Europe et services publics : des propositions

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Le 16 décembre 2023, la Convergence de défense et de développement des services publics réunissait des syndicats (CGT, FSU, Solidaires), des associations nombreuses et des forces politiques (y compris de l’Union européenne), pour un débat sur l’Europe et des propositions. Un document de compte rendu a été élaboré (ci-dessous). Il est prévu une « interpellation » des forces politiques engagées dans les prochaines élections européennes.

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« La Convergence nationale des collectifs de défense et de développement des services publics a organisé le 16 décembre dernier à Paris une rencontre débat consacrée à « l’Europe et les services publics » introduite par son président Michel Jallamion.

Dans le prolongement des rencontres de Lure tenues en mai dernier, elle a réuni plusieurs centaines d’élus, responsables syndicaux, associatifs, politiques et militants qui ont échangés et débattu durant plusieurs heures sur l’état des services publics (santé, énergie, transport, eau, éducation, etc.) dans l’Union européenne (U.E.)

Sans surprise, le constat est sombre. Ces derniers ne répondent pas à leur mission de promotion de l’égalité et de la justice, garantes de la cohésion sociale.

Leur dégradation, qui frappe de plein fouet les plus pauvres et les plus vulnérables, s’est particulièrement aggravée dans la dernière décennie, à l’opposé des aspirations des usagers. Mais ces derniers manquent d’outils pour relayer leurs revendications et faire entendre leur voix. Il revient, plus que jamais, aux organisations comme la Convergence de les associer aux mobilisations à construire.

Dans cette perspective, un certain nombre de propositions et de lignes d’action ont été mises en lumière lors des tables rondes et des débats de la matinée et de l’après-midi à la Bourse du Travail en vue de promouvoir, à l’échelle de la France et de l’U.E., des politiques d’intérêt général et de défense du bien commun (y compris climatique et environnemental). Autant de pistes pour des actions communes et des initiatives dans nos territoires qu’il paraît nécessaire à la Convergence et aux structures qui la constituent et l’accompagnent d’organiser et d’encourager, à la veille des échéances électorales européennes de 2024.

 

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1- Le détricotage des services publics par l’U.E. a atteint un seuil critique

 

L’U.E., c’est-à-dire le Marché Commun, avec comme moteur la libre concurrence, s’est bâtie dès l’origine contre les obligations et les notions de Service Public avec notamment, comme l’a rappelé au début des échanges Simon Arambourou (de l’association « Nos services publics ») :

  • des interventions très directes des autorités européennes dans les activités de réseaux (transports, énergie, télécoms, poste…), via des directives et des règlements, pour imposer la séparation du service (ouvert à l’activité marchande et au lucre) et de l’infrastructure (support pour plusieurs opérateurs concurrentiels, souvent structurellement déficitaires, abandonnés au secteur public), avec à la clef des résultats néfastes pour les usagers (qualité de service et prix), les salariés (conditions de travail, statut) et les opérateurs publics historiques – cas par exemple des anciennes directions départementales de l’équipement (D.D.E.) ou l’AFPA[1] en France ;
  • l’imposition de critères d’austérité budgétaire qui frappent prioritairement les politiques sociales – voir les redoutables « Recommandations pays » annuelles de la Commission qui mettent les finances des États membres sous tutelle – et encouragent les collectivités à multiplier les partenariats publics-privé (P.P.P.) et privatiser leurs services publics. Cette menace est plus que jamais d’actualité avec la remise en vigueur (après sa suspension pour cause de COVID), au 1er janvier 2024, du Pacte de stabilité et de croissance (P.S.C.)[2] acceptée au moins tacitement par la quasi-totalité des chefs d’État et de gouvernements européens – à l’exception notable et paradoxale semble-t-il de la présidente du conseil italien Giorgia Meloni. Celui-ci, appliqué sans changement, conduira à des coupes supplémentaires dans les budgets de l’éducation nationale, des services de santé et de protection sociale, des collectivités locales, des rémunérations (dont retraites) publiques, etc. ainsi, bien sûr, que dans les investissements, y compris en faveur du développement durable – afin notamment de « couvrir » l’augmentation des dépenses publiques lors de la crise COVID dont une large part a été consacrée à soutenir les entreprises privées.

