Plusieurs associations et l’Union syndicale Solidaires avaient déposé un recours au Conseil d’Etat contestant la règlementation de l’épandage des pesticides à proximité des maisons. Une nouvelle fois le gouvernement est retoqué. Voici le communiqué de Solidaires.
- Les organisations à l’initiative : Alerte des médecins sur les pesticides, Collectif des victimes des pesticides de l’ouest, Collectif des victimes des pesticides des Hauts de France, Eau et Rivières de Bretagne, France Nature Environnement, Générations Futures, Union syndicale Solidaires, UFC-Que Choisir
Epandage des pesticides à proximité des habitations : le gouvernement obligé de revoir sa copie
Le 26 juillet dernier, à la suite des recours que nous avons déposés avec 7 autres organisations (*) ainsi que ceux déposés par des communes et des producteurs bio, le Conseil d’Etat vient de rendre une décision majeure dans la lutte contre les pesticides : il annule plusieurs dispositions insuffisamment protectrices encadrant leur épandage près des habitations. Il donne 6 mois au gouvernement pour renforcer les mesures existantes.
En cause : l’arrêté du 27 décembre 2019 « relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d’habitation ». Celui-ci avait prévu des distances de protection dérisoires de 5, 10 et 15 mètres. Il laissait en outre à des chartes d’engagements locales la possibilité de les réduire encore. On s’en souvient : le tout s’était traduit par un simulacre de consultation, qui permettait à la profession agricole de fixer elle-même le contenu de ces chartes.
La plus haute juridiction administrative française rejoint ainsi nos positions sur trois points essentiels :
- Des distances d’épandage véritablement protectrices pour les riverains
Il rappelle que « plusieurs études ont mis en évidence (…) une corrélation entre l’exposition à ces produits résultant de la proximité du lieu de résidence avec des zones agricoles et une augmentation du risque de développer certaines maladies ». La toute récente publication[1] de l’INSERM de juin 2021 a en effet mis en lumière le risque accru de maladies (cancer, troubles du développement – ‘Pesticides et effets sur la santé, nouvelles données chez les riverains et notamment chez les femmes enceintes et les jeunes enfants.
- Des mesures renforcées pour les molécules les plus dangereuses
De nombreuses molécules de pesticides sont fortement suspectées d’être cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques (CMR) ou d’être des perturbateurs endocriniens. En rappelant le principe de précaution, le Conseil d’Etat invalide les distances minimales pour les produits suspectés d’être CMR, et demandent donc qu’elles soient revues à la hausse.
- L’information préalable aux épandages
Le Conseil d’État estime que les chartes d’engagements d’utilisation doivent prévoir l’information des résidents et des personnes présentes à proximité des zones d’épandage en amont de l’utilisation des pesticides.
Le Conseil d’Etat annule, par ailleurs, les conditions d’élaboration des chartes et leur approbation par le préfet, « car celles-ci ne pouvaient être définies par un décret, mais uniquement par la loi » conformément à une décision du Conseil constitutionnel rendue en mars 2021.
Nos organisations espèrent que cette décision mettra un coup d’arrêt à l’augmentation de l’usage des pesticides. Alors que la France ambitionne les réduire de 50 % d’ici 2025, leur utilisation a augmenté de 25 % ces dix dernières années. La santé des riverains et des utilisateurs va-t-elle enfin devenir la priorité du gouvernement ?
Paris le 27 juillet 2021.
* Alerte des médecins sur les pesticides, Collectif des victimes des pesticides de l’ouest, Collectif des victimes des pesticides des Hauts de France, Eau et Rivières de Bretagne, France Nature Environnement, Générations Futures, Union syndicale Solidaires, UFC-Que Choisir