Interview de responsables syndicaux : FO (4)

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L’Humanité a interrogé les responsables de l’intersyndicale. Objectif : dresser les perspectives de la mobilisation contre la réforme des retraites. Le 18 mai, Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrière.

 

Frédéric Souillot de FO : « Nous avons prouvé notre solidité »

France, Valence, 2023-03-02. Portrait of Frederic Souillot general secretary of the Force Ouvriere union. Photography by Nicolas Guyonnet / Hans Lucas. France, Valence, 2023-03-02. Portrait de Frederic Souillot secretaire general du syndicat Force Ouvriere. Photographie de Nicolas Guyonnet / Hans Lucas. (Photo by Nicolas Guyonnet / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

France, Valence, 2023-03-02. Portrait of Frederic Souillot general secretary of the Force Ouvriere union. Photography by Nicolas Guyonnet / Hans Lucas.
France, Valence, 2023-03-02. Portrait de Frederic Souillot secretaire general du syndicat Force Ouvriere. Photographie de Nicolas Guyonnet / Hans Lucas. (Photo by Nicolas Guyonnet / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

Publié le Jeudi 18 mai 2023 Cyprien Boganda L’Humanité

https://www.humanite.fr/social-eco/syndicats/intersyndicale-frederic-souillot-de-fo-nous-avons-prouve-notre-solidite-795470

 

Reçu par la première ministre Élisabeth Borne, le numéro un de Force ouvrière (FO) a exigé le retrait de la réforme des retraites. Alors que se profile la journée d’action du 6 juin, il a salué l’union syndicale, mais redoute que le gouvernement d’Emmannuel Macron utilise les outils constitutionnels pour enterrer la proposition de loi du groupe Liot visant à abroger cette réforme.

Qu’avez-vous dit à la première ministre, Élisabeth Borne, lors de votre rencontre ce mardi ?

Nous comptions arriver à cet entretien avec une revendication claire : le retrait de la réforme. Pour l’anecdote, j’avais apporté à la première ministre un de nos badges « retrait », en guise de cadeau d’anniversaire pour sa première année à Matignon : elle l’a pris mais elle ne l’a pas porté ! Le gouvernement a dit partout que nous n’avions pas fait de proposition : c’est faux.

J’ai remis à Élisabeth Borne un document récapitulant nos positions, qui démontre le caractère injuste et injustifié de sa loi, mais qui résume également nos propositions. J’ai toujours pensé qu’il fallait prendre le problème par le bon bout, c’est-à-dire par l’emploi, étant donné que notre système de retraites est financé à 80 % par de la cotisation. Commençons par améliorer l’emploi des seniors. Je rappelle le chiffre donné par l’économiste Jean-Hervé Lorenzi, pourtant pas catalogué comme hétérodoxe : si on augmente de 10 points le taux d’emploi des 55-64 ans, on fait rentrer 50 milliards d’euros de cotisations supplémentaires dans les caisses en 2030.

Le gouvernement donne l’impression que le match est plié. L’intersyndicale peut-elle encore arracher le retrait ?

Oui. Regardez les archives de l’INA : en 2006, Jacques Chirac et Dominique de Villepin étaient persuadés que le match était plié ! Et pourtant, le contrat première embauche n’a jamais été appliqué. La prochaine étape, c’est le 6 juin.

Et d’ici là, l’intersyndicale a mis en ligne une plateforme sur laquelle chaque électeur, en tapant son numéro de département, peut envoyer un courrier automatique à son député ou son sénateur, lui demandant de voter l’abrogation de la réforme.

Vous faites référence à la proposition d’abrogation du texte, portée par le groupe Liot, qui devrait être examinée à l’Assemblée le 6 juin. Ne craignez-vous pas que les macronistes fassent capoter l’opération ?

Le gouvernement pourrait utiliser, une fois de plus, tous les outils constitutionnels pour enterrer la loi, comme l’article 40 (interdisant une proposition de loi « aggravant une charge publique »). Si tel était le cas, cela ne ferait qu’approfondir la crise démocratique que traverse notre pays.

On a vu les effets produits par le 49.3. Et puis, pensons au message envoyé, cela signifierait que le Parlement ne sert à rien, si ce n’est à jouer les chambres d’enregistrement. Je souligne que 94 % des actifs sont toujours opposés au recul de l’âge légal.

Emmanuel Macron a tiré son bilan du mouvement social : « Moi je regarde nos entreprises privées : il y a eu très peu de grèves, quasiment pas », a-t-il déclaré…

Cela me rappelle les mots d’un président de la République expliquant qu’avec lui les grèves ne se voyaient pas (Nicolas Sarkozy – NDLR). De l’ancien monde au nouveau, les diatribes ne changent pas ! Je constate que les statistiques nous montrent que les grèves ont bien eu un impact sur l’économie : même si le président ne le voit pas, on le retrouve dans la productivité des entreprises privées.

 

Néanmoins, le blocage de l’économie, appelé de ses vœux par l’intersyndicale, ne s’est pas produit : le rapport des travailleurs à la grève s’est-il distendu au cours des dernières décennies ?

Le contexte économique rend la grève plus compliquée. Avec une inflation qui ne cesse de grimper, des salariés nous disent qu’ils ne peuvent pas se mettre en grève, car ils n’arrivent même pas à finir le mois. À FO nous avons tout mis en œuvre pour y remédier. Nous avons un fonds de grève interprofessionnel, alimenté tous les ans par nos 500000 adhérents, que l’on utilise en cas de mouvement social de grande ampleur. Cela nous permet d’indemniser chaque travailleur adhérent à hauteur de 30 euros par journée de grève.

Quel premier bilan faites-vous de cette intersyndicale historique ? Peut-elle tenir dans les mois à venir ?

Cela fait dix mois que nous prouvons sa solidité ! Je rappelle que le premier communiqué rédigé par l’ensemble des organisations a été publié le 12 juillet 2022, sur la question du pouvoir d’achat. Le deuxième est sorti le 9 septembre, au lendemain du premier Conseil national de la refondation : nous nous opposions alors à la réforme de l’assurance-chômage.

Et, sur les retraites, nous nous battons ensemble, autour d’un mot d’ordre commun : le refus du recul de l’âge légal et de l’allongement de la durée de cotisation. Cela ne signifie pas que nous sommes d’accord sur tout : mais, tant que nous nous retrouvons sur une même revendication et que nous assumons nos différences, il n’y a pas de raison pour que cela ne tienne pas.

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