L’argumentaire ci-dessous explique bien l’arnaque des taxes carburants, qui ont peu à voir avec un vrai souci écologique.
Faire payer le peuple pour financer les baisses d’impôts des plus riches
Introduction
La contestation populaire de l’augmentation des taxes sur les carburants se renforce. Le gouvernement y répond en indiquant que ces augmentations sont nécessaires pour l’instauration d’une fiscalité écologique afin de lutter contre le réchauffement climatique. Il s’agit en réalité d’un discours manipulateur.
La fiscalisation sur les carburants est assurée par la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) dont le produit est de 33,8 milliards d’euros en 2018, en forte hausse par rapport à 2017 (+ 3,3 milliards).
Cette hausse va se poursuivre en 2019 (+ 3,7 milliards).
Ces augmentations s’expliquent par trois phénomènes :
- la fin du régime fiscal particulier dit du « gazole non routier » (GNR) qui s’appliquaient aux engins fixes et aux entreprises de BTP,
- l’alignement de la fiscalité du gazole sur celle de l’essence et l’augmentation importante de la « taxe carbone »,
- la part de la fiscalisation qui se calcule en prenant en compte les rejets de CO2 lors de la combustion du produit (elle est passée de 14,50 € à 44,60 € la tonne en 2018).
1°) Une justification faite de boniments
Le gouvernement justifie donc cette forte hausse par la nécessité de verdir la fiscalité. Il s’agit :
- 1) d’affecter le produit de la taxe au financement de la transition énergétique
- 2) de modifier les comportements des particuliers et des entreprises par l’instrument fiscal pour qu’ils aient une consommation d’énergie plus respectueuse de l’environnement.
Or cette explication est fausse, et pour les deux volets.
- S’agissant du financement de la transition énergétique via la hausse de la TICPE
Le produit de la TICPE n’est affecté qu’à 21,3 % à des besoins écologiques, soit un « compte d’affectation spéciale » (CAS) appelé « transition énergétique ». Le reste n’est pas fléché vers des dépenses publiques environnementales.
Surtout, la hausse importante prévue pour 2019 sera entièrement affectée vers le budget général de l’État et absolument pas vers le CAS.
La forte hausse de la fiscalité sur les carburants n’a donc pas pour finalité de financer la transition énergétique, contrairement à ce qu’affirme le gouvernement.
- S’agissant de la modification des comportements via la hausse de la fiscalité
Ce raisonnement serait admissible si la politique gouvernementale était cohérente et toute entière dirigée vers la construction d’une société décarbonée. Or, ce n’est absolument pas le cas.
Déjà, le gouvernement maintient des dispositifs de remboursements et d’exonération de taxe à destination des transports routiers, maritimes (800 millions d’euros par an) et aériens (plus de 3 milliards d’euros). Ces deux derniers bénéficient même d’une exonération totale.
Pour le justifier, le gouvernement explique que ces dispositifs reposent sur des textes internationaux, en particulier européens. Ce qui exact, mais cela n’enlève rien au caractère scandaleux de ces mesures.
Les textes européens le justifient par des impératifs de compétitivité des entreprises. Mais en pratiquant ainsi, le droit européen favorise donc le transport maritime des marchandises à travers le monde, et donc la délocalisation dans les pays à bas coût, notamment où les normes environnementales sont les moins strictes.
La délocalisation de la production se couple donc avec une délocalisation de la pollution, décuplée par l’utilisation de navires soumis à aucune norme environnementale lorsqu’ils naviguent en haute mer.
2°) L’écologie ? Le cadet des soucis du gouvernement !
Le gouvernement français n’est pas seul responsable du droit européen : mais il le soutient ! Et l’on n’a jamais entendu les très europhiles gouvernement Philippe/présidence Macron remettre en cause ces exonérations fiscales, ni l’accord de Paris pour combler le déficit de recettes créé par ce cadeau aux multinationales du transport maritime et aérien, absents du texte !
Et par ailleurs les préoccupations environnementales de ce gouvernement sont artificielles : refus d’interdire le glyphosate donc permission d’empoisonner nos aliments et prolongation des crédits au nucléaire, dangereux et coûteux, au détriment des énergies renouvelables plus conformes à l’intérêt général1, etc.
Cette obsession compétitive de la présidence Macron est d’ailleurs l’énorme limite de son discours environnemental.
Tout déréglementer au nom de la compétitivité des entreprises ne va pas inciter ces dernières à produire plus propre.
