L’Union nationale des retraité-es de Solidaires (UNIRS) enquête sur le mouvement social

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Il y a beaucoup de retraité-es dans le mouvement des gilets jaunes. Il est donc naturel pour des organisations syndicales de retraité-es d’aller voir ce qui se passe, mais sans s’arrêter là. L’Union nationale interprofessionnelle des retraités et retraitées de Solidaires (UNIRS) encourage son réseau militant à enquêter sur l’ensemble du mouvement pour mieux en discuter et agir.

 

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31 rue de la Grange aux Belles 75010 Paris Tél : 01 40 18 18 12 – unirs@solidaires.org www.solidaires.org/

Enquête sur les mobilisations syndicales, sociales et citoyennes de la fin d’année 2018.

 

 Depuis le début du mois de novembre 2018, le mouvement dit « des gilets jaunes » est parvenu à créer une situation sociale et politique nouvelle dans le pays. A ce jour, 19 décembre 2018, les mobilisations et les actions de ces nouveaux « acteurs sociaux » sont parvenues à mettre la question sociale au centre des débats, chose à laquelle ne sont pas parvenues les organisations syndicales depuis nombre d’années.

Cette mobilisation sociale et citoyenne s’est faite en dehors des organisations syndicales et des partis politiques. Elle semble avoir été initiée principalement par ce qu’il est désormais convenu d’appeler les « réseaux sociaux » auxquels les chaînes d’information en continu ont donné une résonnance supplémentaire.

C’est peu de dire que l’émergence de ce mouvement, son ampleur rapide sur une bonne partie du territoire, son approbation par une majorité de l’opinion publique, ont pris de court le Président de la République, le gouvernement, la majorité parlementaire, mais aussi les oppositions politiques, les politologues, sociologues et autres experts en sciences politiques, sociales, humaines et économiques, et encore les organisations syndicales.

A l’Union syndicale Solidaires, nous non plus, nous n’avons rien vu venir, pas plus qu’à l’UNIRS. Lors de la réunion du Bureau National de Solidaires du jeudi 8 novembre, la question des « gilets jaunes » a été abordée, mais la position majoritaire était plutôt d’observer ceci avec quelques réserves et interrogations. Puis, au fur et à mesure du développement des actions et des mobilisations des gilets jaunes, les regards de nombre de militantes et de militants de Solidaires ont évolué. L’engagement de camarades dans des départements, aux côtés ou avec les gilets jaunes, a aidé à ce que le point de vue se structure. Plusieurs conférences téléphonées ont permis que les regards des unes et des autres se complètent pour parvenir à une approche un peu moins aléatoire de ce qui se passe. Le 6 décembre, à l’issue d’une rencontre entre toutes les organisations syndicales initiée par la CFDT et la CGT, un communiqué a été rédigé par 7 des organisations syndicales mettant uniquement l’accent sur les violences des manifestants et omettant totalement de parler des violences policières et, en amont, des violences sociales subies par nombre de personnes depuis trop longtemps. Solidaires a refusé de s’associer à un tel positionnement et a rédigé son propre communiqué « Les syndicats doivent prendre leurs responsabilités ». Le 10 décembre, Solidaires a été la seule organisation syndicale à refuser de se rendre à l’invitation de la présidence de la République faite la veille au soir et voulant laisser croire que le gouvernement consultait et négociait. Les annonces faites par le Président de la République le soir même du 10 décembre à la télévision montraient clairement combien il répondait plus aux exigences des financiers qu’aux revendications sociales. Lors du Bureau National du 13 décembre, le positionnement de l’Union syndicale Solidaires était majoritairement pour un soutien à ces mobilisations.  Et Solidaires a appelé à être aux côtés des gilets jaunes le samedi 15 décembre. A l’UNIRS, le sujet a été abordé la première fois lors du C.A. du jeudi 29 novembre ; la précédente réunion, celle de l’A.G. du 11 octobre, avait ignoré ce sujet, qui était encore totalement absent du « paysage social et politique ».

A ce jour, 19 décembre 2018, il est difficile de prévoir comment va évoluer ce mouvement  lui-­‐même  (avec  des  débats  internes,  des  tensions  diverses  et  peut  être contraires, etc.), quelles seront les réponses du gouvernement et, derrière lui, du patronat et de la finance mondialisée, quel sera le comportement de l’opinion publique (avec le poids des médias), quelle sera l’attitude du reste de la « population d’en bas », comment interviendront les diverses organisations syndicales, etc.

Nous avons été incapables de prévoir ce mouvement hier. Aujourd’hui, n’ayons pas la prétention d’en prévoir l’issue.

Ce que nous pouvons dire aujourd’hui, c’est que le pays est bousculé par un mouvement social et citoyen. Nous voyons que, manifestement, ceci fait débattre, dans un premier temps les acteurs eux-­‐mêmes, bien entendu et, très rapidement aussi, toute la classe parlante (politiques, éditorialistes, philosophes, chercheurs et autres spécialistes des mots qui ont l’habitude de parler pour nous expliquer ce que pensent les autres et ce que nous pensons). Et le débat s’est installé dans les familles et sur les lieux de travail.

