Une candidature syndicale à la présidence du CESE : Gérard Aschieri

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Le 1er décembre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) élira son président. Le CESE comprend 233 conseillers, dont 193 nommés par les organisations syndicales, sociales ou sociétales diverses, et 40 nommés directement par le gouvernement. Trois candidats sont en lice : le président sortant Jean Paul Delevoye, Patrick Bernasconi, candidat du MEDEF (il semble aussi soutenu par la CFDT), et Gérard Aschieri, ancien secrétaire général de la FSU, soutenu par la CGT, la FSU et l’Union syndicale Solidaires. Nous publions le communiqué de candidature de Gérard Aschieri, que nous remercions de nous avoir transmis. En bas de page, l’historique officiel du CESE, organisme peu connu. 

 

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Communiqué CGT, FSU, Union syndicale Solidaires
Pour un conseil économique, social et environnemental efficace et indépendant

Le renouvellement des membres du Conseil économique social et environnemental (CESE) est inscrit dans le calendrier de cette fin d’année. Objet de toutes les convoitises, une bataille pour la future présidence s’engage entre deux hommes, le président sortant et un des principaux responsables du Medef, sans qu’une réelle discussion de fond, seule capable de porter un véritable projet pour l’institution, ne s’engage vraiment.
Notre ambition est de placer le CESE dans une situation digne des institutions de la République : être a l’écoute des besoins de la société, des citoyens. Or, l’originalité de sa composition est le gage de sa légitimité et de sa représentativité parce qu’elle est le reflet de la société civile. Les organisations et les « personnalités qualifiées » qui le composent sont diverses. Cette diversité, qui constitue une véritable richesse, a été encore renforcée par la réforme intervenue en 2010 qui en fait sans doute le seul organisme constitutionnel où est reconnue une place aux organisations de protection de la nature et aux organisations de jeunes et où les femmes représentent plus de 40% des membres.
Dans une situation de crise telle que nous la traversons, nous avons besoin de ces lieux de débat et de construction du vivre ensemble. Le CESE doit demeurer l’un d’entre eux. Pour y parvenir, nous devons nous extraire et extraire la troisième assemblée de la République de toute tentative d’instrumentalisation politique, qu’elle soit interne comme externe. Ainsi, l’importance et l’urgence du moment nécessitent de se détacher de ce climat où chacun cherche à se positionner dans un rapport au pouvoir – quitte à constituer des alliances contre nature – et de porter une vision de l’institution, de son rôle, de sa place et de son utilité sociale.
La situation implique une femme ou un homme bien en phase avec ce qu’est et doit être le Conseil, capable d’écoute, de recherche d’équilibre et de synthèse. Et nous considérons qu’un vice président du Medef peut aujourd’hui difficilement jouer ce rôle, non pas parce qu’il serait « un patron » mais parce que le positionnement actuel du Medef dans le champ du débat social est tout sauf porteur d’équilibre et d’intérêt général. En tout cas, si le Conseil doit s’incarner dans une personnalité, cela ne peut être au détriment d’une responsabilité collégiale et partagée au sein du bureau, où tous les groupes sont représentés.
Même si nombre de préconisations contenues dans les avis adoptés par le Conseil ont trouvé un écho dans des projets de lois, le CESE doit continuer de porter son attention sur une meilleure visibilité de ses travaux, une meilleure compréhension de son rôle et de ses missions. Renforcer son efficacité au service du bien commun et de la Nation est l’ambition que nous devrons développer collectivement au cours de la prochaine mandature.
Ainsi, le CESE doit pouvoir poursuivre sa mission d’éclairage du débat public sur des sujets de société extrêmement diversifiés et conserver sa dimension du temps long. Cela implique de travailler sur une mise en perspective et en mouvement du CESE, de construire un outil adapté aux réalités sociétales actuelles, tout en anticipant l’avenir. Cette démarche ne peut se concevoir qu’en transparence dans le CESE avec l’ensemble des groupes qui y siègent.
Une fois le bilan de cette mandature achevé, plusieurs pistes de travail pourront être explorées. Par exemple, la réforme du présentéisme en cours contribuera à cette recherche d’efficacité nouvelle. Une réflexion de l’ensemble des groupes sur le format des séances plénières pourrait aider à les rendre dynamiques et interactives. De même il faut réfléchir aux moyens de mieux associer la société à nos travaux. L’attribution de moyens nécessaires au travail des sections et délégations est réalisable dans le contexte budgétaire actuel, pour permettre aux conseillers de remplir les missions qui sont les leurs.
Ces idées font probablement l’objet d’un large consensus au sein du Conseil. Elles ne sont la propriété de personne. Elle ont besoin d’être débattues et enrichies par tous.
C’est dans cet esprit que nos organisations entendent s’engager par delà les chapelles et dans l’intérêt général, et qu’elles ont décidé de présenter une candidature à la présidence du CESE en la personne de Gérard ASCHIERI.

