La CGT organise son 51ème congrès à Marseille du 18 au 22 avril 2016. Nous ouvrons ici une série de pages sur ce congrès, en commençant par les documents soumis à débat, disponibles ici et sur le site confédéral.
La note CGT préparatoire explique : « Le congrès se prépare d’ores et déjà avec le plan extraordinaire des 2000 visites de syndicats dans l’ensemble du territoire destiné à recueillir la parole des syndiqués« . Mais s’y ajoute une importante consultation des syndiqués, à la fois sur la photographie du corps militant et ses attentes sur le plan revendicatif.
- Lire la consultation des syndiqué-es : consultation_nationale_cgt
Extrait de l’enquête de consultation : […] La CGT propose plusieurs mesures pour sortir de cette spirale du déclin et du chômage. Voici trois propositions phares. Les connaissez-vous ? Qu’en pensez-vous ?
1. Augmentation du SMIC à 1 800 € brut et revalorisation de tous les niveaux de salaires en fonction des qualifications.
Je pense que cette proposition est pertinente : Oui Non
2. Des droits attachés à la personne (formation professionnelle, pénibilité, salaire, déroulement de carrière, protection sociale, …,) transférables et opposables à l’employeur en cas
de changement d’emploi ou de reprise d’activité professionnelle, c’est ce que nous appelons un nouveau statut du travail salarié avec une sécurité sociale professionnelle.
Je pense que cette proposition est pertinente : Oui Non
3. Travailler moins, travailler mieux pour travailler tous avec une réduction du temps de travail à 32 heures sans perte de salaire comme référence hebdomadaire.
Je pense que cette proposition est pertinente : Oui Non
Pour gagner de nouvelles conquêtes sociales, améliorer la situation des salarié-e-s, beaucoup d’entre nous se rendent compte de la nécessité de se mobiliser, d’élever le « rapport de force » comme on dit dans notre jargon. Des mobilisations existent dans les entreprises, dans les administrations et services publics. De nombreux secteurs d’activité sont concernés, mais ces mobilisations paraissent insuffisantes pour obtenir des avancées sociales.
La division syndicale pèse également sur le niveau d’engagement du monde du travail. Pour changer la donne, chacun s’interroge sur la solution la plus efficace et à quel niveau doit-on agir : dans l’entreprise, le service, indépendamment des autres secteurs professionnels ou bien tous ensembles ? […]
Lire le Bilan d’activité :hs2_total
Lire le Document d’orientation : lepeuplehs1
Préambule du document d’orientation (en règle générale, dans les congrès CGT, le préambule est une synthèse très débattue) :
1. Préambule
2. Cent vingt ans après sa création, la CGT, comme les autres organisations syndicales, arrive à un moment où elle doit se poser des questions sur son avenir. Elle doit s’interroger sur le lien avec les salariés.
3. Pour y répondre, cinq thèmes jalonnent le document d’orientation : démarche syndicale, construction des luttes, relation avec les autres organisations, syndicalisme européen et mondial et démocratie dans la CGT.
4. Le plan de visite des syndiqués et des militants dans leur syndicat, au plus proche des lieux de travail, constitue le socle fondateur du document d’orientation. C’est ainsi que 2 000 syndicats ont été rencontrés en amont du congrès, dans le cadre d’une préparation et d’une démarche exceptionnelles.
5. Car le congrès confédéral de la CGT, c’est bien le congrès des syndicats de la CGT. C’est bien à eux de discuter, de définir les orientations à mettre en oeuvre collectivement.
6. Les cinq points du 51e congrès que nous avons souhaité mettre en débat auprès des syndiqués sont en phase avec les préoccupations rencontrées dans les syndicats. Les questions autour de la stratégie des luttes, du syndicalisme rassemblé, de la démocratie interne et de notre conception de la vie syndicale, la place des jeunes, des femmes, des ingénieurs, l’enjeu de la syndicalisation… reviennent de façon récurrente. La question du travail, de la souffrance qu’il engendre, est évoquée systématiquement.
7. À l’instar d’une préparation exceptionnelle, nous avons voulu un document avec une présentation innovante, pour qu’il soit véritablement le document de toutes et tous, et aussi de l’activité à venir. Si le document est examiné à l’extérieur, les syndiqués doivent pouvoir avant tout se l’approprier, car les orientations doivent pouvoir être mises en oeuvre.
8. Sa forme, son volume doivent permettre la lecture du plus grand nombre. Favoriser la lecture ne veut pas dire un manque de contenu, ni d’affirmations fortes sur nos ambitions sociales pour des alternatives aux politiques d’austérité que nous subissons en France et en Europe.