Les effets de ces coups de boutoir libéraux ont été dévastateurs pour la qualité et la disponibilité des services publics à l’échelle des États membres, ce d’autant plus que les gouvernements ont souvent été au-devant et au-delà de ses contraintes imposées par les traités aux services d’intérêt général.

La France n’échappe pas à ce double constat et de nombreuses voix se sont élevées le 16 décembre pour dénoncer la situation scandaleuse :

  • des transports publics (avec un débat parallèle sur les enjeux de la gratuité) ;
  • la collecte des déchets – dont la moitié à Paris par exemple relève du secteur privé;
  • la santé et notamment le secteur hospitalier, dont l’AP-HP[3] qui, comme les transports et les déchets, va être mise considérablement sous pression à l’été 2024 avec l’accueil des Jeux olympiques. Comme l’a souligné Michèle Leflon (présidente de la Coordination des collectifs de défense des hôpitaux et maternités de proximité), le temps est loin (début des années 2000) où la France comptait parmi les premières nations en termes de qualité des soins. Notre système, y compris la Sécurité Sociale, est pris en otage par l’austérité et la libéralisation imposées par Bruxelles et démuni voire dépouillé par une série d’acteurs :
    • les grandes firmes pharmaceutiques
    • l’U.E., devenue une grande centrale d’achat préservant [grâce au poids des lobbys] l’intérêt des laboratoires » selon Yves Hellendorf (Réseau européen santé)
    • les banques (cf. le lourd endettement hospitalier), les assurances complémentaires, etc.

Ramon Vila (Secrétaire de Sud Santé-Sociaux) a pointé dans la foulée les enjeux associés à la préservation des statuts des individus agents, la dégradation constante des conditions de travail – par exemple des aides à domicile – et la nécessité de lutter contre l’Uberisation en marche, à l’origine également des difficultés de recrutement.

Nous nous dirigeons lentement vers un système régressif à l’américaine : un simple « filet de sécurité » (et encore) pour les plus pauvres, le reste abandonné au privé et accessible uniquement aux plus riches.

Au-delà, la députée Chantal Jourdan (P.S.[4]) a plaidé pour une approche la plus large possible, car ce ne sont pas seulement les activités strictement médicales qui sont menacées : pour poser les conditions d’une santé durable, il faut protéger l’ensemble de l’écosystème public, y compris les activités et institutions relatives à la qualité environnementale, la prévention psychique, etc.

  • les bureaux de poste, où, souligne Benoît Martin (secrétaire général de l’UD CGT Paris), les grèves se multiplient face à un élargissement non correctement concerté et organisé des missions (ex : accueil des personnes demandeuses d’asile) sans allocation des moyens humains et financiers nécessaires à leur bon accomplissement.

Également, souligné par B. Martin :

  • la dégradation générale des conditions d’accueil dans les principaux services publics, due en particulier à la disparition de nombreux accueils physiques. Les Maisons de Service Public ne paraissent pas représenter une alternative suffisante, avec des agents « polyvalents » qui en réalité/en général sont insuffisamment formées, ouvrant la voie au recours à des prestataires privés.
  • Cette disparition de l’accueil physique ne tient pas suffisamment compte de l’analphabétisme numérique – à titre d’illustration, Didier Le Reste (président de la Convergence Nationale Rail) a rappelé que son mouvement avait déposé l’an dernier deux recours au tribunal administratif contre la S.N.C.F. et la suppression des guichets physiques.

Constat relayé par la députée Danièle Obono (L.F.I.[5]) : les outils numériques sont instrumentalisés pour justifier des restrictions de présentiel et au détriment des personnes usagères comme agentes (créant notamment des surcharges de travail). La représentante a rappelé que LFI avait fait voter le 30 novembre dernier à l’Assemblée nationale une proposition de loi « tendant à la réouverture des accueils physiques dans les services publics[6] », texte dont elle était rapporteure, qu’il restait à faire adopter par le Sénat, en mobilisant notamment les maires.

  • la réduction des subventions et le sous-financement, pour cause d’austérité bruxelloise, pour les associations liées à la politique de la ville – facteur possible d’explication des récentes émeutes ;
  • aussi la situation particulièrement pénible et précaire des travailleurs sans papier –  cf. la grève récente de 650 d’entre eux dans le domaine du bâtiment – sujet d’actualité s’il en est.

