Victoire syndicale aux USA (N°2)

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Voici un deuxième article, publié par « l’espace international » de la CGT (Amériques) sur la grève victorieuse dans l’industrie automobile aux Etats-Unis. Se succès pourrait entrainer d’autres mobilisations chez les hôtesses de l’air et les stewards.

 

amerique

Grève dans l’industrie automobile aux USA

Victoire historique : 25% d’augmentation et des nouveaux droits ! La lutte paie

Sans doute ne mesure-t-on pas encore pleinement la résonnance du mouvement historique qui dans le secteur automobile américain a permis de gagner sur des revendications salariales, et de quelle manière.

uaw

Une grève historique

Le syndicat UAW (United Auto Workers), une des organisations de travailleurs les plus importantes d’Amérique du Nord, qui comme un certain nombre des fédérations de la CGT est affilié à Uni Global Union, aura donc fait plier le puissant secteur de l’industrie automobile des Etats-Unis.

Quand on mesure le poids et l’influence de ce puissant secteur dans l’économie américaine et mondiale on comprend vite que les aspirations légitimes des travailleurs sont loin d’être une priorité. Concurrence exacerbée, compétitivité, gains, rendements, profits sont les principes qui guident le fonctionnement de ces entreprises. Après des décennies de recul sur le plan social, autant dire que le combat n’était pas gagné.

Pourtant c’est dans ce contexte que le syndicat UAW lance un mouvement d’une ampleur considérable le 15 septembre 2023. C’est la première fois que les trois grands constructeurs américains – Ford, General Motors et Stellantis (regroupant, notamment, Fiat, Peugeot et Chrysler) – font l’objet d’une grève simultanée qui va prendre des formes inédites. En effet, La grève de l’UAW devient vite « progressive ». Toutes les usines ne sont pas à l’arrêt mais chaque échec de négociation va déclencher un débrayage dans un nouveau site. Une façon habile d’économiser les forces et les moyens. Le syndicat possède en effet de quoi verser à ses 150.000 affiliés 500 dollars par semaine durant toute la durée du conflit, de quoi tenir bon et commencer à soulever un vent de panique chez les actionnaires. Pour l’industrie automobile un arrêt total de la production de dix jours coûterait 5 milliards de dollars, le compte est vite fait.

Le dossier est brûlant. Avec le mouvement à Hollywood qui dure et d’autres qui couvent, la possibilité d’un effet d’entraînement sur d’autres entreprises et d’autres secteurs de l’économie est réelle. La population soutient, tout comme la présidence américaine. Si Biden n’a pas réussi à obtenir une majorité au congrès pour ses propositions de réformes du droit du travail et du droit syndical, il voit cependant le bénéfice politique qu’il pourrait tirer d’un mouvement qui met en pleine lumière la bascule saisissante qui a continué de s’opérer dans le partage des richesses produites. Dans un contexte de forte inflation les inégalités ont continué de se creuser dans des proportions telles que les foyers de contestation n’ont cessé de se multiplier.

 

La contestation va particulièrement se cristalliser dans le secteur automobile. L’UAW reproche à l’industrie les écarts dans la redistribution des profits records réalisés après pandémie, alors que  dans le même temps les ventes de véhicules se sont envolées. Ces trois entreprises sont les protagonistes directs de cette tendance : alors que leurs bénéfices totaux au cours de la dernière décennie ont atteint la somme astronomique de 250 milliards de dollars – rien qu’en Amérique du Nord ! – les salaires réels des travailleurs américains de l’automobile ont chuté de 19 % depuis 2008. La coupe était trop pleine

 

UAW : Une stratégie gagnante

« Une fois de plus, nous avons réussi ce que, voici encore quelques semaines, on nous disait impossible. » Par ces mots, le président du syndicat états-unien des travailleurs de l’automobile (United Auto Workers, UAW), Shawn Fain, a salué une des plus grandes victoires de l’histoire syndicale du pays.

Chaque accord a été conclu sur quatre ans et demi et prévoit, sur cette période, une hausse de 25 % du salaire de base horaire, avec 11% dès la première année. Pour illustrer concrètement ce que cela peut signifier, on pourra enregistrer des hausses de salaire qui pourront atteindre 67% pour un salaire de départ chez Stellantis sur la période par exemple. Les accords rétablissent aussi des mesures d’ajustements réguliers des salaires au coût de la vie, un objectif majeur pour le syndicat.

Le système de statut à double vitesse mis en place après la crise de 2008 qui permettait d’instaurer des conditions de rémunérations à l’embauche et de progressions de salaires très régressif est fortement atténué sans être complètement éliminé. Des sites qui avaient été fermés vont réouvrir, comme à Detroit.

Le syndicat a même obtenu, dans l’accord avec Stellantis, une extension du droit de faire grève, dans un pays où celui-ci est fortement restreint, avec la possibilité de grève pour contester non seulement les décisions de fermeture d’usines, mais aussi les décisions d’investissement de l’entreprise. Cela renforce le pouvoir de l’UAW, qui pourra déclencher une grève à l’échelle du groupe pour défendre un site ou contester une décision d’investissement ponctuelle.

C’est aussi parmi les revendications perdantes mais significatives que cette grève nous marque, la demande de passer au 32h hebdomadaire avec maintien du salaire de 40h semaine a été constante tout du long de la grève et se trouve au cœur des objectifs du syndicat pour la prochaine séquence revendicative.

Au-delà des gains importants, la grève victorieuse dans l’automobile aux USA démontre la centralité « d’un syndicalisme de luttes » que nous soutenons depuis des années !

Toyota (où aucun syndicat n’est présent) s’aligne sur les hausses de salaires concédées par Ford/GM/Chrysler au syndicat UAW par peur que le syndicat s’implante aussi à Toyota. Quand les ouvriers se mettent en grève, toute la classe ouvrière en profite.

Les hôtesses de l’air et stewards pourraient être les prochains à déclencher une grève massive aux USA. Parmi les 26000 syndiqués 93% ont voté à 99% en faveur de l’autorisation de la grève pour des meilleurs conditions de travail et salaires.

La victoire est historique, mais dans le pays du capitalisme-roi elle reste sans doute plus fragile qu’ailleurs. Les actionnaires et les dirigeants ont perdu une bataille, mais ils ne désarmeront pas. De nombreux secteurs restent précarisés et la pauvreté dans et hors du travail continue de progresser. Alors plus que jamais c’est la lutte, et la lutte seule qui ouvrira des perspectives pour les travailleu-ses-rs.

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