 

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Historique

Comment représenter la société ?

La question est au cœur des révolutions démocratiques issues du XVIIIe siècles. Si les élections au suffrage universel s’imposent progressivement comme le moyen d’affirmer la démocratie politique, de nombreux penseurs et acteurs politiques réfléchissent tout au long du XIXe siècle sur une représentation complémentaire qui accorderait une place aux acteurs économiques et sociaux. Les projets sont souvent très divergents sur la composition et les attributions d’une telle assemblée.

Sous la IIe République en 1848, la brève expérience de la « Commission du Luxembourg » est importante mais la société française connaît encore une défiance vis-à-vis de tous les corps intermédiaires. La IIIe République voit une évolution de cette situation avec les lois de 1884 et 1901 sur le syndicalisme et les associations. Les revendications sociales se renforcent et après la Première Guerre mondiale, l’idée de créer un conseil économique est de plus en plus largement débattue.

Bibliographieouvrages relatifs à l’histoire du CESE et à sa place dans le paysage politiqueéconomique et social

 

Historique

Le Conseil national économique (1925-1940)

Le gouvernement du Cartel des gauches dirigé par Edouard Herriot décide en 1924 de la création d’un Conseil national économique (CNE). Projets alternatifs, revendications sociales et luttes politiques aboutissent à une naissance modeste par un simple décret le 16 janvier 1925. L’institution est composée de 47 membres et 94 suppléants.

Syndicalistes ouvriers, patronaux, agricoles et membres de diverses associations siègent au Conseil suivant le principe de désignation par les « organisations les plus représentatives ». Ses attributions sont strictement consultatives. Au statut précaire de l’institution répond un travail de fond effectué de manière de plus en plus intense sur les questions sociales et économiques. Si le Conseil répond à des saisines gouvernementales ponctuelles, il assure surtout une étude générale de la situation économique de la France des années 1930. Quasiment tous les sujets de politiques publiques sont abordés. L’institution s’est installée grâce à son secrétaire général dans une des ailes du Palais-Royal, à proximité du Conseil d’Etat.

Dans le contexte des débats sur la réforme de l’Etat, le CNE obtient finalement par la loi du 19 mars 1936 un statut législatif qui le modifie en profondeur. Coexiste dorénavant une assemblée générale de 173 membres et 20 puis 25 sections professionnelles regroupant 200 puis 250 membres. La rupture politique du Front populaire et le vote des lois sociales à l’été 1936 accorde un nouveau rôle au CNE. En plus de ces travaux d’expertise sur les grandes questions économiques (le chômage, le crédit, l’organisation des marchés agricoles), l’institution est un élément du processus de mise en application des lois sur la semaine de quarante heures et sur l’extension obligatoire des conventions collectives. Le CNE reste une institution consultative mais son activité est alors essentielle dans l’élaboration du nouveau droit social français.

Modifié après l’entrée en guerre, le CNE est purement et simplement supprimé par le gouvernement du maréchal Pétain qui promeut des solutions corporatistes opposées à la culture républicaine incarnée par cette institution.

Le Conseil économique (1946-1959)

A la Libération, les mouvements de résistance sont unanimes à appeler de leurs vœux une refondation de la démocratie sociale et le Conseil économique (CE) connaît une consécration par son inscription dans la constitution. Les difficultés politiques entourant la naissance de la constitution de la IVe République compliquent cependant les choses.

Finalement l’article 25 de la constitution du 13 octobre 1946 prévoit la création du CE, institution chargée d’examiner les projets et propositions de loi de sa compétence. Avec 164 membres, la composition du CE a été organisée pour laisser une large place aux syndicats de travailleurs. Dans le contexte socialement sensible de ces années, la composition est modifiée en 1951 pour tenir compte des changements du paysage syndical, et le nombre de sièges est réduit à 148. Quelques personnalités représentant la « pensée française » sont nommées par le gouvernement. Le CE élit à sa présidence Léon Jouhaux, dirigeant de la CGT puis de la CGT-FO, qui avait été le promoteur de l’institution dans les années 1920. Un autre élément de continuité est lié au fait que le Conseil conserve son installation dans une partie des bâtiments du Palais-Royal. Le Conseil travaille alors selon un modèle proche du fonctionnement des deux autres assemblées.