D’autres secteurs ont été mis en avant au cours des débats, notamment :

  • le secteur de la petite enfance, qu’en 2010 les autorités françaises ont refusé d’exclure – elles en avaient pourtant la possibilité –du champ de la directive européenne sur les services, ouvrant la porte à la marchandisation et la dégradation du service ;
  • le risque « perte d’autonomie », pour lequel les moyens mobilisés sont actuellement insuffisants et qui justifierait (Marylène Cahouet [« groupe des 9 » regroupant les syndicats et des associations de retraités]) la création d’un Service Public national ;
  • le « travail social » laïc – cf. le récent Livre Blanc du Travail social qui alerte sur la situation d’état d’urgence qui touche le secteur ;
  • la défense de « Pôle Emploi » ;
  • le domaine de l’éducation, avec au-delà des problématiques inégalitaires liées à la persistance d’un secteur privé/payant, des enjeux en termes de formation professionnelle ;

et bien sûr, last but not least, les secteurs (« depuis longtemps dans l’œil du cyclone », Isabelle Mathurin [La Convergence]) de l’énergie et du transport, qui ont donné lieu à une table-ronde dédiée au cours de l’après-midi à l’occasion de laquelle :

  • Daniel Donnes (CGT Cheminots) a dénoncé, au-delà de la disparition des lignes et les suppressions massives d’emploi dans le secteur ferroviaire, la fin programmée par le gouvernement du fret[7], mode de transport écologiquement vertueux, dont la part absolue et relative dans le transport de marchandises ne cesse pourtant de diminuer, sous la pression du lobby routier et de la Commission européenne (qui a ouvert début 2023 une « enquête » pouvant déboucher de facto sur la faillite de Fret SNCF). La conseillère régionale Muriel Ternant (C.F.) a insisté en particulier sur les fermetures de ligne de T.E.R.[8] mais aussi les augmentations du prix des billets, contre lesquelles les individus usagers sont particulièrement remontés.
  • Julien Lambert (CGT) a pointé la détérioration du service dans le domaine de l’énergie en général et de l’électricité et du gaz en particulier, avec une explosion des prix qui pèse sur tous les usagers, y compris les collectivités locales et partant les autres services publics, et une détérioration des conditions statutaires.
  • Yohan Thibaut (CGT ENGIE) a rappelé qu’il était le salarié d’un groupe désormais privé, dont les bénéfices sont aux trois-quarts captés par des actionnaires – réduisant d’autant les capacités d’investissement –, dépecé (encore il y a deux ans au profit du groupe Bouygues), aux effectifs divisés par deux et à la stratégie incompréhensible, y compris en termes de mix énergétique – gaz et biogaz, hydrogène, énergies renouvelables, etc.
  • La députée Ch. Jourdan a alerté dans la foulée sur les dangers liés à l’absence de discussion démocratique sur les choix énergétiques (et climatiques) qui engagent notre pays pour les années à venir.
  • Valérie Goncalves (association « Droit à l’énergie Sos Futur »), dans le même sens, a rappelé que 12 millions d’individus en France étaient en situation de précarité énergétique (120 millions à l’échelle de l’U.E.), alors que l’énergie devrait être un droit fondamental ; les tarifs réglementés ont été supprimés le 1erjuillet dernier pour le gaz et ceux qui subsistent (en sursis, leur disparition à l’horizon 2025 est potentiellement programmée) pour l’alimentation électrique des ménages, sont adossés pour un tiers aux conditions de marché (e. à la spéculation) et donc incapables de freiner l’explosion des prix – cf. leur augmentation de 10% au 1er août dernier ! Au-delà, la représentante de l’organisation non gouvernementale a pointé les enjeux de formation des personnels, en particulier dans le domaine du nucléaire.

Ont également été dénoncés :

  • le soutien indu, via de nombreux biais, de la puissance publique française à des intérêts privés : financement de crèches privées par la Sécurité Sociale, récente intervention de la Caisse des dépôts et consignations en faveur du groupe ORPEA (gestionnaire d’Ehpad ayant déjà largement profité de la manne publique), centaines de millions voire milliards d’euros d’exonération de cotisations sociales alloués chaque année aux entreprises, etc.
  • la dégradation des conditions de travail des personnels, y compris du fait de la diffusion du néo-management à l’américaine ;
  • la déshérence des enjeux d’aménagement du territoire.

