Voici les réactions syndicales contre le coup tordu du vote de l’Assemblée nationale sur la loi immigration. Avant le vote, une lettre ouverte avait été adressée au Président de la République.
Projet de loi immigration : Tribune – Lettre ouverte au président de la République
Un retrait du projet de loi immigration plutôt qu’une tâche indélébile sur nos principes républicains
Lundi 11 décembre, l’Assemblée nationale a adopté une motion de rejet donnant un coup d’arrêt provisoire à la tenue des débats autour du projet de loi asile et immigration. Confronté à plusieurs hypothèses en réaction, le président de la République et le gouvernement ont annoncé leur volonté de poursuivre l’examen du texte en convoquant une Commission Mixte Paritaire, ce 18 décembre.
Cruelle ironie que le choix de cette date, qui se trouve être celle de la journée internationale des personnes migrantes : car cette commission, au vu de sa composition, ne pourra aboutir qu’au prix de la satisfaction des nombreuses demandes de durcissement du texte portées par Les Républicains et le Rassemblement National.
Conditionnement des prestations sociales à 5 ans de présence régulière en France, nouvelles atteintes au droit du sol, rétablissement du délit de séjour irrégulier, suppression de l’aide médicale d’état, fin de non-recevoir à toute perspective de régularisation, durcissement encore accru de l’accès aux titres de séjour, course inflationniste et insensée à l’enfermement et aux expulsions… Autant de mesures qui constituent la base des négociations de la commission mixte paritaire, alors qu’elles portent atteinte à nombre de nos principes républicains, en matière d’inconditionnalité d’accès aux soins ou au logement, de respect de la dignité, de refus d’entériner des logiques de préférence nationale. Et alors que souffle, en Europe comme en France, un vent mauvais de remise en cause du droit international, d’affaiblissement des socles de l’Etat de droit.
Nous demandons aujourd’hui solennellement au président de la République de ne pas céder à cette spirale de la surenchère de propositions attentatoires aux droits fondamentaux des personnes.
Vouloir aboutir coûte que coûte à une adoption du projet de loi, au prix de compromissions, de tous les marchandages sur des sujets pourtant contredits par nombre d’études et refusés, par exemple, par les professionnels de santé, restera comme une tache indélébile sur nos principes républicains. Quand tant de défis -géopolitiques, climatiques, sociaux, économiques…- sont pourtant devant nous, ce serait une faute majeure qui, au lieu de le renforcer, fragiliserait notre pays, dans ce qu’il est et dans ce qu’il dit au monde.
Ainsi, face aux divisions sociales, au poison grandissant de la haine et du rejet de l’autre, il est plus que jamais de la responsabilité du président de la République de tracer des perspectives claires permettant l’unité de la nation et sa cohésion plutôt que de courir après l’accord d’un instant. La seule issue viable est aujourd’hui de retirer ce projet de loi, qui a démontré qu’il ne pouvait être adopté par une majorité parlementaire sur une base respectueuse de nos valeurs républicaines.
Et de reposer dans le débat public un cadre serein et apaisé pour construire collectivement, avec les acteurs de la société civile, les personnes concernées, les mesures permettant notamment de garantir l’accueil des personnes migrantes dans des conditions dignes de notre tradition de pays des droits humains, un cadre clair de régularisation des travailleuses et travailleurs sans-papiers, le respect de l’accès inconditionnel aux soins et à l’hébergement… Autant de mesures justes qu’il nous faut porter face aux enjeux migratoires, au cœur de notre présent et de notre avenir.
Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT
Daniel Goldberg, président de l’Uniopss
François Héran, professeur au Collège de France
Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT
Henry Masson, président de La Cimade
Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre
Camille Schmoll, Institut Convergences Migrations/EHESS
Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France Terre d’Asile
Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH
- Télécharger le communiqué CFDT :CFDT-20231220_presse_cp54_loi_immigration_2023-12-20_10-33-40_463
Loi immigration : S’opposer au sabordage des valeurs de la République
Le texte adopté hier soir par l’Assemblée nationale et le Sénat restera dans l’histoire comme une tache sur notre démocratie.
L’extrême droite a soufflé les mots et les idées de la loi sur l’immigration votée par les parlementaires. Une loi qui porte atteinte aux droits fondamentaux de citoyens étrangers vivant de façon régulière sur le sol français, qui attaque le droit du sol, rétablit le délit de séjour irrégulier, durcit l’accès aux titres de séjour… Qu’en est-il de la promesse d’un texte équilibré reprise ironiquement dans le titre de la loi : « Contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » ?
Le Rassemblement national ne s’y est pas trompé. Il a salué « une victoire idéologique ». Les digues édifiées contre le nationalisme d’extrême droite ont été largement fissurées par les mots et les expressions prononcés dans les assemblées pendant la période des débats. Ce 19 décembre, elles se sont effondrées.
Dans le respect des engagements qu’il a pris au lendemain du second tour de l’élection présidentielle, la CFDT demande au Président de la République de ne pas promulguer cette loi qui fait honte à notre pays.