Entre les projets et propositions de loi qui lui sont soumises et ses autosaisies, le Conseil élabore une très large documentation économique. Les difficultés de fonctionnement du régimel’instabilité gouvernementale, les guerres colonialesrendent difficile l’appréhension des conséquences du avis et rapports du Conseil. Mais de la construction européenne à la politique scientifique, des relations sociales aux enjeux industriels ou agricoles, le CE est un des lieux de débat autour de la reconstruction et de la modernisation économique de la France.

Le Conseil économique et social (1960-2008)

Avec le retour au pouvoir du général de Gaulle, la question de la réorganisation du Conseil est posée. Depuis son discours de Bayeux en 1946, sa position est connue : il envisage la transformation de la deuxième chambre en sénat professionnel mêlant représentation des territoires et des acteurs économiques et sociaux. Dans le contexte de la préparation de la constitution de la Ve République, la question est posée mais le Conseil économique réussit à se maintenir, changeant juste de nom et de composition.

Le Conseil économique et social (CES) est à nouveau inscrit dans la constitution (titre X, devenu après la révision de 1993 le titre XI). La réorganisation des pouvoirs entraîne son rapprochement du pouvoir exécutif. La composition du CES connaît de nouvelles évolutions. L’assemblée regroupe près de deux cents membres auxquels s’adjoignent des membres de sections nommés suivant une procédure différente. Ces derniers, ainsi que les représentants de l’Outre-mer et des personnalités qualifiées sont désignés par le pouvoir exécutif. Une certaine politisation d’une partie de ces nominations est à noter dans le contexte spécifique du passage de la IVe à la Ve République. Mais ce statut et l’existence de membres de sections permettent également aux principaux économistes français de l’époque d’être associés aux travaux du CES.

Le CES est installé le 22 juin 1959 dans un nouveau lieu au Palais d’Iéna. Il est d’abord présidé par Emile Roche, qui avait succédé à Léon Jouhaux après sa mort en 1954. Lui succèdent Gabriel Ventejol, Jean Mattéoli, Jacques Dermagne et Jean-Paul Delevoye.

Le CES a connu différents projets de réforme. Le plus important fut bien sûr celui proposé dans le texte soumis à référendum le 29 avril 1969, il revenait entre autres sur le projet de fusion du Sénat et du CES. La réponse négative lors du vote provoque la démission du général de Gaulle et un statu quo pour le CES. Les réformes ultérieures sont longtemps très limitées et touchent à des points précis de sa composition. Mais les évolutions de la société et du paysage syndical appelaient une modification des équilibres représentatifs.

Le Conseil économique, social et environnemental (2008)

La situation présente est le produit de cette histoire et d’évolutions plus récentes qui ont abouti aux nouveaux textes régissant l’institution entre 2008 et 2010. Les mesures finalement adoptées par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 (changement de nom, plafonnement à 233 du nombre des membres) et surtout par la loi organique du 28 juin 2010 ont tenté de répondre aux critiques habituelles sur la composition de l’institution. Rajeunissementobtenu par une représentation spécifique dédiée aux jeunes et aux étudiants par l’abaissement à dix-huit ans de l’âge permettant de siéger au Conseil, article premier du décret du 29 juillet 2010 – et féminisationaffirmée à l’article 7 de la loi organiqueétaient deux axes de cette réforme.

L’autre point majeur concernait bien sûr la nouvelle représentation de l’environnement. Cette question correspondait a certaines revendications anciennes mais entrait aussi en résonance avec les recommandations du Grenelle de l’environnement en 2007. Cette nouvelle représentation constitue aujourd’hui une des grandes spécificités de l’institution dans le paysage institutionnel français. La Composition du Conseil Economique conserve alors dans ce contexte un caractère complexe.

La loi organique du 28 juin 2010, actuellement en vigueur, a regroupé en trois grands pôles les membres du Conseil : 140 membres au titre de la vie économique et du dialogue social, 60 membres au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, 33 membres au titre de la protection de la nature et de l’environnement. Parmi les autres innovations, il faut noter la possibilité pour l’institution d’être saisie par voie de pétition.

 

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