Cette « peste libérale » s’est répandue sur l’ensemble du continent européen, comme en témoignent :

  • La tragédie grecque de 2012, rappelée par Pablo Sanchez de l’EPSU[9] (Fédération syndicale européenne des services publics de la C.E.S.[10]), avec une crise et des interventions européennes qui ont détruit et l’économie et la société du pays ;
  • le délabrement du Service Public outre-Rhin, pointé par Martin Günther (membre du conseil fédéral du parti Die Linke) – « en Allemagne, les gens sont fâchés » –- : des mois d’attente souvent pour obtenir un rendez-vous dans une administration, 14 000 postes d’individus enseignants manquant (10 000 de plus très bientôt si rien n’est fait), 100 000 individus éducateurs, 200 000 soignants, 35 000 agents en gériatrie, des milliers d’opérateurs de trains et de transports de proximité (avec un impact immédiat sur la qualité de service), etc.

Même exaspération en Espagne, confirmée à la tribune par Ismaël Gonzalez d’Isquierda (du parti espagnol P.C.E.[11]), rappelant les mouvements sociaux récents en faveurs de la petite enfance ou des maisons de retraite dans son pays.

Ces pratiques libérales d’origine bruxelloise :

  • sont absurdes : comme l’a rappelé Frédéric Boccara (G.E.[12]), lutter contre les services publics au sein de l’U.E., c’est aussi lutter contre l’efficacité économique. Propos confirmés par I. Gonzalez d’Isquierda : le gouvernement « de gauche » en place à Madrid, qui a augmenté radicalement les salaires dans sa fonction publique et accru l’offre de Service Public, anticipe un taux de croissance supérieur à 2% en 2023.
  • … mais ne sont pas prêtes de changer si l’on n’agit pas. Comme l’a souligné Patrick Hallinger (Convergence services publics), on retrouve nombre de haut(e)s-fonctionnaires de l’U.E., ou au plan national, travaillant alternativement pour les entités régulatrices et les grandes firmes et sont partant non seulement peu enclin(e)s à brider les appétits de ces dernières et de leurs actionnaires mais agissent concrètement pour faire prévaloir leurs intérêts au détriment de l’intérêt général.

Au total, elles induisent un risque d’explosion sociale, généralisée et brutale, comme l’a souligné la première table ronde, consacrée à l’analyse de l’existant, animée par Claire Bornais (FSU). Alors qu’investir dans les services publics, dans la fonction publique, c’est « revendiquer des éléments faisant société » (Jacques Brillet (FGR-FP).

 

2- Des marges de manœuvres existent

 

Face à cela, a rappelé Simon Arambourou, les autorités nationales et locales, si elles le souhaitent ; ont des marges de manœuvre : elles peuvent freiner ou endiguer la privatisation des services publics, par exemple pour atteindre le « 100% Sécu [Sécurité sociale] » (et battre en brèche les complémentaires santé), municipaliser les transports urbains ou la gestion des déchets, mettre l’accent sur l’éducation publique.

La « re-publicisation » de certains services est d’ailleurs déjà une réalité, en particulier dans le domaine de l’eau, avec notamment la (re)création de régies : Bordeaux, Lyon, Paris (depuis 2010) et la région parisienne (Ivry, etc.), inter allia, se sont engagées dans cette voie. « En vingt ans, nous sommes passés de 25 à 50% d’usagers desservis par le Service Public », s’est félicité Jean-Claude Oliva (Eau Bien commun). Il est vrai que le secteur, relativement épargné par les textes de libéralisation européens, se prête particulièrement à ces pratiques vertueuses ; et les individus citoyens ont plus de facilité pour faire pression sur les personnes élues locales, qui ont en charge de la gestion de l’eau et de l’assainissement. Quelques bémols : ces approches peuvent entrer en contradiction avec d’autres stratégies (ou absences de stratégie) agricoles et environnementales venues de l’U.E. – comme récemment avec la non-interdictions du glyphosate. Elles peuvent également rendre nécessaires, en cas de rupture contractuelle (notamment de délégation), un dédommagement à verser au prestataire privé, y compris le cas échéant sur la base des bénéfices qu’il aurait perçus.

