Voici les premières réactions syndicales suite à une interview d’Elisabeth Borne, Première ministre, dans Le Parisien du 2 décembre 2022, où elle réaffirme sans ambiguïté le projet de passage à 65 ans en brandissant le chiffre faramineux de 100 milliards d’euros de dettes dans les années à venir.
Non les 65 ans (ni 64 ou même 63) ne passeront pas !
Publié le 2 décembre 2022
Tandis que le 3eme cycle de concertation portant sur le financement commence, la première ministre a jugé bon d’annoncer dans une interview les grandes lignes du contenu du futur projet de loi sur les retraites. Le gouvernement sort donc du bois. Rien de très surprenant, ni dans la méthode (des annonces à la presse, sans attendre la fin du cycle de concertation), ni sur le fond. Les annonces “finalisées” seront dévoilées le 15 décembre prochain.
Elle annonce un report progressif de 62 à 65 ans jusqu’en 2031, en légitimant tout ça à nouveau, par l’équilibre financier du système (après avoir 2 fois changé de motif justifiant cette réforme).
Comme d’habitude tout ceci sera saupoudré de mesurettes vendues comme positives pour les femmes et les seniors ou les petites pensions. La première ministre parle d’un stand by de la décote à 67 ans, d’un assouplissement d’anticipation de départ pour les carrières longues, d’élargissement possible des critères de pénibilité, de la prise en compte du congé parental dans le calcul de la durée de cotisation…et d’aller vers un minimum de pension (si carrière complète) à 85% du Smic (1300 euros à la date d’entrée en vigueur de la réforme).
Ce gouvernement reste donc sur le recul de l’âge de départ à la retraite à 65 ans («négociable» à 64 avec des contre-parties ?) met fin progressivement à tous les régimes spéciaux (via des clauses du grand-père-mère) et on est très loin de vraies mesures pour faire cesser la différence de 40 % de pensions des femmes par rapport aux hommes, et de sortir de la logique de paupérisation des retraité-es !
Rien n’est dit sur la méthode : projet de loi sécurité sociale rectificatif dès janvier ? Projet de loi en mars ? Pour une application annoncée début d’été.
Pour Solidaires, allonger la durée de cotisation, reculer l’âge de départ à la retraite n’est pas une option. Travailler plus pour gagner moins et de petites retraites, c’est non ! Après 2019, c’est un nouveau moment social pour sauver nos retraites qui s’annonce et que nous allons construire.
Invité d’une table ronde d’Alternatives Économiques sur la réforme des retraites pour laquelle une concertation est en cours, François Hommeril, président confédéral, a livré les analyses de la CFE-CGC.
Alors que la concertation, dans un cadre très contraint, se poursuit jusqu’en décembre avec les partenaires sociaux sur le projet gouvernemental de réforme des retraites, François Hommeril a participé, vendredi 25 novembre, à une table ronde (« Une réforme des retraites, pour quoi faire ? ») organisée à Dijon, au Palais des Ducs, par le mensuel Alternatives Économiques.En présence d’autres leaders syndicaux dont Philippe Martinez (secrétaire général de la CGT) et Marylise Léon (secrétaire générale adjointe de la CFDT), le président confédéral a pu livrer ses analyses sur un projet de réforme pour lequel la CFE-CGC est en opposition argumentée à une augmentation de l’âge légal de départ et à un allongement de la durée de cotisation. Nous reproduisons ci-dessous ses principales interventions.SUR L’URGENCE, SELON LE GOUVERNEMENT, À MENER UNE RÉFORME « INDISPENSABLE »« Quand il n’y a pas de problème, il faut toujours se méfier de ceux qui prétendent qu’il y en a un… Si par le passé, il y a eu plusieurs réformes des retraites dont, pour la plupart, nous considérions qu’elles étaient nécessaires, ce n’est pas le cas aujourd’hui car il n’y a pas de problème. Nous connaissons bien ces sujets. Les partenaires sociaux sont eux-mêmes des acteurs de la protection sociale, et gèrent notamment avec efficacité les régimes complémentaires des retraites. »« Pour travailler sur les équilibres futurs du régime, il faut poser des paramètres. Et nous pensons aujourd’hui que le gouvernement « truque » les chiffres. Avec son projet, il ne poursuit qu’un objectif : récupérer environ 1 point de PIB sur ce qui constitue une ressource partagée des salariés actifs vers les retraités, afin de pouvoir financer d’autres lignes budgétaires. Pour nous, c’est non : les salariés ont assez payé. S’il y a effectivement un destin national méritant de voir comment il est possible de contribuer à financer des marges de manœuvre budgétaires, pourquoi pas. Mais dès lors, il convient de réunir tous les acteurs autour de la table. »
« Aujourd’hui il n’y a pas de problème avec les retraites. Le gouvernement truque les chiffres. L’objectif de cette réforme est de récupérer 1 point de PIB pour financer d’autres lignes budgétaires. »
« Sur ces sujets, j’observe aussi que dans le grand débat du partage de la valeur, qui n’a pas fini de nous occuper lui aussi, la part revenant aux salariés s’affaiblit quand, dans le même temps, les versements de dividendes dans les grandes entreprises ont atteint des records l’an dernier. Sans parler de celles qui ont racheté des actions, un non-sens total ! »
SUR LES IMPACTS POTENTIELS DU PROJET DE RÉFORME
« Parmi les victimes que ferait ce projet gouvernemental, il y a en premier lieu les mères de famille qui ont aujourd’hui la possibilité de partir en retraite à 62 ans quand bien même elles sont entrées tardivement sur le marché du travail et qu’elles ont pu connaitre des interruptions de carrière. Demain, elles ne le pourraient plus. »
« Plus largement, on a un gouvernement qui, quand il parle d’équité et de justice sociale, indique vouloir régler des problèmes d’inégalités dans le monde du travail. Sauf que ça ne marche pas comme ça : réglons d’abord ces inégalités. Ce n’est pas au système de retraite d’en supporter la réparation. Par exemple, sur l’emploi des seniors, l’usure professionnelle et la gestion des carrières, la CFE-CGC milite beaucoup pour lutter contre les risques psychosociaux (RPS) et améliorer les organisations du travail défaillantes. Il faut aussi travailler sur la valeur travail, la richesse que représentent les salariés, et arrêter, dans les bilans d’entreprise, de réduire le travail au seul coût affiché dans les bilans comptables et financiers. »
« Par ailleurs, décaler l’âge de la retraite aurait aussi des conséquences sur la partie complémentaire des régimes. Or aujourd’hui, la situation patrimoniale de ces régimes gérés par les partenaires sociaux est très bonne avec des réserves nettes de l’ordre de 163 milliards d’euros cumulés. Cette cagnotte, qui est l’argent des salariés, intéresse le gouvernement. »
SUR LA NOUVELLE RÉFORME DE L’ASSURANCE CHÔMAGE
« Cette réforme gouvernementale de l’assurance chômage (ndlr : prévoyant notamment une baisse de la durée d’indemnisation de 25 % à compter du 1 février 2023) ne repose sur aucune base académique. Les études le prouvent : en enlevant des moyens aux personnes privées d’emploi de résister durant cette période difficile, on ne les aide pas à retrouver du travail. C’est inacceptable. »
Mathieu Bahuet













