Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, demande au Président de la République de ratifier au plus vite la nouvelle convention internationale (N°189) adoptée en juin par l’Organisation internationale du travail (OIT) contre le harcèlement et les violences sexistes et sexuelles dans le travail.
Montreuil, le 1er juillet 2019
Monsieur le Président,
Le vendredi 21 juin, la conférence du centenaire de l’Organisation Internationale du Travail a adopté une 190e convention associée à une recommandation contre les violences et le harcèlement au travail. Suite à nos interpellations, la France a porté une position volontariste et joué un rôle moteur, ce qui a permis d’emporter le soutien de toute l’Union Européenne, et a ensuite été déterminant pour l’issue positive de la négociation.
La qualité des positions portées par notre pays et par le groupe des travailleuses et travailleurs a contribué à ce que les textes adoptés soient parmi les plus ambitieux de ceux produits par l’OIT depuis 50 ans. En adoptant ces instruments, l’OIT démontre sa vitalité et va pouvoir, encore une fois, être un levier pour améliorer les droits des travailleurs et surtout des travailleuses dans tous les pays du monde. Ces instruments sortent enfin les violences sexistes et sexuelles de l’invisibilité et offrent un cadre complet de politique publique pour y mettre fin.
Pour s’appliquer, cette convention doit désormais être ratifiée. Nous souhaitons qu’à l’image de son engagement dans la négociation, la France soit exemplaire pour la ratification . La transposition de la convention doit être l’occasion de nous doter, à l’image du Canada, de l’Espagne, des Philippines, ou encore de la Nouvelle Zélande, d’une législation de référence en matière de lutte contre les violences. Nous souhaitons donc la mise en place au plus vite d’un cadre tripartite pour travailler sur les évolutions législatives et règlementaires à apporter. Ce cadre devra être décliné dans la fonction publique, dans laquelle l’ensemble des dispositions doivent aussi être mises en place. Je vous rappelle nos principales propositions, qui s’inscrivent dans la droite ligne de ces nouveaux instruments de l’OIT:
- Faire de la prévention des violences sexistes et sexuelles un sujet obligatoire de négociation à tous les niveaux et mettre en œuvre des sanctions pour tous les employeurs qui ne disposent pas de plan de prévention et de procédure sécurisée pour les victimes et témoins.
- Protéger l’emploi et la carrière des victimes, que les violences aient un lien avec le travail ou non, en mettant en place sur présentation d’un certificat médical le droit à des aménagements d’horaires, de poste, des congés payés, la possibilité d’une mobilité fonctionnelle ou géographique choisie… La prise en charge médico-sociale et psychologique des victimes doit être effectuée sans frais.
- Former l’ensemble des RH et manageurs, inspecteurs et inspectrices du travail, magistrates et magistrats, personnels de santé, d’éducation et de sécurité…, et les représentantes et représentants du
- Mettre en place une sensibilisation annuelle obligatoire sur le temps et le lieu de
- Interdire le licenciement de femmes victimes de violences et allonger les délais de prescription des licenciements commis suite à des discriminations ou à des violences sexuelles au travail.
- Garantir l’indépendance et le rôle des référentes et référents du personnel contre les violences en leur attribuant des droits, moyens et prérogatives
- Conformément à la convention, ces dispositions doivent couvr_ir les travailleurs et travailleuses quel que soit leur statut contractuel, les personnes en formation ou en recherche d’emploi, et doivent s’appliquer au-delà du lieu de travail, en intégrant les déplacements professionnels, les trajets domicile-travail, les lieux de repas ou d’hébergement lorsqu’ils sont fournis par l’employeur…
Enfin, je profite de ce courrier pour vous demander d’enclencher également la ratification de la convention 189 de l’OIT sur le travail domestique. Cette convention concerne des secteurs quasiment exclusivement féminins, dont les conditions de travail, la rémunération et le temps de travail sont dérogatoires au Code du travail. Nous souhaitons qu’un cadre tripartite de négociation avec le particulier employeur soit mis en place pour définir le calendrier et les modalités de ratification de la convention.
Sachant compter sur votre engagement, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Philippe MARTINEZ
Secrétaire général de la CGT
Copie à madame Muriel Pénicaud, ministre du Travail