Comme annoncé, le Premier ministre a envoyé aux organisations syndicales une lettre en vue de cadrer « le programme de travail pour la rénovation du modèle social« . Tout y est : assurance-chômage, santé au travail, hôpitaux, retraites, arrêts de travail, pauvreté, autonomie des personnes âgées.
- Le contenu de la feuille de route :
« Programme de travail pour poursuivre la rénovation de notre modèle social »
« Le Gouvernement a engagé depuis un an la rénovation de notre modèle social. Il l’a fait avec la volonté de soutenir et protéger les personnes et de libérer les énergies de notre pays. Deux réformes législatives pour moderniser notre code du travail, refonder l’apprentissage et la formation professionnelle et élargir l’accès à l’assurance chômage ainsi que deux accords nationaux interprofessionnels ont permis de donner corps à cette volonté.
Notre pays demeure attaché à la nécessité tout à la fois de bâtir les opportunités les plus larges possible de parcours professionnels propices à l’épanouissement des actifs et, dans le même mouvement, de construire des sécurités qui ne soient pas formelles mais concrètes, et efficaces parce qu’adaptées au monde d’aujourd’hui.
Cette seconde étape de notre programme de travail poursuit cette logique de manière dynamique et renouvelée. Elle s’inscrit dans le cadre du nouveau contrat social que le Président de la République a souhaité construire avec les partenaires sociaux le 17 juillet dernier. Elle prend sa place aux côtés et dans le respect du dialogue social autonome que les partenaires sociaux ont entendu promouvoir le II juillet dernier et en reconnait l’apport.
Pour que notre modèle social remplisse son double objet de libération des énergies et de protection des personnes, ce sont sept chantiers qui doivent être menés cette année. Les trois premiers vont conduire à des transformations structurantes dans les mois à venir, avec une méthode spécifique au sein de laquelle la négociation interprofessionnelle a vocation à prendre toute sa place.
1 Bâtir un régime d’assurance chômage qui favorise durablement l’accès et le retour à l’emploi.
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a permis d’élargir aux indépendants et aux salariés démissionnaires l’accès à l’assurance chômage. Elle a posé les bases de la refondation du régime d’assurance chômage afin que celui-ci remplisse mieux ses fonctions consistant à sécuriser financièrement les personnes entre deux emplois, les inciter ainsi que les entreprises à retrouver un emploi de qualité, et le faire de manière soutenable financièrement.
Il s’agit donc de réformer le contenu des règles de l’assurance chômage en agissant sur les leviers les plus efficaces, les plus justes pour contribuer à réduire le chômage, faire en sorte que l’accès à l’emploi durable soit toujours plus intéressant pour tous et réduire substantiellement l’endettement du régime. Il s’agit également de veiller à l’articulation entre assurance et solidarité. Les nouvelles règles devront être applicables d’ici la fin du premier semestre 2019.
La ministre du travail a engagé avec les partenaires sociaux une phase de diagnostic partagé. Celle-ci donne lieu à trois réunions qui s’achèveront vers la mi-septembre.
Dans la semaine du 17 septembre, la ministre du travail engagera une concertation sur le document de cadrage, conformément à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Le document de cadrage précisera les objectifs généraux de la négociation · lutte contre la précarité, incitation au retour à l’emploi, désendettement · et sera envoyé, à l’issue de cette concertation, avant la fin du mois de septembre; la négociation de la convention d’assurance chômage pourra ensuite s’engager et se tenir pendant le délai légal maximal de 4 mois.
- Promouvoir des conditions de travail de qualité.
Le travail doit demeurer un facteur d’émancipation sociale, de réalisation individuelle et non de malaise ou de mal-être. Au service de ces objectifs, la question de la santé au travail et de l’organisation de la prévention des risques professionnels occupe une place essentielle.
Le rapport Lecocq-Dupuis-Forest « Santé au travail, vers un système simplifié pour une prévention renforcée » établit un diagnostic et propose des évolutions ambitieuses pour notre système de prévention des risques professionnels. Il fournit une base satisfaisante pour un dialogue interprofessionnel. Mais plusieurs thèmes connexes peuvent être appréhendés globalement pour obtenir un résultat effectif sur les conditions de travail.
Il en est ainsi des services de santé au travail, de leurs missions et prérogatives et de la place des médecins du travail en leur sein. La promotion de la qualité de vie au travail et des instruments y contribuant mérite aussi certainement de faire partie des thèmes à traiter. Cela peut permettre de réexaminer l’accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 sur le sujet, déjà riche, mais insuffisamment suivi d’effets pour les salariés et les entreprises.
Dans la première quinzaine d’octobre, des réunions de concertation seront conduites par la ministre du travail et la ministre des solidarités et de la santé afin de préparer la transmission durant la deuxième quinzaine d’octobre d’un document d’orientation qui devrait embrasser l’ensemble de ces champs et permettre une négociation interprofessionnelle jusqu’à la fin du premier trimestre 2019 sur tout ou partie de celui-ci, ainsi qu’une concertation. Le dépôt au parlement avant la fin du premier semestre 2019 d’un projet de texte législatif pourra en découler.
- – Transformer le système de prise en charge des arrêts de travail pour garantir sa soutenabilité
Notre système d’arrêt de travail est de plus en plus coûteux. Le montant des indemnités journalières versées en cas d’arrêt maladie augmente deux fois plus vite que l’ONDAM, limitant ainsi les marges de manœuvre pour financer les soins des Français en ville et à l’hôpital. Ces constats conduisent également à s’interroger sur l’organisation d’un système jugé complexe et déresponsabilisant. Il est donc nécessaire d’identifier précisément les causes de cette augmentation et les leviers permettant d’agir.
