Michel Desmars est décédé

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Michel Desmars, cheminot et figure militante de la CFDT, critique de son évolution stratégique, puis militant de SUD Rail et de l’Union syndicale Solidaires, est décédé le 21 décembre 2021. Nous publions en sa mémoire la notice du Maîtron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, que nous a fait parvenir Christian Mahieux, militant de SUD Rail et membre du comité des rédaction de la revue Les Utopiques.

Michel Desmars (1942-2021)

Notice biographique de Michel Desmars dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier « Maitron »

https://maitron.fr/spip.php?article3181

Surget et Desmars.

Surget et Desmars.

Desmars, Michel, Marc, Denis

 

Né le 10 août 1942 à Angers (Maine-et-Loire), mort le 21 décembre 2021 à Albi (Tarn) ; cheminot, syndicaliste, communiste libertaire ; secrétaire général de l’Union professionnelle régionale (UPR-CFDT) de Tours (1976-1979) ; délégué du personnel auprès du Directeur Général SNCF (1978-1981) ; membre du secrétariat fédéral des cheminots CFDT (1980-1983 et 1986-1992) ; un des créateurs de SUD-Rail en 1996.

 

Le père de Michel Desmars était à la CGT et au PC. Titulaire d’un Brevet d’enseignement industriel (BEI) de mécanicien et d’un BEI de dessinateur projeteur, Michel Desmars entra au travail en 1961 puis  à  la  SNCF  comme  attaché  groupe  VII  à  la  conduite,  en  septembre  1964  au  dépôt  de  Saint- Pierre-des-Corps  (Indre-et-Loire).  Militant  FO  et  à  l’Union  des  anarcho-syndicalistes  de  1961  à 1966, Michel  Desmars  rejoignit  le mouvement  communiste libertaire en 1969. Il  fut  trésorier de syndicat FO en Loire-Atlantique, puis secrétaire du syndicat des cheminots FO de Tours de 1965 à 1969 et membre de l’UD-FO d’Indre-et-Loire. Il fut exclu de FO en septembre 1969 après la grève des agents de conduite sur le PS4R (réglementation du travail).

 

A Tours, où  il  habitait  2 allée  Cheverny,  Michel Desmars fut pendant le mouvement de mai 1968 l’un  des  animateurs  avec Georges  Fontenis  du Comité    d’Action    Révolutionnaire    (CAR)    qui regroupait  des  lycéens,  étudiants  et  ouvriers  de toutes  tendances  et « comptera  jusqu’à  plus  de 50 participants ». Le CAR qui était présent dans quelques entreprises (SNCF, SKF  et  Indreco)  et se réunissait aux « Arts Déco » adopta fin mai un projet de Plateforme pour une organisation révolutionnaire  (reproduit  in  G.  Fontenis,   op.cit.).

                 ci-contre : Michel Desmars en 1968desmars-1968

 

 Michel Desmars participa ensuite au regroupement de communistes libertaires autour de Georges Fontenis  et  de Daniel  Guérin  dans  le  Mouvement  Communiste  Libertaire  (MCL).  Il  animait  le Comité d’Action Cheminots en collaboration avec le journal Les Cahiers de Mai (Paris, au moins 40  numéros  du  15  juin  1968  à  1973)  créé  « par  des  étudiants,  des  ouvriers,  des  intellectuels  qui participaient activement au mouvement de Mai ». Il collaborait au bulletin des cheminots Action- Cheminots (Tours,  6  numéros  de  mars  1970  au  printemps  1971)  dont  il  était  le  directeur  de publication et où il défendait des positions très anti-appareils syndicaux et ce jusqu’à la dissolution du   groupe  cheminots   en  1972.  Il   fut   également   le  directeur  d’Action-Tours (8   numéros  de septembre 1969 à octobre 1970), journal du groupe local du MCL.

De  1971  à  1976  il  fut  le  directeur  de  publication  des  deux  séries  de Guerre  de  Classes (Tours,  2 numéros en 1971 puis 12 numéros de novembre 1971 à mars 1976), organe du MCL devenu ensuite Organisation  Communiste  Libertaire  (OCL).  Le  numéro  1  précisait  que  le  MCL  était « né  de  la rencontre de la Jeunesse Anarchiste Communiste, des militants de l’ex Fédération Communiste Libertaire  et  du  groupe  Action-Tours,  au  cours  de  l’année  1969… ».  Il  fut  ensuite  membre  de l’Union  des  Travailleurs  Communistes  Libertaires  (UTCL,  voir  Thierry  Renard,  Patrice  Spadoni, Marco Candore), organisation née d’une fusion des anciens  de l’OCL et  d’une scission, à  Pâques 1976, de l’Organisation Révolutionnaire Anarchiste (ORA). Il participa à la fondation d’Alternative libertaire (AL) en 1991, mais décida ne plus militer dans une organisation spécifique communiste libertaire quelques années plus tard.

