Le Syndicat de la magistrature (SM) proteste contre l’écart entre la mise en scène du « grand débat » et les moyens de la justice à l’heure de la prétendue « réforme ».
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Grand débat : cause toujours !
Communiqués de presse, publié le 14 février 2019, mis à jour le 14 février 2019
Les tribunaux continuent à se débattre pour fonctionner tant bien que mal avec des moyens qui font de la France la honte de l’Europe, sans aucune perspective sérieuse d’amélioration. La réforme constitutionnelle, pourtant tellement timide sur l’indépendance de la justice, est perdue dans les limbes. La mise en place des pôles sociaux dans les juridictions patauge dans l’amateurisme et l’improvisation de la chancellerie. Les magistrats du ministère public attendent toujours une réaction de Nicole Belloubet sur le rapport déposé le 1er octobre 2018 par l’Inspection générale de la justice, qui dénonce la crise grave du parquet français. Depuis plus d’un an, la chancellerie est incapable de formuler précisément ses intentions sur le volet réglementaire de sa réforme de la justice.
Mais il y a plus important, et le ministère de la Justice a le sens des priorités : il faut « grand- débattre » !
Dans un courriel envoyé hier aux présidents et procureurs des TGI, la secrétaire générale du ministère de la Justice, les « invite », en leur qualité de présidents et vice-présidents des CDAD (Conseil Départemental de l’Accès au Droit) à faire le nécessaire pour organiser localement « un ou plusieurs débats » sur le thème de « l’organisation de l’Etat et des services publics », conformément à « l’initiative du Président de la République ». L’objectif affiché est de « pouvoir constituer une cartographie citoyenne des besoins de service public à l’échelle locale » en associant aux CDAD les directions territoriales de la PJJ « afin de cibler les publics précaires et les jeunes ». En revanche associer les autres professionnels de la justice, magistrats, avocats, fonctionnaires de greffe, qui font valoir depuis des mois leur vision du service public de la justice contredite par le projet de loi, n’est pas apparu nécessaire à la chancellerie. Parallèlement, des enseignements seront annulés la semaine prochaine à l’Ecole nationale de la magistrature pour soumettre les élèves magistrats à une opération similaire, en présence d’un membre du cabinet de la ministre.
L’enrôlement forcé des chefs de juridictions ou de l’ENM pour répondre à l’initiative du Président de la République et afficher ainsi un succès du « grand débat » en dit long sur la conception toute personnelle qu’a le gouvernement du principe de l’indépendance de la justice. Il s’agit là d’un épisode de plus dans une longue série. (…)