Contribution d’un militant au congrès CGT (notamment sur la question du travail)

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Merci à Jean-François Tortajada, militant CGT de Toulouse, de nous autoriser à publier sa contribution au débat du congrès confédéral CGT (il appelle à « combattre » le document d’orientation du congrès). Le texte étant long, nous en donnons quelques extraits, et l’accès complet par téléchargement. Nous mettons notamment de larges extraits critiques sur la manière dont le document d’orientation traite la question du travail.  

Note : les documents publiés ici n’engagent évidemment que leurs auteurs.

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« C’est bien ce que nous sommes en train de vivre dans le cadre de la préparation du 52ème congrès. Même s’il s’agit d’une réalité beaucoup plus ancienne mais mise sous l’étouffoir; pour certains par stratégie et pour d’autres, par volonté louable de protéger l’organisation.

Hors aujourd’hui, il se trouve que le projet de document d’Orientation est un révélateur accélérant le processus de « normalisation réformiste » de la CGT. Y compris les questions de qualité de la vie Syndicale, d’organisation et de fonctionnement de la CGT s’inscrivent dans cette voie sans issue pour le monde du travail.« 

  • Une « inquiétude« :

« C’est pourquoi, dans  ce contexte, il faut bien admettre qu’à une inquiétude, s’en ajoute une autre. C’est celle de l’état d’affaiblissement sans précédent,
des organisations progressistes. Qu’elles soient syndicales ou politiques, que ce soit sur les contenus et les stratégies, comme sur l’état des « troupes  » en terme d’organisations censées se déployer auprès des populations et des salariés. Pour une part, ces organisations sont victimes des énormes moyens déployés par le camp d’en face, mais il est dangereux de se réfugier derrière çà, comme on peut malheureusement le constater bien trop souvent.

Cet affaiblissement des organisations progressistes intervient, alors qu’il n’y a jamais eu autant besoin qu’elles jouent leur rôle. Ce qui leur impose de s ‘unir, si l’on s’en réfère à l’histoire,  ramenée à la situation assez exceptionnelle que nous vivons actuellement. Elles ne le font pas !« 

  • Syndicalisme et unité :

« Dans ce contexte de division politique majeure et incontestable du syndicalisme que nous devons assumer, certes l’unité syndicale doit continuer d’être perçue comme un plus, mais c’est différent du syndicalisme rassemblé comme but tel que rappelé dans le document (page 48). Le syndicalisme rassemblé, c’est la démarche inverse ! C’est abandonner le rôle et l’objectif de la CGT qui est de réunir et d’unir non pas les syndicats mais les salariés! Le dernier exemple du syndicalisme rassemblé, c’est l’appel au calme signé par notre SG avec celui de la CFDT. Ce n’est pas ça qui unit les salariés en lutte, qu’ils soit Gilets jaunes ou Gilets rouges !« 

  • Double besogne :

« Parce que les évolutions des quarante dernières années produisent le contexte et l’actualité du moment et malgré son affaiblissement, la CGT se retrouve comme étant la plus puissante et la mieux structurée des organisations progressistes, en terme de potentiel de déploiement des idées sur tout le territoire. D’ailleurs, le mouvement actuel, malgré la persistance de la défiance, exprime une certaine attente envers elle pour organiser la résistance et la victoire (cf: les manifs du samedi).

 Pour y réponde, nous savons bien (ou nous devrions savoir…) qu’il nous faut impérativement travailler les contenus idéologiques permettant de faire naître et/ou de nourrir la conscience de classe, afin d’ouvrir des perspectives politiques qui se déclinent de façon concrète et perceptibles, le tout bien sûr en s’appuyant sur les réalités concrètes du quotidien au travail et hors travail.

 L’objectif étant de donner l’espoir, l’envie et la détermination au plus grand nombre de relever la tête, de reconquérir la dignité qui leur est contestée et de se battre bec et ongles, pour construire une autre société que le capitalisme que l’on veut leur faire admettre comme indépassable.

