives. On va élargir la fédération à des collectifs hors d’Europe ; un collectif de livreurs argentins vient de nous rejoindre. Une nouvelle rencontre est prévue à l’automne prochain, vraisemblablement à Paris.

Entretien réalisé par Pierric Marissal
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