Autre facteur d’optimisme : la multiplication des prises de positions contre le libéralisme sauvage et ses atteintes au bien-être des populations :

  • la volonté de porter campagne en faveur des services publics, de définir leur périmètre d’intervention en Europe tout au long de la période qui précède les élections européennes (Benoît Teste [secrétaire général de la FSU]) ;
  • la mise en place, rappelée par M. Jallamion, dans les années 2000 à travers l’U.E. de collectivités « hors A.G.C.S.[13] », dont la région Île-de-France à l’époque et Paris, réunies en réseau pour combattre la directive « Bolkenstein » de libéralisation des services, qui a permis [en période de référendum sur le traité établissant une Constitution pour l’Europe (T.C.E.)] de limiter les dégâts ;
  • plus récemment, la manifestation à Bruxelles contre l’austérité (12 décembre dernier, celle à Paris « Stop à la libéralisation ! » des cheminots de l’U.E. (à l’appel de la Fédération européenne des Transports[14], 13 novembre dernier), etc.

d’autres actions sont évidemment en cours.

  • Hellendorf pointe ainsi la campagne de sensibilisation EPSU/P.H.M.[15], avec notamment des initiatives de janvier à avril 2024 poussant les individus candidats aux élections européennes à s’engager pour une autre Europe de la Santé (elle culmineront avec une grande manifestation bruxelloise le 7 avril 2024 et un colloque le lendemain) et l’identification de propositions et de voies de mobilisation (« La santé avant le marché… Changeons l’Europe ! ») synthétisées dans sept fiches de travail présentées dans le cadre de la Journée (cf. annexe au présent document) ;
  • la France n’est pas en reste, avec les nombreux événements organisés autour de la Convergence dans le prolongement des rencontres de Lure du printemps, le « Tour de France pour la Santé[16] », des pétitions (« Des milliards pour l’hôpital[17]», contre la réforme des retraites, contre le PFLSS, etc… ;
  • … et, bien sûr, les multiples actions locales pour la défense des services publics – celle, efficace, des personnes usagères du transport ferroviaire en Bourgogne-Franche-Comté a notamment été évoquée.

En complément, il est important de saisir toutes les opportunité et de prendre les institutions européennes à leur propre jeu, en mobilisant l’ensemble des outils idéologiques et juridiques disponibles (Jean-Claude Boual [Convergence]).

Un nouvel élan indispensable pour les services publics en France et en Europe : c‘est le message lancé en conclusion de la journée.

Merci à tous les participants, cette rencontre sur l’Europe et les services publics a constitué une gageure tant les questions européennes apparaissent éloignées des préoccupations de la population. Pour beaucoup de nos concitoyens, l’Europe a été l’outil de destruction des services publics. Le même constat vaut cependant également pour le niveau national, pour ce qui relève de ses compétences.

 

3- Nos objectifs et actions à venir

 

L’objectif de la journée n’était pas de conclure par un « appel » mais de :

  • lancer la discussion entre nous et
  • donner une impulsion aux initiatives, dans les territoires, visant à défendre et promouvoir des Services Publics égalitaires et humanistes à l’échelle nationale, européenne et mondiale.

Dans son prolongement, des actions de sensibilisation et de défense pourraient notamment être organisées conjointement dans les domaines :

  • du transport des marchandises sur rail,
  • de l’énergie (notamment pour imposer le retour du tarif réglementé [pour les collectivités et autres]),
  • du statut (rémunération, carrière, etc.) des personnes agentes de la fonction publique, qui, au quotidien, font face à la négation de la spécificité des Services Publics par la doxa libérale ;
  • et tous autres sujets (financement du logement, etc.) jugés d’intérêt commun par les membres de la Convergence.

Dans cette perspective, nous, Convergence services publics, avec la Coordination des hôpitaux, la Convergence rail et Eau-Île-de France, nous mobiliserons pour un cadre de dialogue, dès-avant les prochaines élections européennes.

Pistes de proposition pour une mobilisation citoyenne de défense et promotion des Services Publics au sein de l’U.E.