Les mots, les actes et les valeurs de l’extrême droite centrés sur le rejet de l’autre et le repli sur soi n’offrent aucune perspective positive pour les citoyens et notamment les plus fragiles.
La CFDT appelle toutes les forces humanistes et de progrès à s’opposer à la diffusion et à la banalisation du projet de l’extrême droite. Les prochaines semaines seront cruciales.
- Télécharger le communiqué de Solidaires : Solidaires-2023-12-19 Loi immigration
L’Assemblée nationale vient d’adopter ce texte après des tractations politiciennes organisées par le gouvernement tandis que l’extrême-droite jubile.
Il reflète la volonté du gouvernement de stigmatiser une fois de plus les immigré·es et développe un climat nauséabond vis-à-vis des étranger·es, malgré les promesses de “digue contre l’extrême-droite” d’Emmanuel Macron en mai 2022.
La journée du 19 décembre a franchi un nouveau cap. Le gouvernement a décidé de faire adopter une loi reprenant les pires positions de l’extrême-droite sur la préférence nationale, sa négation du droit du sol et des droits des travailleuses et travailleurs étranger·es. Le problème n’est pas d’adopter le projet de loi avec ou sans les voix de l’extrême droite. C’est bien son contenu, qui permet qu’il soit voté par l’extrême droite.
L’Union syndicale Solidaires lutte depuis des mois contre ce projet de loi. Nous avons participé activement au cadre unitaire UCIJ, Unis contre une immigration jetable, pour repousser cette loi et porter une politique migratoire d’accueil et solidaires. L’urgence c’est de régulariser les travailleurs et travailleuses sans-papiers trop souvent exploité·es, sous la menace d’une arrestation sur le chemin du travail. Cette loi n’y répond pas. L’urgence c’est de ne laisser personne à la rue. L’urgence c’est de donner les moyens aux services publics. L’urgence c’est les augmentations de salaires, le partage des richesses et la lutte contre la crise écologique, pas une énième loi sécuritaire et xénophobe.
Nous sommes à un tournant politique majeur. Il est urgent que l’ensemble du mouvement social, que les forces syndicales, associatives et politiques, fassent front ensemble. Nous avons une responsabilité collective à proposer une action massive et populaire pour empêcher l’application de cette loi. L’Union syndicale Solidaires va tout mettre en œuvre dans ce sens dans les jours et semaines qui viennent.
Le texte déjà dangereux porté par le ministre de l’Intérieur, dénoncé depuis le départ par la FSU comme par les collectifs de sans-papiers, toutes les ONG, les associations de défense des droits fondamentaux des étranger·es, ainsi que par la Défenseure des Droits, a été encore durci avec le soutien actif de l’extrême droite. Cette loi renforce la précarité des sans-papiers et leur répression, facilite leur expulsion plutôt que leur régularisation, supprime des droits sociaux au prétexte du mythe d’un « appel d’air » pourtant contredit par tous les travaux de recherche. Il prend toute une série de mesures xénophobes qui fragiliseront fortement les droits de toutes et tous les étranger·es présent·es sur le territoire français ou qui s’apprêteraient à demander à y séjourner, mettant ainsi en place des éléments de préférence nationale.
C’est une loi qui s’inscrit en rupture avec les traditions humanistes d’accueil d’un pays au carrefour des cultures et qui s’attaque frontalement au droit des étrangers. La majorité présidentielle a cédé aux sirènes de la droite et de l’extrême droite. Un tel projet de loi s’il était appliqué marquerait un tournant dans notre capacité à vivre ensemble à un moment ou certains à l’extrême droite, comme à droite, de l’échiquier politique distillent les tenants de politiques de rejet et de haine de l’autre.
Pour la FSU, il n’est pas envisageable de voir appliquée une telle loi. Elle appelle à se mobiliser pour en obtenir le retrait.
Loi immigration : la République abimée
L’UNSA exprime aujourd’hui sa condamnation d’un texte de loi qui n’a cessé de faire la part belle aux propositions martelées par l’extrême droite depuis des années, axées autour de l’idée de préférence nationale. Se félicitant d’une « victoire idéologique » pour son courant, la présidente du groupe parlementaire RN a assuré que ses députés voteront le texte adopté en Commission mixte paritaire ce mardi 19 décembre. Tout est dit.
Pour l’UNSA, sans rentrer dans le détail des mesures, la rupture avec la tradition du droit du sol et la régularisation des étrangers sur les métiers en tension laissée à l’arbitraire des préfets, entre autres, illustrent la dérive de la majorité présidentielle. Le gouvernement et la majorité se compromettent avec les franges les plus dures et extrêmes de l’Assemblée. À braconner sur les terres de l’extrême droite, on ne fait que cautionner ses thèses. Reste à savoir comment les sénateurs puis les députés voteront dans la soirée de ce mardi 19 décembre.
Notre République mérite mieux. Aux parlementaires de refuser cette dérive honteuse.
Laurent Escure,
Secrétaire général de l’UNSA
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