Un conseiller prud’homme CFDT, devenu conseiller régional Front national, contestait en justice son exclusion du Synafor-CFDT. Le TGI de Paris donne raison au syndicat : son exclusion n’était pas discriminatoire mais justifiée par l’expression publique de valeurs en contradiction avec celles du syndicat.
Cet article est tiré du site actuel-CE : www.actuel-ce.fr
Un syndicat peut exclure un adhérent qui affiche des valeurs contradictoires avec les siennes 30/11/2017
Adhérent depuis 1997 du syndicat national du personnel de la formation (Synafor) affilié à la CFDT, Monsieur X est élu conseiller prud’homal de Paris en septembre 2011 sur une liste CFDT. A la suite de sa candidature aux municipales de 2014 sur une liste Front national, le conseiller se voit rappeler par le Synafor « l’incompatibilité existant entre les valeurs syndicales de la CFDT et celle de l’organisation politique dont il est membre« . Il est finalement exclu du syndicat le 9 juillet 2015, à l’issue d’un vote unanime des membres du bureau syndical où il a été convoqué. Le conseiller, qui sera élu conseiller régional Front national en décembre 2015, conteste son exclusion et assigne en 2016 le Synafor-CFDT devant le TGI de Paris afin d’obtenir l’annulation de son exclusion.
La liberté d’expression invoquée par le militant
L’intéressé considère que la décision de l’exclure du syndicat, fondée sur son adhésion aux idées du Front national, contredit la liberté d’expression et d’opinion garantie par la Constitution. Une liberté d’expression dont le militant a usé en exprimant dans plusieurs articles de presse et à la radio ses opinions politiques. A cette liberté d’expression, la CFDT oppose « la liberté d’association« , « l’adhésion à une association étant un contrat qui suppose la rencontre de deux consentements« . Or les valeurs de la CFDT, estime le syndicat Synafor, « sont radicalement opposées à celles du Front national » relayées publiquement par Monsieur X.
Pas de discrimination au regard de l’expression publique de valeurs différentes
Au final, dans son jugement du 21 novembre (lire en pièce jointe), le tribunal de grande instance, après avoir validé la procédure suivie par la CFDT, juge que cette exclusion syndicale n’est pas discriminatoire. « S’il est constant que la liberté de contracter et donc d’exclure un membre ne peut justifier le recours à une raison illicite ou discriminatoire, le motif d’exclusion de M. X. dépasse, en l’espèce, la simple prise en considération de ses opinions politiques mais repose encore sur son comportement consistant à prendre publiquement position sur certains sujets en contradiction frontale avec les valeurs et directives auxquelles il s’est engagé à adhérer lorsqu’il s’est affilié à ce syndicat« , indique le TGI de Paris pour débouter la demande de l’intéressé de voir annulée son exclusion.
« La solidarité entre les peuples et la lutte contre toute forme d’exclusion«
Le TGI fait notamment référence à l’article 1er des statuts de la CFDT qui énumère plusieurs valeurs parmi lesquelles « la solidarité entre les travailleurs, entre salariés (..) et plus largement entre les peuples » et « l’égalité » avec « la lutte contre toutes les formes d’exclusion, de discrimination, de sexisme, de racisme, de xénophobie« . Pour le juge, il apparaît manifeste que les idéaux et valeurs revendiqués publiquement par Monsieur X « entrent en contradiction avec ceux défendus par le syndicat« , et c’est le cas « de la question de la préférence nationale, mise en exergue dans certains propos tenus, ou encore lorsqu’il fait référence au regroupement familial ». Si une telle situation venait à se reproduire, réagit la CFDT sur son site confédéral, ce jugement « pourra utilement guider les équipes pour ne pas entrer en contradiction avec la liberté d’opinion de leurs adhérents« .