 

1 Prendre l’argent là où il est pour financer massivement les services publics (hôpital, etc.).

  • Par exemple en :
    • – faisant le ménage dans les niches fiscales et sociales dont profitent les entreprises
    • – taxant les patrimoines des plus riches (impôt(s) européen(s))  ;
    • – luttant contre l’évasion fiscale.
  • A l’échelle U.E.,: proposer des outils innovants, y compris au sein de la «forteresse C.E.
    • qui modifient ses règles d’intervention ;
    • par exemple en créant un « Fonds européen pour les S.P. » financé à 0% par cette dernière
    • pour encourager le fret ferroviaire, etc.

2 Mettre l’accent sur la défense des conditions de travail des agents, notamment :

  • Augmenter les salaires ;
  • recruter suffisamment
  • former

3 Jouer sur tous les échelons :

3.1 Échelon local (le « maillon faible »)

  • promouvoir les régies de proximité– voire l’autogestion
  • encourager les collectifs d’individus citoyens-usagers
    • sur les sujets les plus populaires : santé, préservation des S.P. de proximité dont l’eau (cf. la centaine de milliers de signatures européennes recueillies avec succès dans le cadre de la fameuse Initiative Citoyenne Européenne (I.C.E.) « l’eau, un droit humain »), transports locaux notamment ; et au-delà
  • proposer davantage de concertation publique institutionnalisée réunissant acteurs publics, personnes usagères-citoyennes et individus agents

3.2 L’échelon national

En exigeant de manière coordonnée

  • le recours systématique aux dérogations à la marchandisation déjà autorisée par les traités U.E. (lien aussi avec 3.3.1.)
  • le retour dans la sphère publique des S.P. nationaux :
    • l’énergie, gage d’investissement planifié (en lien le cas échéant avec une Agence européenne dédiée) et de maîtrise des tarifs ;
    • l’eau ;
    • l’éducation nationale

Etc.

  • La mise en place
    • du « 100% Sécu » – avec, bien sûr, prise en charge à 100% des dépenses de santé
    • d’un « Pôle public du médicament »
    • d’un « Service Public de l’autonomie »
    • d’un « Pôle de recherche publique » (et si possible européen)

Gages de

  • planifications stratégiques effectives ;
  • défense des publics les plus vulnérables
    • (idée : création d’une Journée [mondiale] d’accès à l’énergie pour tout le monde
    • Poursuivre les actions engagées (« Tour de France pour la santé » en vue du PLFSS 2025 ?)
      • Abandonner des pratiques de management et de gestion néo-libérales, contre-productives
      • Imposer des pratiques vertueuses/d’intérêt général (ex : usage obligatoire du fret ferroviaire, etc.)

3.3. L’échelon européen :

  • promouvoir une idéologie pro-S.P. – idéologie favorable tant au bien-être global qu’à l’efficacité ou l’efficience économique – qui batte enfin en brèche l’idéologie libérale mensongère anglo-saxonne
  • la faire « infuser » pour imposer nos concepts aux institutions européennes et «instrumentaliser » le droit de l’U.E.
    • dans les textes et les pratiques, par exemple :
      • reconnaissance de l’utilité publique du trafic ferroviaire et coopération européenne des opérateurs publics ;
      • inscription du « droit à la santé » dans la Charte des Droits fondamentaux de l’U.E,
    • dans la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européenne [C.J.C.E]
  • lutter contre les lobbys et la corruption qui gangrènent les institutions de l’U.E. ;
  • lutter :
    • contre l’austérité et le P.S.C.
    • contre les textes de libéralisation (directives, paquets, etc.)
    • contre les enquêtes de la Commission visant à imposer une concurrence fictive (ex : fret)
    • pour la défense/promotion de tarifs réglementés du secteur de l’énergie déconnectés de la bulle spéculative
      • en n’hésitant pas à mobiliser les collectivités territoriales
      • et si nécessaire, à l’échelle de la France, en se retirant du dispositif européen ;
    • pour la péréquation des tarifs sur l’ensemble du territoire (énergie, transport)

– mettre en place des mécanismes de sanctions pour les pays qui excluent des groupes vulnérabilisés de la protection sociale

4- A cet effet : encourager systématiquement la convergence des luttes au sein des différents États membres et inverser les « rapport de force au sein de l’U.E. »« 

A N N E X E S

 

Fiche 1 : PROTECTION UNIVERSELLE

 

Les besoins de la population en matière de protection sociale doivent être définis comme priorité dans les contrôles budgétaires des États membres.

