La Commission européenne propose un projet de directive pour « simplifier » les règles sociales et écologiques européennes, issues du « pacte vert » et en direction des entreprises. Quatre syndicats en France (CFDT, CGT, CFE-CGC, UNSA) s’élèvent contre ce projet dénoncé comme « non négociable« . Une prise de position réunit également des associations écologistes ou de droits sociaux (FIDH, OXFAM, Amis de la Terre…) et la CGT.
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Omnibus
Les droits humains et environnementaux ne sont pas négociables !
Halte au recul du modèle européen !
Les organisations syndicales françaises expriment leur profonde inquiétude face au projet de directive dévoilé par la Commission européenne ce mercredi 26 février.
La présidente de la Commission avait annoncé dès novembre son intention de simplifier les règles du Pacte vert pour les entreprises, en ciblant notamment le reporting de durabilité (CSRD), le devoir de vigilance (CSDDD) et la taxonomie.
Le texte présenté aujourd’hui dénaturerait profondément les objectifs initiaux. En effet, sous couvert de simplification, il répond plus à un objectif de déréglementation frénétique guidée par la compétitivité. Ce texte affaiblirait la responsabilité des entreprises et leur obligation d’agir au sujet de l’impact de leurs activités sur l’environnement et les droits humains, tout au long de la chaîne de sous-traitance. Le démantèlement des avancées obtenues lors de la précédente mandature constituerait un renoncement aux droits humains, pourtant au fondement de l’Union.
Ce recul historique serait une erreur stratégique majeure. En effet il est essentiel de conjuguer emplois de qualité et d’avenir tout en préservant les objectifs environnementaux et le respect des droits humains !
De plus, les organisations syndicales dénoncent l’absence de respect du processus démocratique lors de l’élaboration de ce texte. En effet, ce projet a fait l’objet d’une consultation partielle et partiale.
De nombreuses ONG spécialisées favorables au Pacte Vert, n’ont pas été consultés.
La remise en cause de la directive sur le devoir de vigilance est tout aussi préoccupante ! Elle portait une réelle ambition écologique et sociale pour l’Union européenne, engageant concrètement les entreprises vers une conduite responsable des entreprises partout dans le monde.
Grâce à l’engagement de la société civile, syndicats et ONG en tête, la France a été pionnière du devoir de vigilance en adoptant une loi dès 2017. Cette loi n’a d’ailleurs pas empêché de bons résultats économiques, mis en avant par les gouvernements successifs.
La volte-face de la Commission et sa proposition d’une harmonisation européenne par le
bas augure d’un recul normatif sans précédent. Alors que la législation européenne devrait toujours se faire par le haut, le projet Omnibus se situe en deçà des principes directeurs de référence de l’ONU et de l’OCDE en matière de droits humains.
Limiter le devoir de vigilance aux filiales et aux partenaires de rang un dont l’effectif est supérieur à 500 salariés permettrait le contournement de ses dispositions par le recours systématique à des intermédiaires et exclurait les fournisseurs de la chaîne d’approvisionnement les plus sujets aux violations des droits humains et environnementaux. La suppression de l’obligation de mettre en œuvre un plan de transition climatique vide également le devoir de vigilance de ses effets.
Tout aussi regrettable est la disparition de la perspective d’extension de la directive au secteur financier ; plus aucun rapport n’étant prévu à l’avenir à ce sujet.
Nous, organisations syndicales, aux côtés de la CES, appelons instamment la France et l’Union européenne à être à la hauteur des enjeux actuels. La simplification ne doit pas rimer avec déréglementation et déresponsabilisation des entreprises.
Le modèle européen, fondé sur les valeurs de démocratie, de justice et de respect des droits humains ne doit pas être sacrifié !
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Directive Omnibus : vers un affaiblissement historique des normes environnementales et sociales en Europe
26 février 2025 — La Commission européenne a rendu publique ce jour une proposition législative revenant de manière brutale sur des avancées pourtant cruciales pour la protection des droits humains, de l’environnement et du climat. Sous couvert de • simplifier » la vie des entreprises, la directive « Omnibus » de la Commission propose de démanteler nombre d’obligations en matière de durabilité et de protection des droits humains.
La proposition de directive Omnibus de la Commission européenne n’a de « simplification » que le nom. En réalité, il s’agit d’une dérégulation massive et sans précédent, qui rappelle la politique de déréglementation en cours aux États-Unis. Présentée dans l’urgence et sans respecter pleinement les procédures démocratiques, elle s’attaque à des normes d’intérêt public. Ces dernières visent à prévenir et réparer les atteintes aux droits humains et à l’environnement causées par les entreprises, tout en permettant aux acteurs économiques et financiers de s’aligner sur les objectifs climatiques européens.
Vers un affaiblissement notoire de la CSDDD…
Concernant la Directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité des entreprises (CSDDD), la proposition réduit drastiquement son champ d’application (exclusion des relations commerciales indirectes, au niveau desquels ont lieu nombre d’atteintes graves), vide de Ieur substance certaines mesures correctives ainsi que les plans de transition climatique attendus des entreprises, et s’attaque aux mécanismes permettant de contrôler, sanctionner et tenir pour responsables sur le plan civil les entreprises en cas de faute.
Concrètement, ces changements priveraient le devoir de vigilance européen de tout effet utile. Les violations les plus graves resteraient en dehors de son périmètre, les entreprises fautives pourraient se dédouaner au moyen de mesures cosmétiques inadaptées, et elles pourraient échapper à l’obligation pourtant fondamentale de réparer les dommages causés par Ieurs activités. Dans les faits, les multinationales pourront continuer à vendre des vêtements fabriqués par des travailleur euse s dans des conditions inhumaines, à déforester, et à mettre en danger la biodiversité en toute impunité. En supprimant ces dispositions clefs, la Commission européenne transforme le devoir de vigilance en déclaration d’intentions.
…et de la CSRD
Concernant la Directive sur la publication d’informations en matière de durabilité des entreprises (CSRD), la proposition réduit le nombre d’entreprises couvertes de 80 à 85 % et supprime les normes sectorielles, qui permettent de cibler en priorité les secteurs les plus polluants tels que le secteur extractif. Cela signifie que certaines informations essentielles pour orienter les financements vers la transition climatique juste seront perdues.
Influence des lobbys et soutien des mouvements ultra-conservateurs
Cette proposition législative n’est pas uniquement un désastre pour la transition climatique et la protection des droits humains et de l’environnement. En effet, les politiques et prises de position de l’extrême droite progressent dans les États membres et au sein du Parlement européen, où certains député.e.s se réjouissent ouvertement de cette initiative de dérégulation. Cette révision constituerait d’ailleurs un précédent dangereux permettant de démanteler à l’avenir bien d’autres protections du Pacte Vert.
Par ailleurs, cette initiative est un signe supplémentaire de l’affaiblissement démocratique à I’ceuvre dans l’Union européenne. Alors que nombre de voix po i ques et économiques se sont élevées pour protéger ces textes, la Commission a préféré capituler face aux lobbys des grandes entreprises, comme le MEDEF ou la FBF. Ces derniers profitent d’un moment de fébrilité politique pour dérouler Ieur agenda de dérégulation et faire primer Ieurs intérêts propres et les profits sur les droits de millions de personnes et le futur de notre planète.
Alors que se profilent des discussions cruciales au sein du Conseil de l’Union européenne au sujet de cette proposition, nos organisations de la société civile française appellent le gouvernement français à ne pas trahir les victimes des abus des entreprises à travers le monde et à défendre l’ambition initiale de ces textes. Il est encore temps d’éviter ce recul historique.