Il rejoignit la CFDT en 1974, prit rapidement des responsabilités syndicale. Avec notamment Gil Despax il  contribua  à  ce  que  Saint-Pierre-des-Corps  fut  le  premier  dépôt  où  la  CFDT  devint première  organisation  syndicale  de  l’établissement.  Michel  Desmars  a  été  secrétaire  général  de l’Union   professionnelle   régionale   (UPR)   de   Tours   de   1976   à   1979.   Après   les   élections professionnelles de février 1978, il fut nommé délégué du personnel auprès du directeur général de la SNCF. Il fit également partie du groupe technique national des agents de conduite à partir de 1977 et en devint le responsable en même temps qu’il fut élu au secrétariat fédéral en mai 1980, au congrès de Loctudy, puis dégagé comme permanent syndical en juin 1980. Il était donc membre de l’exécutif  de  la  Branche  cheminots  CFDT  lorsque  celle-ci  fut  suspendue  par  décision  de  la Fédération générale des transports et de l’équipement, en date du 3 juin 1981. Cette situation, qui dura jusqu’en octobre 1981 et vit même la FGTE/CFDT demander à la SNCF d’être reconnue en lieu et place de la Branche cheminots CFDT, ne fut qu’un épisode dans la suite du congrès fédéral de   mai   1980   marqué   par   un   affrontement   particulièrement   dur   entre   pro-confédéraux   et oppositionnels.

Au congrès confédéral CFDT de Metz, en 1982, il représentait le syndicat de Tours ; avec celui de Villeneuve-Saint-Georges représenté par Henri Célié, il organisa un forum de débat au sein même de  l’enceinte  du  congrès,  rassemblant  300  délégué∙es ;  135  syndicats  (dont  17  de  cheminots) cosignèrent  une  déclaration  critiquant  la  politique  confédérale,  en  matières  revendicative  et démocratique. Lors de la préparation de la Loi d’orientations sur les transports intérieurs (LOTI) de  décembre  1982,  il  participa  au  groupe  de  travail  tripartite  (ministère-direction-syndicats) concernant le statut des cheminots et les droits des travailleurs. Critique des orientations lors des congrès  FGTE  et  Cheminots  de  1983  à  Saint-Pol-sur-Mer  (Nord),  il  se  présenta  au  secrétariat fédéral des cheminots mais ne fut pas élu. Il reprit son service à la SNCF en juillet 1983. Lors de l’AG  des syndicats  de  la branche cheminots  en octobre 1986  à Lamoura (Jura), il  intervint  pour dire que sa candidature s’inscrivait dans la construction d’un syndicalisme frontalement opposé à la   direction   SNCF,   au   patronat   et   aux   gouvernements   et   sans   discontinuer   au   service   des travailleurs et des travailleuses ; il fut élu au secrétariat fédéral.

C’est en tant que secrétaire fédéral de la CFDT cheminots qu’il fut présent à l’assemblée générale des agents de conduite de Paris Nord qui décidèrent la grève à partir du 18 décembre 1986 ; il mit l’outil syndical à disposition, faisant connaitre dans tous les dépôts SNCF les propositions issues de l’AG et participa activement à la grande grève des cheminots et cheminotes de l’hiver 1986/1987.

Michel Desmars fut réélu au secrétariat fédéral de la CFDT cheminots lors de l’assemblée générale d’avril 1989 à Port-Leucate (Aude). Au début de l’année 1990, les cheminots des régions de Tours et  de  Toulouse  expédièrent  un  train  humanitaire  en  Roumanie :  Michel  Desmars  participa  à l’expédition du 28 janvier au 2 février 1990 et aux rencontres avec les cheminots de Bucarest. En 1990/1991,  Michel  Desmars  fut  le  principal  négociateur  pour  la  CFDT  de  la  nouvelle  grille  de rémunération  SNCF,  en  partie  liée  aux  suites  de  la  grève  de  1986/87,  et  il  s’impliqua  fortement pour que celle-ci ne soit pas rejetée lors de l’AG de la Branche CFDT Cheminots du 6 juin 1991.

Michel  Desmars  participa  activement  aux  combats  de  la  « gauche  CFDT » :  à  l’occasion  des congrès fédéraux  et  confédéraux, mais  aussi  avec le  souci  de se doter d’outils utiles aux équipes syndicales,  comme  les  revues  Résister  à  partir  de  1979,  Alternative  syndicale  à  partir  de  1983, Collectif à partir de 1987, ou encore Les cahiers syndicaux (102 numéros d’avril 1987 à décembre 1995).  Il  raconta  cette  période  dans  un  article  du  numéro  4  des  Cahiers  Les  utopiques  (voir Christian Mahieux). En Haute-Garonne, il fut des principaux animateurs de la revue Collectif 31.