Les budgets des États membres doivent permettre de répondre aux enjeux sanitaires d’aujourd’hui et de demain (vieillissement de la population, paupérisation, maladies chroniques, mentales et professionnelles, etc.).

Concrètement des choix politiques alternatifs sont possibles :• Mettre à l’agenda la solidarité européenne qui se traduit par l’harmonisation fiscale et sociale ainsi que la lutte contre l’évasion fiscale.

Cela permettra à chaque État de financer les politiques publiques. Nous avons besoin d’une économie qui réponde aux besoins de la majorité plutôt que de soutenir les profits d’une minorité Instaurer des systèmes fiscaux progressifs à l’échelle européenne.

Il s’agit notamment de

  • la mise en place d’une harmonisation de l’impôt sur les sociétés dans tous les États membres et de l’ instauration de tarifs minimaux
  • la prise de mesures coordonnées contre la prolifération les régimes de taxation de la propriété intellectuelle ( « patent boxes ») . En effet, il n’est pas prouvé que de tels avantages fiscaux pour les grands sociétés pharmaceutiques encouragent l’innovation. Au contraire, ils encouragent la concurrence fiscale entre les États membres.
  • Imposer au niveau européen des normes sanitaires, de personnel et de protection sociale correspondant aux besoins
  • Harmoniser au niveau européen les salaires et les conditions de travail afin de permettre une réelle liberté de circulation des professionnels.

Fiche 2 : NON à la MARCHANDISATION

 

  • Revoir les directives relatives aux services et marchés publics en appliquant des règles strictes sur la qualité et accessibilité toute en excluant les opérateurs commerciaux pour tous les secteurs essentiels pour la santé et le bien-être (Source : statistiques de 2022 de l’OCDE sur la santé, publiée en 2023)
    Exiger des clauses sociales, conditions de travail et environnementales dans les accords de libre-échange qui respectent les déterminants sociaux de la santé
  • Préserver la protection sociale des appétits des assurances privées à but lucratif. Les systèmes de santé doivent être financés exclusivement par une protection sociale publique
  • Permettre aux opérateurs publics de maintenir dans la sphère non marchande l’ensemble des services logistiques, ainsi que les produits, services et matériels essentiels à des services de santé de qualité (médicaments, recherche, matériel médical, prothèses, etc).

 

Fiche 3 : ACCESSIBILITÉ

 

  • L’Union Européenne doit exiger des États membres d’assurer un financement suffisant pour les services de santé publics et non marchands, garantissant un système de protection sociale solidaire et universel offrant des services accessibles, de qualité.
  • L’Union Européenne doit viser une réduction des inégalités sociales, notamment en matière de santé
  • Mettre en place des mécanismes de sanctions pour les pays qui excluent des groupes vulnérabilisés de la protection sociale et ne respectent pas le principe de non- discrimination pour un accès des soins de qualité
  • Activer des fonds européens pour la promotion d’une santé publique de proximité et non
    commerciale

Fiche 4 : DÉMOCRATIE SANITAIRE

 

  • Considérer la démocratie sanitaire comme un déterminant de la santé
  • Garantir une collaboration horizontale entre acteurs de la santé
  • Considérer les patients comme des partenaires
  • Renforcement la reconnaissance des associations de patients.
  • La participation des patients devrait s’étendre

➢ aux relations avec les prestataires de soins,

➢ aux institutions de soins

➢ aux niveaux politiques, évitant ainsi l’influence des lobbies.

Fiche 5 : ENVIRONNEMENT GLOBAL

 

Il est urgent de reconnaître les interconnexions entre la protection de l’environnement, le système économique et la justice sociale dans nos sociétés.

L’UE a un rôle central à jouer dans l’amélioration de la santé en attaquant les causes profondes telles que les déterminants sociaux, environnementaux, écologiques et de genre de la santé.