9. Ainsi, ce n’est pas parce qu’elles ne sont pas largement développées que nous manquerions d’ambitions revendicatives. Bien au contraire, nous portons des questions revendicatives puissantes. La CGT a des propositions fortes et innovantes pour l’industrie, son maintien, sa modernisation, son développement, avec par exemple la relocalisation d’activités permettant de répondre à la fois aux besoins fondamentaux de la population en France et également de lutter contre la circulation aberrante des produits d’un bout à l’autre de la planète, avec les conséquences sur l’environnement que l’on connaît. Pour nous, les services publics sont l’élément essentiel du vivre-ensemble solidaire sur lequel est bâti le contrat républicain, à partir de la réponse aux besoins sociaux et de son apport à l’aménagement du territoire, à son développement. Notre conception de l’économie et de son financement postule que celle-ci se mette au service du progrès social et non pas de sa propre financiarisation. Nous développons le principe que c’est le travail, créateur de richesses, qui doit financer la protection sociale. Nous revendiquons les différents droits d’accès à l’éducation, à la formation, à la qualification, à l’information, à la communication, aux transports, aux sports, aux loisirs, à la culture… comme autant de facteurs d’émancipation du salarié, au-delà du monde du travail, en dehors de l’entreprise.
10. Notre campagne « Coût du capital », avec ses thématiques de réduction du temps de travail, d’augmentation des salaires et de reconnaissance des qualifications, montre que nous ne sommes pas en recul dans la bataille des idées, dans la bataille revendicative et que nous sommes force de propositions. La discussion ouverte sur le compte personnel d’activité démontre que les revendications et propositions de la CGT sur le nouveau statut du travail salarié et la sécurité sociale professionnelle, forgées il y a plus de quinze ans, sont d’une modernité sans faille.
11. Ces ambitions revendicatives, nous les affirmons tout au long de notre activité quotidienne, à travers la contestation des choix patronaux et de la politique gouvernementale, les propositions alternatives que nous amenons au débat, nos journées d’action et de mobilisation.
12. Le comité confédéral national des 17 et 18 novembre 2015, en procédant à la validation des repères revendicatifs, a décidé d’une réactualisation continue, permettant ainsi une meilleure articulation et complémentarité entre nos orientations, nos repères revendicatifs. Le tout formant un ensemble cohérent et structurant de notre activité.
13. Un document d’orientation n’efface pas le précédent, sauf à l’écrire. Il prend en compte les transformations mises en oeuvre, comme celles induites par la révolution numérique pour mieux en poser l’importance. En cela aussi, il concourt à alimenter notre ambition revendicative. Le document d’orientation pour le 51e congrès prolonge notre volonté d’ancrer et de structurer notre activité syndicale par le prisme du travail. Notre ambition de transformation sociale, à partir du réel des situations de travail, doit aujourd’hui prendre en compte les évolutions du monde du travail et ses exigences de démocratie, le besoin de solidarité de luttes et des formes d’action à réinventer avec les travailleurs eux-mêmes. Car, plus que jamais, ils ont besoin de faire entendre leurs voix, d’être plus forts ensemble pour gagner des nouveaux droits, le progrès social en France et dans le monde.
14. Avec son projet de nouveau statut de travail salarié, son exigence de démocratie sociale, la CGT porte un projet de transformation de la condition salariale dans le cadre d’un développement humain durable.
15. Le sens du travail change, en même temps que le capitalisme poursuit les mêmes objectifs avec une financiarisation de l’économie dramatique. Si les moeurs ont évolué, l’exploitation de l’homme par l’homme reste tristement d’actualité.
16. À la faveur de la mondialisation, de l’idéologie libérale, on assiste à la déconstruction du salariat. Elle est déjà bien avancée et pose le problème aux syndicats, plus à l’aise avec les travailleurs intégrés. Mais, aujourd’hui, ils doivent gérer les précaires, les jeunes, et même une forme de salariat déguisé, comme les autoentrepreneurs. C’est un véritable éclatement du monde du travail. Prendre en compte l’éclatement du salariat est un défi pour notre CGT aujourd’hui.
17. Dans un contexte propice à la fragmentation sociale, la CGT doit jouer un rôle décisif pour développer la solidarité en faveur du progrès social.
18. Notre projet syndical est bien en place. Cependant, nous pouvons avoir les plus pertinentes des réponses, si nous n’arrivons pas à les faire prendre en compte, quelle en serait donc l’efficacité pour améliorer la situation sociale, économique, environnementale ? Quelle en serait l’utilité pour les salariés ?
19. Une question essentielle et centrale nous est donc posée, celle de l’efficacité du syndicalisme, de la CGT. Avec en corollaire la question de l’accessibilité de l’outil syndical, bien sûr ; autrement dit, une organisation au plus proche des salariés.