Une mission d’expertise et d’appui sur ces questions doit permettre de progresser et proposer aux pouvoirs publics et aux partenaires sociaux les évolutions qui s’avèreront nécessaires. La lettre de mission sera établie dès le début du mois de septembre. Cette mission sera conduite par Jean-Luc Bérard, DRH de Safran et Stéphane Seiller, conseiller maître à la Cour des comptes ; elle débutera ses travaux dans les prochains jours et rendra ses conclusions avant la fin de l’année. Elle établira un diagnostic et présentera un premier point d’étape mi-octobre. Le rapport pourra, le cas échéant, alimenter la négociation sur la santé au travail.
- – Construire un système de retraite universel. plus juste et solidaire
C’est une priorité du gouvernement. Ce système de retraite sera universel, car il concernera tous les Français, quels que soient leurs revenus, leur profession, leur situation. Il sera plus juste, avec des règles qui seront les mêmes pour tous : un euro cotisé ouvrira toujours les mêmes droits. Enfin, il sera fondé sur la solidarité, entre les retraités et les actifs (c’est l’essence même d’un système par répartition), entre les plus aisés et les plus modestes, entre les hommes et les femmes, avec une attention particulière envers ceux qui auront eu des emplois pénibles ou qui auront interrompu ou réduit leur activité en raison d’une maternité ou pour s’occuper de leurs enfants ou encore qui auront connu des ruptures professionnelles, plus ou moins longues, parce qu’il y aura eu un épisode de maladie, de chômage ou d’invalidité.
Le Haut-Commissaire à la Réforme des retraites réunira les partenaires sociaux en octobre prochain et présentera les grands principes à la base du futur système tels que dégagés par la première phase de concertation. Une seconde phase de concertation s’engagera ensuite sur les principaux paramètres de ce nouveau système ainsi que les modalités de transition. Le projet de loi sera présenté en 20 I 9.
- – Déployer une stratégie de lutte contre la pauvreté fondée sur la prévention précoce et une meilleure articulation entre délivrance des prestations et accompagnement des personnes les plus vulnérables
Alors que les prestations sociales ont permis de contenir la progression de la pauvreté en dépit de la profonde crise économique et financière de la dernière décennie, le retour de la croissance doit être l’occasion de renforcer l’efficacité des politiques d’accompagnement, notamment vers l’emploi. Notre système de protection sociale doit se réformer pour parvenir à associer modernisation dans la délivrance des prestations et personnalisation de l’accompagnement via un sens nouveau donné au travail social.
La stratégie pauvreté s’appuiera sur une double logique :
celle de l’investissement dans l’enfance et la jeunesse afin de prévenir la reproduction des situations de pauvreté, en agissant le plus tôt possible ;
celle de l’accompagnement vers l’emploi et l’insertion, grâce à un pilotage renouvelé des politiques publiques en la matière.
La stratégie de lutte contre la pauvreté sera présentée mi-septembre et mise en œuvre dès janvier 2019.
6- Réorienter notre système de santé
Notre système de santé est un bien commun qui incarne les principes du service public : accessible, non discriminatoire, financé par la solidarité nationale. Mais il a été organisé pour lutter contre les maladies aigues et infectieuses et répond mal au défi des maladies chroniques et du vieillissement de la population. La qualité des prises en charge, la prévention et le suivi ne sont pas suffisamment au cœur des préoccupations. Les patients se heurtent à des difficultés grandissantes pour accéder aux soins. Les personnels de santé dénoncent la pression du temps, la dégradation des conditions de travail, parfois une forme de mal-être.
Le système doit donc être réorienté et réorganisé pour garantir un accès simple et rapide à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire.
La ministre des solidarités et de la santé a mené une concertation approfondie entre mars et juin 20I 8 autour de cinq chantiers :
inscrire la qualité et la pertinence des soins au cœur des organisations et des pratiques, repenser les modes de rémunération, de financement et de régulation,
accélérer le virage numérique, adapter les formations et les ressources humaines aux enjeux du système de santé, restructurer l’organisation territoriale des soins.
La stratégie de transfonnation du système de santé sera présentée mi-septembre.
7 – Faire face durablement aux enieux liés à la prise en charge des personnes âgées et à la perte d’autonomie
Le vieillissement de la population, avec l’arrivée prochaine aux grands âges de la génération du baby-boom, est un enjeu majeur qui interroge la place des personnes âgées dans notre société, ainsi que les dispositifs de solidarité et d’accompagnement à mettre en place.
Le Président de la République a annoncé sa volonté de mener une réforme permettant une meilleure prise en charge durable du vieillissement. Dans ce cadre, Dominique Libault conduira dans les prochains mois une réflexion et formulera des propositions sur la prise en charge et le financement de la perte d’autonomie ainsi que sur les questions d’organisation et de gouvernance. Il associera l’ensemble des parties prenantes à cette réflexion et remettra ses préconisations à la Ministre des solidarités et de la santé au début de l’année 2019.
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A côté de ce programme de travail, les partenaires sociaux conduisent un dialogue social autonome. Celui-ci pourra bien évidemment être organisé au niveau interprofessionnel et les pouvoirs publics, en fonction des besoins exprimés, examineront avec intérêt les demandes d’appui qui seraient formulées ainsi que les voies et moyens de donner plein effet aux dispositions qui pourraient être négociées.
Plus généralement, le Gouvernement est attentif à ce que le dialogue social soit riche et entend favoriser le fait qu’il soit producteur d’évolutions utiles. En particulier le processus de restructuration des branches professionnelles qui doit aboutir à des branches mieux armées pour assumer leurs nouvelles compétences et rendre aux salariés et entreprises les services attendus, sera poursuivi. La manière de lui donner pleine portée sera examinée avec la ministre du travail.«