La CGT interpelle les député-es

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Alors que le débat parlementaire bat son plein sur la loi de finance (PLF), la loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), et la controverse sur le sort de la loi retraites de 2023 (suspendue et non abrogée), la CGT interpelle directement les parlementaires pour préciser ses positions.

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Montreuil, 24/10/2025

A l’attention de Mesdames et Messieurs les parlementaires

 

Secrétariat Général 01 55 82 83 06

sg@cgt.org 

Nos Réf. SB-MO/IM/2025.088

 

Objet : Vote du budget 2026 de l’État et de la Sécurité sociale.

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Vous allez, dans les prochaines semaines, débattre et voter pour ou contre le budget 2026 pour l’État et la sécurité sociale. Le premier ministre s’est engagé à ne pas utiliser de 49-3, vous aurez donc le dernier mot.

La CGT, comme l’immense majorité des travailleurs et des Français vous appelle à modifier en profondeur ce projet gouvernemental d’une rare violence pour les travailleurs, les travailleuses et les retraités.

Une injustice alors que depuis 2017, le monde du travail a subi de nombreuses réformes régressives : les ordonnances travail, quatre réformes de l’assurance chômage, une réforme des retraites… Résultat, les salaires n’ont toujours pas retrouvé leur niveau de 2020 et la pauvreté n’a, d’après l’INSEE, jamais été aussi élevée depuis 1996. Dans le même temps les licenciements repartent à la hausse, notamment dans l’industrie. Les faits sont sans appel : l’augmentation du déficit n’est pas liée à une augmentation des dépenses mais à une baisse des recettes essentiellement liée aux baisses d’impôts mises en place depuis 2017, ce que confirme la Cour des comptes dans un rapport récent.

Ce n’est donc pas aux travailleurs et aux travailleuses de passer à la caisse mais à ceux qui ont profité de cette politique de l’offre dont le bilan est un échec tant sur le plan de la compétitivité industrielle et économique que sur le plan social : les entreprises du CAC40 dont les profits atteignent, encore une fois cette année, un record historique, les actionnaires dont les dividendes explosent et les rentiers alors que notre pays se désindustrialise et notre balance commerciale est structurellement déficitaire.

Le projet de budget a réuni contre lui une mobilisation inédite les 10, 18 septembre et 2 octobre, suivie d’une grève du secteur de la santé et l’action sociale le 9 octobre. Pour éviter une nouvelle censure, le Premier ministre s’est engagé à « suspendre » la réforme des retraites. A ce stade, la suspension n’est en réalité qu’un décalage, d’un an de la réforme (les 64 ans s’appliqueraient à la génération 1970 au lieu de la génération 1968,) et le vote des parlementaires serait sollicité pour confirmer les 64 ans. Ajoutons que ce décalage ne concernerait pas les salariés en carrières longues. Pire, le décalage serait financé en amplifiant les mesures anti-sociales déjà contenues dans le PLFSS et notamment la désindexation des pensions des retraités et la taxation des mutuelles et complémentaires !

Nous vous appelons à ne pas confirmer les 64 ans par votre vote ! La seule façon de suspendre la réforme c’est de bloquer son application à 62 ans 9 mois et 170 trimestres pour l’ensemble des générations, première étape avant son abrogation pure et simple que nous vous appelons à voter au plus vite.

Pour les financer, la CGT a proposé une multitude de dispositions et notamment :

  • La suppression progressive des 80 milliards d’exonérations de cotisations sociales dont 5,5 milliards ne sont pas compensés par l’État et qui constituent des trappes à bas salaires.
  • L’élargissement de l’assiette des cotisations pour y intégrer toutes les primes, l’intéressement, la participation (4,4 Mds).
  • L’égalité des salaires femmes / hommes qui rapportent au minimum 6 Md€ par an pendant 40
  • L’augmentation du forfait social sur les dividendes (alignement sur les cotisations patronales, 10 Md minimum).
  • La lutte contre le travail illégal qui fait perdre de 6 à 8 Md de cotisations

Pour le reste, l’essentiel du projet de budget préparé par le précédent gouvernement demeure. S’il était adopté, il se traduirait par l’appauvrissement de la grande majorité de la population. Il signerait le déclassement de nos services publics et aurait un fort impact récessif sur l’économie.

Nous vous appelons donc à modifier en profondeur le projet de budget notamment sur les points suivants :