Ceci fait débat aussi dans l’Union syndicale Solidaires. A ce jour, nous constatons que ce mouvement ouvre des potentialités, apporte de la respiration, de la confrontation et de l’échange dans une société où la pensée unique néo libérale était omniprésente. Il nous est rapporté certains propos tenus par certains gilets jaunes qui nous révulsent, certes. Mais il est probable que si les acteurs et les actrices de 1789, de 1848, de 1871, de 1936, de 1944 et 1945 et encore de 1968 avaient toutes et tous été suivis au quotidien, tous leurs propos ne nous apparaitraient pas limpides, cohérents et en phase avec la totalité de nos « valeurs ». Il semble bien que des militantes et des militants d’extrême droite tentent d’infiltrer ce mouvement et ils sont probablement majoritaires sur certains sites. La présence de militantes et de militants progressistes ne peut que faciliter la mise en minorité de leurs propos, c’est pourquoi il est utile d’y être, avec nos valeurs, nos positions et nos propositions. Se battre contre l’extrême droite et ses idées, ce n’est pas seulement en discourir entre nous, en soulignant comme c’est moche et inacceptable. C’est surtout s’y confronter et, aujourd’hui, aller la combattre là où elle cherche parfois à s’accaparer un mouvement social pour le détourner de ses revendications sociales. C’est peut être aussi par cette attitude que nous pourrons faire évoluer le regard de certains gilets jaunes à l’égard des organisations syndicales mises « toutes dans le même sac » et qualifiées de « toutes pourries ».

A Solidaires, majoritairement à ce jour, nous pensons qu’il faut participer à ces échanges et à ces nouvelles expériences démocratiques, tout à la fois pour y puiser un supplément de vitalité et aussi pour mesurer la façon dont nos discours et nos cohérences revendicatives sont reçus par cette partie de la population, jusqu’à présent sourde ou éloignée des organisations syndicales. Cette démarche implique notamment de  rencontrer  des  « gilets  jaunes »  dans  les  ronds-­‐points  et  les  manifestations.  Très minoritaire au début du mouvement, cette pratique commence à se répandre un peu plus. Nombre d’observateurs soulignent que les personnes retraitées, hommes et femmes,  sont  particulièrement  nombreuses  et  nombreux  dans  les  ronds-­‐points,  les barrages et les manifestations. Cette présence confirme l’exaspération d’une grande partie des retraitées et retraités. C’est ce que l’UNIRS et les 9 organisations de retraités et de retraitées mettent en avant ensemble depuis le 3 juin 2014. Nous pouvons d’ailleurs noter que les revendications portées par les gilets jaunes en ce qui concerne les personnes retraitées reprennent très souvent les revendications élaborées progressivement par les 9 organisations de retraité-­‐e-­‐s.

Lors du Conseil d’Administration de l’UNIRS du jeudi 29 novembre (voir le compte-­‐ rendu          https://solidaires.org/Compte-­‐rendu-­‐du-­‐CA-­‐UNIRS-­‐du-­‐29-­‐novembre-­‐2018), nous avons largement débattu de la situation sociale et syndicale générée par l’émergence du mouvement des gilets jaunes. Quelques camarades ont d’ailleurs pu nous faire part de leur propre expérience.

A l’UNIRS nous disposons d’un fichier de près de 400 adresses électroniques correspondant à des camarades qui reçoivent régulièrement nos informations militantes. Nous avons décidé d’inviter ces camarades à nous faire part de leur regard sur ce mouvement des gilets jaunes et, si c’est le cas, de leur expérience sur les ronds-­‐ points et de leur sentiment sur les discussions et les revendications portées, ainsi que sur  l’éventuelle  place  prise  par  l’extrême-­‐droite.  Ils  et  elles  peuvent  le  faire  en  nous envoyant leur point de vue par le canal de unirs@solidaires.org Il pourra s’agir de trois lignes, ou de trois pages ; les avis pourront être pour, ou contre, ou hésitants, avec à chaque fois des motivations ; toutes les questions que les personnes peuvent être amenées à se poser à partir de ces mobilisations pourront bien entendu être présentées. L’intérêt, pour l’UNIRS, c’est que nous disposerons ainsi de multiples regards. En effet, à ce jour, par exemple, le regard est fortement différent entre celui des militantes et des militants qui vivent en région parisienne, par exemple, où le mouvement est inexistant (il n’est donc pas connu « en direct », mais principalement par l’image qui est véhiculée par les médias, dans leur relative diversité) et le point de vue de camarades qui vivent dans une région très rurale où il y avait des rassemblements peut être sur une dizaine de lieux dans le département. Nous souhaitons mieux connaître, ensemble, « le mouvement des gilets jaunes », dans son ancrage local et sa dimension nationale. Bien entendu, un prochain C.A. de l’UNIRS examinera les courriers reçus et il en sera rendu compte.

Dans cette attente, avec tous nos remerciements et nos meilleures salutations.

Le 19 décembre 2018

Anne  Millant,  Denis  Turbet-­‐Delof,  Gérard  Gourguechon,  Jean  Piot,  Odette  Scherrer, Patrice Perret

 

 

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