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Il  partit  à  la  retraite  en  août  1992,  s’installa  à  Toulouse  avec  Marie-Françoise  Vabre  et  milita ensuite dans les associations : Agir contre le chômage (AC !), Droit au logement (DAL), mais aussi à  l’Union  régionale  des  retraités  CFDT  jusqu’en  1995.  Il  participa  à  la  création  de  SUD-Rail  en 1996, et fut chargé de la mise en place de la liaison des retraités, et participa activement aussi à la création   du   syndicat   SUD-Rail   Midi-Pyrénées.   Parallèlement,   il   était   toujours   actif   dans l’interprofessionnel en Haute-Garonne, où il contribua, à la création et au développement de ce qui devint l’Union syndicale Solidaires. Il poursuivit ses activités au sein de la fédération SUD-Rail par une  aide  à  la  formation  syndicale  et  à  la  commission  internationale.  A  ce  titre,  il  se  rendit disponible pour de nombreuses initiatives syndicales internationales (en Ukraine, en Palestine, au Mali,  en  Bosnie-Herzégovine,  au  Brésil,  en  Tunisie,  en  Corée,  au  Maroc,  etc.),  souvent  avec  de jeunes  militantes  et  militants  à  qui  il  transmis  son  expérience,  à  travers  sa  pratique,  ses  récits. Michel Desmars participa aux Marches internationales contre le chômage et la précarité ; ainsi, en

1997, il était parmi les marcheurs et marcheuses qui allèrent de Tanger à Amsterdam.. Il participa en  2005  à  Dakar,  à  la  création  du  Réseau  Rail  Sans  Frontière,  dont  il  assura  la  production  du bulletin  d’information  de  2011  à  2016,  tout  en  participant  aux  rencontres  internationales  de  ce Réseau.  En 2018, il  fit  partie  de la  délégation SUD-Rail/Solidaires  aux  troisièmes rencontres du Réseau syndical international de solidarité et de luttes, à Madrid.

A l’occasion des 50 ans de Mai 68, il participa aux débats sur l’autogestion dans les années 68, organisés par Alternatives et autogestion (A&A), l’Association          Autogestion                                 (AA), l’Association des communistes unitaires (ACU), les Amis de Tribune socialiste (ATS), l’Observatoire des mouvements de la société (OMOS), le Réseau pour l’autogestion,           les                                 alternatives, l’altermondialisme, l’écologie et le féminisme (AAAEF), Solidarité écologie gauche alternative (SEGA), les éditions Syllepse et l’Union syndicale Solidaires. Il avait publié « Mai 68 à Tours, souvenirs, souvenirs… » dans le numéro 7 de la revue Les utopiques. Il témoigna également lors d’une émission de la radio Demain Le grand soir.

Michel Desmars a contribué à la formation de nombre de militantes et militants : par sa pratique quotidienne durant des années, alliée au souci de transmission et à la volonté de construire dans la durée des outils permettant l’organisation des travailleurs et travailleuses pour leur émancipation.

Michel  Desmars  fut  élu  conseiller  municipal  de  Toulouse  (Haute-Garonne)  en  2001  sur  la  liste « Motivé-e-s »  et  en  démissionna  en  janvier  2008.  Durant  ces  mêmes  années,  il  participa  aux actions  des  faucheurs  volontaires  d’OGM.  En  2007,  il  était  un  des  principaux  responsables  de l’équipe de campagne de José Bové pour l’élection présidentielle. En 2005, il s’était installé avec sa compagne  Odile  Maignial,  au  [Le]  Verdier  (Tarn)  où  il  fut  élu  maire  en  2014  et  réélu  en  2020. Michel  Desmars  a  signé  plusieurs  textes  d’un  pseudonyme  qu’il  utilisa  ensuite  pour  son  adresse mail : Vouvray, un clin d’œil à la Touraine, au vignoble, au « bon-vivant » partageur qu’il fut.

Marié,  puis  séparé,  il  eut  trois  enfants  dont  l’un  devint  cheminot.  Michel  Desmars  décéda  le  21 décembre 2021.

 

SOURCES :  Arch.  PPo,  SNCF  S30.  —  Arch.  CFDT.  —  Note  de  Marie-Louise  Goergen.  —  Correspondances  avec  le militant, 2002 et 2018. — Michel Gorand in L’Histoire de la fédération des cheminots CFTC puis CFDT depuis février 1918,  Créteil   2016  –  Notes  R.  Dupuy  —  R.  Bianco  « Un  siècle  de  presse… »,  op.  cit.  —  G.  Fontenis, L’autre communisme…, op. cit. – Les utopiques – Arch. C. Mahieux.

23 décembre 2021

Christian Mahieux, à partir des notices précédemment établies par Michel Gorand et Rolf Dupuy.

 

 

 

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