Une confédération plus et mieux au service de ses organisations.
20. C’est cet enjeu que nous avons aujourd’hui à relever. C’est bien à partir des syndicats que la discussion doit être menée pour donner vie et poids à nos propositions revendicatives, pour gagner, dans un double mouvement, amélioration du quotidien pour les salariés et transformation sociale. Réaffirmer notre conception d’un syndicalisme de syndiqués, tournée en priorité vers les salariés face à une volonté gouvernementale, patronale, voire, portée par d’autres organisations syndicales, de le professionnaliser reste essentiel.
21. La « sur-institutionnalisation » et la « dépolitisation » peuvent être deux écueils pouvant nuire à l’efficacité de notre syndicalisme. Il ne s’agit pas de délaisser à tous les niveaux les lieux de dialogue et de démocratie sociale, mais de ne pas rompre le lien avec l’activité syndicale, avec les syndiqués et les salariés. Il ne s’agit pas non plus de recréer un lien entre les syndicats et un parti, comme ça a pu exister, mais de remettre le syndicalisme sur les rails d’un projet de société.
Penser la vie de la cité a été une force de la CGT, il faut que ça le devienne à nouveau. C’est en ce sens qu’il convient de renouer avec la culture du débat politique.
22. Les attaques sont sans doute européennes, et même à l’échelle de la planète, ce qui rend plus difficile la tâche des syndicats. Mais l’enjeu est là : contester ces politiques d’austérité et proposer des alternatives, mener le débat, montrer qu’elles sont possibles. Il s’agit également d’inverser les priorités européennes pour que le triple A monétaire et budgétaire de l’Europe soit un triple A d’un modèle social solidaire et protecteur de haut niveau. En jeu, permettre l’écoute des attentes et des revendications des salariés et des peuples, donner une réelle visibilité aux alternatives face à la crise, qu’il s’agisse du temps de travail, des salaires, de la place de l’industrie en Europe, des services publics…
23. Dans le contexte mondial actuel auquel sont soumises les populations, la CGT lutte pour un mieux-disant pour tous, pour le désarmement et un monde en paix pour le progrès social sur l’ensemble de la planète. Pour cela, nous agissons dans un cadre national, mais aussi européen et international.
24. La CGT est l’objet de critiques relayées par une partie de la presse, parce que même si elle est viscéralement attachée au syndicalisme rassemblé, soucieuse de la recherche de l’unité d’action syndicale, elle n’entend pas pour autant se fondre dans un syndicalisme où tout le monde serait dans le même moule. Les résolutions qui suivent ont pour objectifs, pour la CGT, d’être toujours plus incontournable dans le paysage national et syndical ; d’être toujours plus forte car avec des adhérents toujours plus nombreux et mieux formés, informés, pour pouvoir mettre nos propositions au centre des discussions et faire avancer toujours plus loin les revendications à l’aide d’un rapport de forces durable et à la hauteur des enjeux.
26. La CGT a cent vingt ans d’histoire ; cent vingt ans de conquis sociaux, à partir d’une démarche en prise avec les salariés. Une démarche qui vise, à partir des besoins des salariés, à bâtir des propositions, à les revendiquer, à lutter, à établir un rapport de forces avant de négocier. C’est cela un syndicalisme qui conteste, propose, agit et négocie.
27. Quelques repères historiques
28. La CGT est née en 1895 de la volonté du salariat de s’organiser collectivement face au patronat.
29. En 1902, le congrès de Montpellier a promu un syndicat basé sur le fédéralisme : la CGT s’organise à la fois sur « la dimension professionnelle et géographique des salariés ».
30. En 1906, la Charte d’Amiens entérine sa spécificité qui est de lier la lutte quotidienne pour des améliorations immédiates sur les lieux de travail, entreprises et administrations, comme indissociable de notre visée de transformation de la société. C’est cela que nous appelons la double besogne, qui demeure d’actualité. Une démarche syndicale qui ne trie pas les priorités entre « petites » et « grandes » revendications, une démarche syndicale qui vise à s’occuper du « carreau cassé » tout en agissant, en cohérence, pour une transformation sociale.
31. Un syndicalisme qui allie amélioration immédiate et transformation sociale
32. Cet affrontement de classe, le travail contre le capital, est plus que jamais d’actualité, même s’il est dans les médias et la pensée dominante peu évoqué, voire dénié. Il est le marqueur de toutes les lois prises par le gouvernement, à l’écoute du Medef, qui se traduit par un coût du capital de plus en plus lourd et accaparant, dans des proportions de plus en plus grandes, la richesse produite par les salariés. Pour autant, sous la pression idéologique du patronat et des gouvernements qui l’accompagnent, tout est fait pour que la lutte des classes s’estompe.