Baptiste Talbot, secrétaire général de la fédération CGT des services publics nous fait parvenir via Facebook un point de vue sur la convergence des luttes et le rapport entre luttes sociales et perspectives politiques.
« A partir de la concomitance des luttes, construire leur convergence : quelques réflexions sur les enjeux de la période
Le gouvernement Macron/Philippe a fait le choix d’ouvrir plusieurs fronts de manière simultanée, en lançant une série de lourdes réformes à visée antisociale. Par un effet de saturation, il s’agit pour lui de mettre pleinement en oeuvre la stratégie du rouleau compresseur et d’entretenir l’idée que toute résistance serait vouée à l’échec.
Le gouvernement affirme de manière répétée ne pas croire à la convergence des luttes (ou à leur « coagulation » pour reprendre sa vulgate).
Or, la période récente est marquée par le développement dans la durée de plusieurs mouvements sectoriels : cheminots, fonctionnaires, retraités, étudiants, personnels des Ehpad, éboueurs, bataille de Notre-Dame des Landes, Carrefour, Air France ….
La récente sortie de Laurent Berger sur le caractère illusoire et politique de la convergence des luttes est révélateur du caractère central de la question. On ne peut en effet, pour une fois, que partager l’avis de Berger sur la dimension politique que revêtirait la réalisation d’une convergence des luttes.
Fondamentalement, la pleine satisfaction des revendications exprimées nécessite en effet une rupture claire avec la politique menée par Macron et ses commanditaires patronaux.
Cela laisse entière la question des conditions de la convergence des luttes.
Celle-ci nécessite d’abord un enracinement, un élargissement et une continuité des luttes. Autant de caractéristiques qui supposent au préalable un travail syndical de masse, dans la proximité, le plus unitaire possible, fondé sur l’élaboration revendicative et débouchant sur des décisions collectives d’entrée en mobilisation.
Si la situation peut rapidement évoluer, il y a encore beaucoup à faire de ce point de vue et vouloir d’ores et déjà porter la mobilisation sociale sur le terrain de ses possibles conséquences politiques serait une erreur.
Aujourd’hui, un mouvement de masse peut se développer à partir des revendications mais ce n’est pas sur le mot d’ordre « Dégager Macron » que celles et ceux qui ne sont pas encore engagés dans la bataille le feront massivement.
A ce propos, un problème demeure d’ailleurs central : les conditions d’une alternative politique de progrès à gauche ne seront pas pleinement réunies à brève échéance, sauf à ce que se produise un processus de murissement accéléré, ce qui paraît assez improbable à ce stade…
Un élément intéressant semble par contre émerger : la conviction grandissante que le caractère simultané des mobilisations, leur concomitance, constitue une stratégie adaptée face à l’entreprise de saturation engagée par le gouvernement. Une idée progresse dans les esprits : le gouvernement ne pourra pas tenir sur tous les fronts et il devra finir par satisfaire au moins une partie des revendications.
Pour gagner la convergence des luttes, travaillons donc d’abord à faire grandir celles-ci et à leur simultanéité. Et faisons surtout grandir l’idée que toute victoire est bonne à prendre et constitue une étape en direction de ce qui doit rester notre objectif fondamental : en finir avec l’exploitation capitaliste.«