Privatiser la SNCF et mettre le secteur ferroviaire en concurrence ne constitue pas ainsi une mesure optimale pour l’environnement. Conduits à privilégier les lignes rentables, les opérateurs vont délaisser de nombreuses liaisons, fermer des gares, à l’image de ce qui s’est déjà passer dans le transport de fret, dont la privatisation a été un échec complet.
Là encore la politique du gouvernement favorise directement le transport par la route, qu’il s’agisse des poids lourds ou de la voiture individuelle.
De la même façon, l’absence de politique ambitieuse en matière de logement et de mesure forte pour juguler la hausse des prix de l’immobilier ne peut que conduire les gens à s’éloigner de plus en plus des centres-villes.
Et donc à être contraints de recourir à leur véhicule personnel pour tous les actes de leur vie : se rendre au travail, conduire les enfants à l’école, faire leurs courses, etc.
3°) Une politique fiscale au service des plus riches
Enfin, la manipulation gouvernementale atteint peut-être son summum si l’on regarde sa politique fiscale dans son ensemble. Comme on l’a vu, la hausse de la TICPE sera principalement affectée vers le budget général de l’État, sans fléchage vers les politiques de l’environnement.
En fait, le gouvernement n’a pas d’autre choix s’il ne veut pas laisser filer déficit et dette publics. En effet, sa politique fiscale à destination des entreprises et particuliers les plus riches est extrêmement coûteuse pour le budget de l’État.
a) Faible avec les forts
La pérennisation du « pacte de responsabilité » a pour conséquence de vider les caisses publiques de 40 milliards d’euros par an, sans aucun effet significatif sur l’emploi (100 000 créations ou sauvegardes au maximum2).
De même, la suppression de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) coûte 3,5 milliards d’euros par an à l’État.
Sans compter la fraude fiscale, dont le montant est estimé entre 60 et 80 milliards d’euros annuels, et qui est largement favorisée par la politique de libre circulation des capitaux défendue avec acharnement par le gouvernement.
b) Fort avec les faibles
Acculé entre ses cadeaux fiscaux aux plus riches, qui diminue gravement les recettes publiques et le respect de l’orthodoxie budgétaire imposée par la Commission euro- péenne, le gouvernement n’a d’autre choix que d’aug- menter les impôts sur les classes populaires et moyennes, par la taxation de la consommation (TVA, TICPE).
Le faire sous couvert de réorientation de la fiscalité vers la transition écologique est donc pire qu’un mensonge, c’est une énorme manipulation organisée par un gouvernement idéologiquement fanatique, qui a poussé tellement loin les curseurs ultralibéraux qu’il en est devenu fou, comme un religieux sous emprise d’un dogme, sourd à toutes les argumentations logiques.
Pour conclure
Prendre ainsi délibérément en otage la préoccupation écologique est une responsabilité énorme que prend le gouvernement envers l’Histoire. Les classes populaires et moyennes ne sont évidemment pas opposées à une politique volontariste en matière d’environnement, y compris par le biais de la fiscalité. Elles réclament simplement plus de justice, et de ne plus être les seules à porter l’effort collectif !
Les capitalistes, les spéculateurs et les banquiers d’affaires ont mené le monde au bord du chaos en 2008. Ils ont été sauvés de la ruine par la dépense publique et donc par l’impôt.
Dix ans plus tard, les gouvernements, et au 1er rang desquels le gouvernement français, les en remercie en les faisant échapper à l’impôt et tapant encore plus fort sur les victimes de leurs excès et de leur rapacité ! Cette folie ne peut plus et ne doit plus durer ! L’égalité et la justice fiscale et sociale doivent être une priorité !
Le mercredi 28 novembre 2018
Notes : 1et 2
- Éolien = 80€/MWh et solaire photovoltaïque = 60€/MWh ; nucléaire par l’EPR = 120€/MWh → une énergie 2 x plus chère ! Sans compter les coûts de stockage des déchets, du démantèlement des centrales que ces politiques sont incapables d’estimer…
- Soit 33 000 € mensuels/emploi « créé/sauvé » ! Quand un fonctionnaire coûte 10 fois moins au contribuable : 33 000 € = 6 agents de catégorie C + 2 de catégorie B + 1 de catégorie A, avec les cotisations sociales… Soit un service des douanes, opérationnel et au service de la protection de tous !!! De là à conclure qu’une partie des 40 Mds sert à autre chose qu’à l’emploi et l’intérêt du ..