La tribune ci-dessous de Thomas Vacheron, secrétaire confédéral CGT, est parue dans l’Humanité du 13 décembre 2024. Elle explicite le sens et le lien entre salaire brut « pour la vie » et salaire net « pour le mois« .
Par Thomas Vacheron, secrétaire confédéral CGT.
Publié le 13 décembre 2024
« C’est nous qui produisons. Dans notre action syndicale il nous faut toujours rappeler que seul le travail crée la richesse. En France, 88% des « actifs » (travailleurs·ses) sont des salarié·es. C’est de leur travail qu’est créée cette valeur ajoutée, partagée entre d’un côté les salarié·es qui n’ont que leur force de travail manuelle et intellectuelle pour vivre, et de l’autre ceux qui sont propriétaires des moyens de productions, détenant les capitaux de l’entreprise. C’est sur le salaire que se fait la plus-value, car c’est la variable entre ce qui va au travail ou au capital. Les salaires sont la bataille centrale, puisque les augmenter c’est partager les profits en faveur des travailleur·ses.
C’est nous qui cotisons. Le salaire est composé du net pour le mois et du brut pour la vie. Le net en bas de la fiche de paye pour le quotidien, le brut en première ligne en haut avec les cotisations sociales, pour « demain » et mis dans le pot commun qu’est la Sécurité sociale.
Du fait d’un patronat radicalisé, la France pourtant deuxième économie d’Europe n’a que le sixième SMIC avec la plus faible hausse de l’UE en 10 ans, et une baisse de près de 3% en moyenne des salaires réels en 3 ans (INSEE). Nous sommes donc rivés sur le salaire net, celui versé sur le compte en banque, trop faible pour boucler la fin du mois. Le salaire brut, socialisé, avec les cotisations sociales inclues, peut facilement être attaqué : on ne s’en rend compte que confronté à la maladie, à un accident de travail, au licenciement, aux congés paternité ou maternité et pour nos retraites.
Nombreuses, les offensives sur nos salaires socialisés commencent en distinguant artificiellement un « brut salarial » et « brut patronal » ou cotisations dites salariales et patronales. Changer les mots pour gommer ce qui est à nous : notre salaire issu de notre travail ! Pour diminuer le salaire, patronat et gouvernement attaquent ce qui se voit le moins au quotidien en « allégeant les charges » disent-ils, donc en diminuant nos salaires en les exonérants de cotisations sociales. Ils ont même inventé la CSG et la RDS pour passer de la cotisation vers l’impôt et faire payer aux salarié·es les cadeaux qu’ils font aux entreprises.
C’est nous qui décidons ? Jusqu’en 1983 des élections de la sécurité sociale avaient lieu pour gérer le salaire socialisé. Maintenant, pour être sûrs que les travailleur·ses ne sachent pas lire leur fiche de paye issue du CNR, ils l’ont complexifiée, puis « simplifiée » afin de la rendre encore moins claire… en masquant chaque ligne de cotisation, pour nous enlever nos droits demain.
Sachez qu’il n’y a pas de charges, pas d’allègements, pas de prélèvement : il n’y a que du salaire ! « Le net en euros pour remplir le frigo et le brut avec des cotisations pour augmenter nos pensions ». Contre la privatisation de notre protection sociale, vue comme un juteux marché, développons le syndicalisme pour que le rapport de force soit du côté des salarié·es.«