  • Les États membres et l’Europe doivent mettre en place une approche intersectorielle des politiques en évaluant les conséquences de chaque décision dans tous les secteurs sur la santé, conformément aux recommandations de l’OMS « health in all policies ».
  • Nous devons réaffirmer notre opposition à la financiarisation et la marchandisation de la santé. L’être humain n’est pas une marchandise.

Fiche 6 : MÉDICAMENTS

 

Les médicaments essentiels doivent être « accessibles, disponibles, économiquement abordables, de bonne qualité et bien utilisés », afin de répondre aux besoins de milliards d’humains en Europe et ailleurs dans le monde.

  • Dans le cas où une ressource de génériques est disponible, nous devons en donner la priorité par le biais des marchés publics. Lorsqu’un médicament est vendu à un prix anormalement élevé, la production de copies de médicaments avant l’expiration du brevet devrait être rendue possible par l e biais des licences obligatoires. En conséquence le recours aux licences obligatoires devrait être facilité. Lors d’une crise sanitaire telle que la pandémie COVID, la levée des brevets sur l’ensemble des thérapeutiques doit s’imposer.
  • Les institutions européennes, comme l’EMA et la commission européenne, doivent soutenir le développement des nouveaux modèles de recherche et développement, de production et de distribution de produits de qualité, tels que les principes fondés sur la « science ouverte » et des licences socialement responsables, en fonction des besoins médicaux et sociétaux. Les coopérations internationales doivent être encouragées et les financements publics fournis à la hauteur nécessaire, sans en laisser le bénéfice aux investisseurs privés.
  • Il est nécessaire de mettre en place une meilleure collaboration entre les États membres et les institutions européennes pour évaluer la valeur d’un nouveau médicament, le coût de son développement et accéder à toutes les informations utiles.
  • Il faut mieux déterminer le caractère innovant et le besoin sociétal et thérapeutique par rapport aux alternatives déjà disponibles sur le marché des médicaments (médicaments génériques et bio‑similaires par exemple)

Fiche 7 : PERSONNELS

 

  • Les budgets des États membres doivent permettre de répondre aux enjeux sanitaires d’aujourd’hui et de demain (vieillissement de la population, paupérisation, maladies chroniques, mentales et professionnelles, etc.), sans accroître la pression au travail des personnels de santé.
  • Des mécanismes de solidarité doivent produire un soutien plus important pour les pays moins riches, leur permettant d’assurer à leur personnel de santé des conditions de travail et salariales comparables aux pays plus riches.
  • L’Europe doit imposer des normes de personnel garantissant la qualité de la prise en charge avec des conditions de travail correctes.
  • Il s’agit d’harmoniser au niveau européen les salaires et les conditions de travail afin de permettre une réelle liberté de circulation des professionnels.
  • L’Europe dot restreinte la liberté d’installation si celle-ci a pour conséquence de mettre en péril les systèmes de santé dans les pays plus fragiles.

• L’Europe doit interdire l’intervention de firmes privées à but lucratif dans la « traite des blouses blanches », que ce soit dans les pays de départ ou les pays d’arrivée.

[1] Association pour la Formation Professionnelle des Adultes

[2] et notamment ses objectifs de 3% de déficit public et de 60% pour le ratio de dette publique sur le PIB, non modifiés à ce stade.

[3] Assistance publique – Hôpitaux de Paris

[4] Parti Socialiste

[5] La France Insoumise

[6] https://www.vie-publique.fr/loi/292097-services-publics-reouverture-des-accueils-physiques-proposition-de-loi

[7] https://www.cheminotcgt.fr/dossiers/transport-de-marchandises/ensemble-pour-la-continuite-de-fret-sncf/

[8] Transport Express Régional

[9] European Public Service Union

[10] Confédération Européenne des Syndicats

[11]Parti Communiste Espagnol

[12]Parti de la Gauche Européenne.

[13] Accord Général sur le Commerce des Services

[14] European Transport Workers Federation,  qui coordonne les syndicats de transports européens

[15] People’s Health Movement

[16] https://coordination-defense-sante.org/wp-content/uploads/2023/08/2023-06-22-Tour-de-France-pour-la-Sante.pdf

[17]https://www.change.org/p/emmanuel-macron-des-milliards-pour-l-h%C3%B4pital-pas-pour-le-capital-covid-19-france-et-hopitalpascapital

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