On appelle çà la double besogne et elle n’a jamais été autant d’actualité depuis très longtemps !!« 

 

  • La CGT et le travail : au coeur du document de congrès

« ….. faire   de la transformation du travail, l’alpha et l’oméga d’une orientation de congrès a de quoi interroger, du moins selon les statuts de la CGT et son caractère de classe.

Après le préambule, le premier chapitre du thème 1 s’intitule « changer le travail pour changer la société ». Il donne le ton du document et résume à lui seul tout le projet d’orientation . Nous le savons, la définition du travail est un sujet complexe et plusieurs définitions en sont données :

  • la transformation de matière et la production de produits et de biens utiles, c’est à dire, une activité humaine organisée ou non, qui inclut l’ensemble des activités, y compris les tâches domestiques et/ou le bénévolat
  • une activité rémunérée constituant tout le système de production créant de la plus-value, après l’achat de la force de travail par le salaire avec une part socialisée ou

 

Avec cette deuxième définition, il s’agit du système capitaliste qui pose la question de la redistribution de la richesse produite mais également, celle de l’utilité réelle des biens produits. Satisfaction des besoins ou société de consommation ? Il est un fait acquis que la course aux profits pousse toujours plus loin vers la deuxième option au détriment de la santé et de l’environnement.

Partant de ce qui précède, le titre du projet d’orientation « au cœur du travail pour bâtir l’avenir », comme celui du premier  chapitre  interpellent fortement :

– peut on changer la société par la seule ambition de changer le travail ? Ou le changement de société, c’est à dire du système qui l’organise, peut il contribuer à changer le travail ?

[…]

L’alinéa 10 du préambule, page 5, résume la voie dans laquelle ce document entraîne la CGT et avec elle, les salariés :  » Transformer le travail, c’est à dire modifier à la fois son contenu, ses conditions et son sens, est une revendication incontournable et ambitieuse. On pénètre par effraction dans ce que le patronat considère comme « sa chasse gardée » sans une telle effraction, il n’y aura pas d’émancipation possible « ..

 

Cet alinéa retient pour tout le reste du document, y compris les chapitres consacrés à l’organisation de la CGT, une troisième définition du travail qui est évoquée à l’alinéa 12 en haut de la page 6, à savoir: sa dimension humaine au sens de la structuration et de l’émancipation de la personne et qui ainsi, participe à la construction du lien social . On voit poindre la théorie qui veut que la contradiction du travail est qu’il est source d’aliénation et en même temps d’émancipation. Que le travail soit la condition ultime de l’émancipation pour tous les travailleurs est une définition qui fera toujours débat. On peut laisser le soin aux philosophes, historiens, ethnologues, sociologues et autres spécialistes d’en débattre et éventuellement de nos éclairer, ce qui rappelons le, n’a jamais été le cas jusqu’à ce jour...

 

Par contre, construire un projet d’orientation de la CGT en ne retenant que cette possible troisième dimension du travail est un réel problème pour être gentil car sinon, on pourrait parler de forfaiture! Pour s’en convaincre, notons que le préambule censé donner le ton du document, n’emploie plus les mots la CGT , c’est à dire: « d’exploitation des travailleurs » mais celui issu d’on ne sait où, de « sur exploitation ». La question qui nous serait donc posée , serait celle du niveau d’exploitation acceptable….? (voir les débats de même nature entre économistes sur le coût du capital ou le surcoût du capital porté par les keynésiens).

 

Avec cette base de réflexion, il suffirait donc de lutter pour adoucir la première des causes de la contradiction du travail (aliénation) afin de laisser plus de place à la seconde (émancipation). Ca ne peut pas être le combat de la CGT ! En effet , cette approche passe par pertes et profits la deuxième définition du travail qui est l’utilisation fondamentale du travail dans le système Capitaliste tel que cité plus haut .

 

Par conséquent, on ne changera pas le travail sans changer le système. Pour ce faire, c’est la lutte qui permettra d’entrer, non pas par effraction mais par la grande porte, sur la propriété des moyens de productions ! C’est elle seule qui permettra une autre répartition des richesses produites, réellement en faveur des travailleurs.« 

 

 

 

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