  • Le doublement des franchises, participations médicales et frais de santé qui pourraient atteindre 350€ par an et par personne, contre 50€ en 2023 ! Ce sans compter l’explosion des dépassements d’honoraires et du montant des complémentaires santé induit par la taxe de 1 milliard sur les Quoi de plus injuste et de plus éloigné du principe fondateur de notre Sécurité sociale que de taxer les malades ?
  • L’«année blanche», qui serait en fait une année noire : les pensions, l’ensemble des prestations sociales (allocations familiales, logement, adulte handicapé, RSA…), le salaire des agent∙es de la fonction publique ne suivraient pas l’inflation et seraient donc baissés en euros constants. Pour les retraité∙es cette désindexation serait même gravée dans le marbre jusqu’en 2030 ! En cumulé, cela peut représenter des dizaines voire des centaines d’euros de perte par mois pour des familles qui peinent déjà à remplir leur frigo, une catastrophe alors que la pauvreté explose, notamment chez les enfants.
  • Le budget des services publics serait baissé et 3000 postes seraient supprimés. Les conséquences pour le pays seraient majeures : 4600 postes en moins dans l’éducation nationale alors que la ministre de l’Education nationale reconnaissait elle-même qu’il manquait 2500 enseignant∙es dès la rentrée et qu’en moyenne, chaque élève perd déjà près de 5% de son temps d’enseignement du fait des absences non remplacées1. 598 postes supprimés à Bercy, ce alors qu’un renforcement de la lutte contre la fraude fiscale est annoncé, que les rentrées fiscales se dégradent avec un manque à gagner de 70 milliards2 et que la forte baisse des effectifs occasionne une vague de suicide chez les agents (19 suicides et 16 tentatives connues en 2025 aux Finances publiques, taux largement au-dessus de celui de la population), 1098 postes chez des opérateurs d’État au ministère du travail, essentiellement à France Travail, alors qu’aujourd’hui déjà bon nombre de conseiller∙es sont supposé∙es suivre chacun∙e plusieurs centaines d’allocataires ! Le nouveau gel de salaire des fonctionnaires, va encore amplifier le décrochage de leur rémunération alors que depuis 2010, leur pouvoir d’achat a baissé de 18%. La France est désormais un des pays de l’OCDE qui rémunère le plus mal ses fonctionnaires. Résultat : nous peinons à recruter des enseignant∙es, des infirmières, des aides soignant∙es…, les profils les plus qualifiés se tournent vers le privé et nos secteurs de pointe, nos universités et nos organismes de recherche sont toujours plus paupérisés.
  • L’ONDAM ne serait augmenté que de 1,6% alors que la fédération hospitalière de France estime l’augmentation « naturelle » du besoin de financement à 3% et que la CGT chiffre entre 7 et 10% l’augmentation nécessaire pour permettre au secteur de la santé et de l’action sociale de retrouver des marges de manœuvres. Malgré les alertes des professionnel∙les de la santé et les engagements du Président de la République, plus de 20 000 lits ont été fermés depuis le COVID3, le fonctionnement en mode dégradé est devenu quotidien avec des catastrophes sanitaires à la clé. Les professionnel∙les n’en peuvent plus et se détournent du service public à contre cœur, pour ne plus être obligés de maltraiter leurs patient∙es. Alors que grâce à notre Sécurité sociale, nous avions un des meilleurs systèmes de santé au monde, on meurt maintenant dans nos urgences !
  • La baisse du budget des collectivités territoriales se traduit par la chute de l’investissement avec un effet récessif direct, notamment sur le secteur du bâtiment, et des coupes franches dans les secteurs de l’économie sociale et solidaire, la culture et le secteur associatif.
  • Le logement social est plus que jamais en danger alors que 2.8 millions de ménages sont en attente. Alors que les enjeux environnementaux nécessitent des investissements indispensables pour lutter contre les passoires thermiques et les inégalités que le réchauffement climatique exacerbe, le PLF prévoit une réduction du fonds vert de 500 millions et une baisse de crédits de l’Agence nationale de l’habitat de 700 millions.

De nombreuses marges de manœuvre existent pour empêcher ces mesures récessives et débloquer les moyens nécessaires à nos services publics et à la transition environnementale. La CGT comme l’ensemble des organisations syndicales appelle à la justice fiscale et à l’adoption de la taxe Zucman. Les 211 milliards d’aides publiques aux entreprises qui constituent la 1ère dépense de l’État doivent impérativement être remis à plat et conditionnés à des critères économiques, sociaux et environnementaux. Les rapports s’amoncellent4 pour démontrer que leur impact en matière d’investissements, de recherche, de transition écologique et d’emploi est très limité voire nul. Comment accepter une telle gabegie d’argent public quand dans le même temps les services publics sont à l’os et les travailleuses et aux travailleurs sont encore sommés de se sacrifier ? En tout état de cause, la CGT exige la transparence et la mise en place d’un avis conforme des CSE sur les aides publiques pour permettre aux représentant∙es du personnel de contrôler leur utilisation.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, vous avez été élu.e.s lors d’un scrutin très particulier avec une participation record. La CGT comme des millions de travailleuses et de travailleurs ont pris toutes leurs responsabilités pour faire barrage à l’extrême droite et obtenir un changement de politique économique et sociale. Les travailleurs et les travailleuses attendent maintenant des actes forts, pour enfin être reconnu.e.s comme celles et ceux qui créent les richesses, pas comme un « coût ». C’est en luttant contre le déclassement du travail, de nos services publics et de notre industrie que l’on fera reculer l’extrême droite. Au vu de l’exceptionnelle gravité de la crise que traverse notre pays, nous vous demandons une chose : vous placer au service de l’intérêt général, affronter les puissants et les forces de l’argent pour trouver les marges de manœuvres permettant de d’investir pour l’avenir de notre pays.

Le monde du travail a assez payé, il est temps d’ouvrir des perspectives de progrès social et environnemental !

La CGT est disponible pour échanger avec vous sur la situation des salarié.e.s et des retraité.e.s de votre circonscription, pour vous faire part de son analyse du PLF et du PLFSS et de ses propositions, n’hésitez pas à solliciter l’Union Départementale CGT de votre département.

Bien cordialement,

Sophie BINET,

Secrétaire générale de la CGT.

 

1 Rapport de la commission des finances du Sénat du 12 juin 2025.

2 Cour des Comptes.

3 DREES (entre 2019 et 2023).

4 IRES CGT octobre 2022 Un capitalisme sous perfusion : Mesure, théories et effets macroéconomiques des aides publiques aux entreprises françaises – Sénat juillet 2025 Transparence et évaluation des aides publiques aux entreprises – Mission Bozio-Wasmer octobre 2024 Les politiques d’exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire – Rapport CNEPI 2021 Évaluation du Crédit d’impôt recherche – France Stratégie Rapport 2020 Évaluation du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi : synthèse des travaux d’approfondissement.

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